Chapitre 16 - Blessure

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Il était tard lorsque le paladin arriva à la caserne. Elrynd se sentait toujours aussi mal. Il n'arrivait pas à se mettre dans la tête que Jaelith ne l'aimerait jamais comme il le désirait. Le jeune homme soupira longuement et se rendit dans son bureau où il s'affala sur sa chaise. Les yeux rivés sur le plafond, il n'arrivait pas à ne penser à autre chose qu'à la jeune femme aux longs cheveux blonds et aux yeux azur. Il se rappela leur première rencontre, qui était aussi un terrible jour pour Jaelith. Dès l'instant où il l'avait vu, il avait senti que son cœur ne battrait jamais pour une autre femme.

— Tout va bien mon général ?

Frederik venait d'ouvrir la porte du bureau. Elle avait l'air inquiet. Le paladin hocha la tête.

— Oui ça va... Juste un coup de fatigue... Et un peu trop de vin.

L'apprenti s'approcha de son supérieur, peu convaincue.

— Est-ce que vous êtes sûr ? Vous avez les yeux rouges...

Le cœur d'Elrynd battait à cent à l'heure. Etait-ce parce qu'il était frustré ? Frederik lui fit un large sourire.

— Vous voulez que je vous ramène un peu d'eau ?

— Non, ça ira...

La jeune femme se doutait que quelque chose n'allait pas.

— Mon général... Veuillez m'excuser, mais je pense que vous n'allez pas bien du tout.

Elle avait remarqué qu'il tremblait légèrement.

— C'est juste la fatigue...

— Vous êtes sûr ?

— Ne joue pas à la maman soupçonneuse, j'ai largement passé l'âge.

Il était perdu entre ses pensées et la réalité. Elrynd s'était relevé de son siège et s'était approché de son apprenti. Il posa une main sur sa joue. Frederik ne recula pas. Elle était surprise, mais se laissa faire, rougissant légèrement. Le paladin était déçu : il aurait préféré qu'elle le repousse, qu'elle lui hurle dessus, qu'elle parte en courant... Elle n’avait rien dit, elle l’avait laissé faire, appréciant la douce chaleur qu'il lui procurait. Elrynd l’avait prise dans ses bras, et elle s’était laissée faire, une nouvelle fois, en silence. Ils restèrent plusieurs minutes dans cette position, le jeune homme espérant toujours une quelconque réaction de refus.

En vain.

Il posa sa tête au creux du cou de la jeune fille, guettant sa réaction. Ses lèvres l’effleurèrent, son cœur battait la chamade… Il osa lui embrasser le cou. Elle trembla, mais ne dit rien. N’y tenant plus, Elrynd continua. Il laissa ses mains renforcer l’étreinte qu’il avait espérée, et Frederik sortit enfin de sa rêverie.

— Mon général…

Il s’arrêta net et leva son visage vers elle, peut murmura, honteux et frustré :

— J'ai envie de toi, Frederik.

C'était faux, et il le savait très bien. Elle s’était mise à rougir de plus belle, confuse. Elrynd posa ses lèvres sur celles de la jeune femme, savourant ce baiser qu’il attendait depuis tellement longtemps... Mais qui n'était pas donné par celle qu'il aimait vraiment. Leurs langues se trouvèrent, se touchèrent, se caressèrent. Les mains de Frederik s’accrochèrent timidement autour du cou de son amant, approfondissant ainsi leur baiser. Et ce soir-là, Elrynd se mordit les doigts d'avoir cédé à sa frustration…

Elrynd avait ouvert les yeux, doucement. Il tourna la tête vers la gauche et avait reconnu Frederik, encore dans les bras de la déesse du sommeil. Et en la voyant dormir ainsi, il se sentait atrocement coupable de ce qui s’était passé la veille. Il se releva, doucement, enfila son pantalon et alla dans la salle d'eau. Il n’osa pas croiser son propre regard dans le miroir et se contenta d’une toilette rapide. Coupable. Ce mot résonnait dans sa tête comme une épée de Damoclès. Il crut qu’il allait devenir fou. Il retourna dans la chambre et s'était assis sur le lit, attendant que la jeune femme se réveille. Ce qui ne tarda pas. Frederik ouvrit les yeux et se tourna vers celui avec qui elle s'était unie cette nuit. Elle demanda d'une voix encore fatiguée :

— Est ce que tout va bien ?

Elrynd secoua la tête.

— Non... Je crois que c'était une terrible erreur...

Jaelith dormait à poings fermés à ses côtés et l'homme à la cicatrice ne put s'empêcher de caresser ses longs cheveux dorés. Son cœur se gonflait dans sa poitrine : il l'aimait à en mourir. Doucement, elle ouvrit un œil, puis le second. D'une voix endormie, elle demanda :

— Tu ne dors pas ?

