Berlin 1976

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Voici un deuxième chapitre qui est la suite du premier puisqu’il se déroule à Berlin. Ce sont des émois qui auraient pu me faire prendre conscience à 18 ans que j’étais homosexuel. Lorsque j’ai vu que les textes du défi sur Scribay seraient lus par « des professeurs », j’ai pensé que je devrais écrire une dissertation, comme à l’école, les miennes n’étaient qu’une suite de poncifs et de banalités. C’est plutôt sous cette forme que je vais continuer et j’attends la note.

Tout d’abord le contexte de l’époque, que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Il n’y avait pas d’internet, donc pas la possibilité de mater des hommes nus sur son ordinateur ou son smartphone à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Pas d’accès non plus à des revues pornographiques, parce qu’elles étaient interdites ou inaccessibles pour moi qui n’aurait pas eu d’argent pour en acheter. On ne trouvait que des Playboy où les femmes gardaient encore leur culotte. La seule possibilité que j’avais était donc ce mater des hommes dans la réalité, soit dans des vestiaires, sous la douche ou dans un dortoir.

J’étais donc au gymnase (qui correspond au lycée en France), dernière année avant le bac. Nous pouvions choisir entre un camp de ski et un voyage. J’avais choisi le voyage à Berlin-Est (le communisme était encore à la mode à cette époque).

J’ai vu Lorenzo se lever (je m’aperçois qu’il y a beaucoup de prénoms italiens dans ces souvenirs). Il y avait des lits superposés, il s’est assis sur celui du dessus, il avait eu de la peine à se réveiller. J’ai parlé de slips blancs dans le chapitre précédent, c’était plutôt la fin de cette époque, on trouvait de plus en plus de sous-vêtements colorés, le slip de Lorenzo était brun. Petit détail, il bandait et cela ne semblait pas le déranger en discutant avec nous. Il n’avait peut-être pas remarqué, moi cela m’a frappé puisque je m’en souviens. J’avais la tête à la hauteur de la bosse.

Avec le recul tout cela me semble anecdotique, était-ce nécessaire de vous en parler ? Peut-être pour comparer avec mes récits, cette scène anodine se serait transformée en une branlette collective. La plupart de mes camarades avaient déjà des copines et ne devaient plus ressentir le besoin de se masturber avec d’autres garçons.

Quand même une branlette collective lors de ce séjour à Berlin, sur la scène d’un théâtre dans la pièce Frühlings Erwachen (L'Éveil du printemps), de Frank Wedekind. Le spectacle était donné au Berliner Ensemble, la professeur d’allemand nous avait lu des extraits de la pièce avant, elle s’était arrêtée avant la scène de masturbation, nous disant qu’elle n’osait pas lire la suite, surtout devant une classe de garçons. Les acteurs ont seulement suggéré la scène en ouvrant leur braguette et tourné le dos au public.

Si l’on lit la pièce distraitement, on peut même rater la scène, l’auteur la décrit par allusions. Il y a une pièce de monnaie déposée sur le sol et celui qui l’atteint la gagne.

Dernier émoi, le dernier jour du voyage, à l'ouest, le film Salò ou les 120 Journées de Sodome, de Pier Paolo Pasolini, encore interdit en Suisse. Cela ne faisait évidemment pas partie du programme, la journée était libre. Certains ne sont pas restés jusqu’à la fin.

C’était la découverte de la nudité masculine au cinéma, en particulier des pénis en gros plan au début, et une scène de pénétration homosexuelle. De nouveau le contraste incroyable avec l’époque actuelle. Devoir aller à l’étranger pour voir ce film sulfureux et découvrir des hommes nus ! Il n’y avait évidemment pas que ça dans ce film et il pourrait encore choquer certains d’entre vous de nos jours.

Pour conclure ce deuxième chapitre, je ne sais toujours pas pourquoi je n’ai pas découvert mon homosexualité à ce moment-là.

Lorenzo est malheureusement décédé il y a de nombreuses années.

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