Il déposa un baiser sur ses lèvres.

— Le soleil est déjà levé depuis une bonne heure.

La jeune femme se leva en hâte et s'habilla rapidement.

— Et tu me laisse dormir sans me réveiller ?

— Je n'avais pas le cœur à le faire.

— Mais je vais être en retard !

Freyki soupira longuement avant de se lever lui aussi. Il enfila un pantalon puis se tourna vers sa compagne qui venait d'ouvrir la porte avec un large sourire sur le visage.

— J'ai bien envie de faire une inspection surprise à la caserne aujourd'hui.

Devant l'air surprit de Jaelith, il continua :

— J'aimerai bien voir comment tu t'en sors... Ce qui implique un rendez-vous en privé.

La jeune femme se retint de rire.

— Si tu veux. A toute à l'heure alors...

Elle lui fit un clin d'œil avant de disparaitre dans les couloirs.

Frederik savait que certaines choses lui échappaient, mais d'autres étaient sûres et certaines. Elle était très attirée par le général, et elle pensait que c'était réciproque. Pourtant, il y avait toujours ces longs regards rêveurs qu'il lançait à son capitaine. Cette façon qu'il avait de lui parler. Et cette tristesse qui apparaissait dans ses yeux lorsqu'ils se disputaient. L'apprenti soupira. Elle sentit son cœur se gonfler de jalousie dans sa poitrine. Elle ne détestait pas Jaelith, mais elle lui en voulait d'avoir blessé le cœur d'Elrynd. Elle avait très vite compris, cette nuit, pendant leur étreinte, que le général avait cédé à sa frustration par dépit.

Je crois que c'était une terrible erreur...

La voix d'Elrynd était pleine de remord lorsqu'il avait prononcé ces paroles. Elle ne lui en avait pas voulu. Au contraire. Elle éprouvait de la pitié pour cet homme qui n'obtiendrait jamais l'amour qu'il désirait ardemment. Frederik s'était donc rendu sur le terrain d'entrainement, comme d'habitude. Son capitaine était déjà là, épée à la main. Elle envoya rapidement son adversaire à terre.

— Qui sera le suivant ?

Un homme s'était présenté, mais ne tint pas plus longtemps que son prédécesseur. La jeune femme aux cheveux de cuivre esquissa un léger sourire. D'une certaine manière, elle avait compris qu'elle était jalouse de Jaelith. La Dame paladin était forte, courageuse, douée et elle avait conquis le cœur d'Elrynd. Et tout cela en très peu de temps. Frederik aurait donné beaucoup de choses pour être à sa place. Elle leva les yeux au ciel, perdue dans sa rêverie.

— Frederik, vous allez rester plantée là toute la journée ?

La voix de Jaelith était douce, mais ferme. Avec un large sourire, elle lança une épée de bois vers son prochain adversaire qui l'attrapa à la volée.

— Faites attention à vos jambes cette fois !

— Je n'y manquerai pas capitaine.

L'apprenti donna alors le premier coup qui fut paré. Un second suivit, lui aussi facilement paré. Aucunes n’arrivaient à toucher l’autre, elles paraient, évitaient, contre-attaquaient. Et cela dura quelques minutes qui paraissaient bien longues. La voix de Jaelith se fit alors entendre.

— Tu as l'air préoccupée, je me trompe ?

Frederik para le coup qui suivit avant de répondre.

— Non, ce n'est pas important.

Elle recula, prête à parer le prochain coup. A présent, elles se trouvaient face à face, immobiles. La première qui bougerait perdrait sûrement. Frederik avait mentit. Elle se demandait si vaincre Jaelith était une chose impossible. Elle se demandait si elle pourrait la vaincre sur le plan physique, mais aussi dans le cœur d'Elrynd. L'apprenti ferma les yeux se concentra comme on le lui avait appris. Elle sentit quelque chose brûler au fond d'elle-même et se lança vers son adversaire.

Jaelith vit tout ce qui suivit se dérouler au ralentit devant ses yeux. Frederik fonçait droit sur elle, et une lumière entourait son épée. La dame paladin tenta de parer le coup, mais son arme se brisa en morceaux qui tombaient lentement sur le sol. L'épée de Frederik l'avait atteinte au flanc gauche, la brûlant. Jaelith s'était retenu de hurler de douleur et était tombée sur le sol, ses mains posées sur sa blessure.

Frederik avait laissé tomber son épée à terre, ne réalisant pas encore ce qu'il venait de se passer. Ses camarades s'étaient approchés et entouraient leur capitaine, l'air inquiet. L’un d’entre eux s’était même mis à hurler.

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