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Je me décide à partir, des idées plein la tête, je ne sais plus quoi penser ou alors je pense trop, déjà poser le pied et faire mes exercices, trop de choses en même temps vivement que je m’en aille que je rentre chez moi reprendre mes habitudes, tout au moins une partie, parce c’est pas gagné.

Une autre chose me triture, je sens maladroitement que tous mes petits voyages m’enrichissent, je ne trouve pas d’autre mots, comme si mes idées, ma manière de penser apprenait quelque chose. Je n’ai plus l’entourage de l’école, les copains de mon âge, les échanges qui se limitent aux devoirs du lendemain, les jeux les blagues les profs, je n’ai que des adultes ici autour de moi, ou alors c’est le fait que mes déplacements me permettent de prendre une partie plus âgée que je ne le suis, je fais des recherches sur mon ordinateur, je vais chercher, je ne le faisais pas auparavant, ou alors les gens que je visite m’apportent quelque chose, j’ai douze ans, mais j’ai plus, je vais commencer à comprendre le monde des adultes, et surtout ne pas le montrer. J’enrichis mes dossiers en rentrant avec un gros point d’interrogation concernant la nature, je laisse ça pour plus tard, pour l’instant j’ai besoin des personnes et je n’ai pas encore tout compris. J’ai largement le temps avant le repas du soir, je vais faire comme ce matin, voir si je peux visiter mes voisins.

Je m’installe sur le fauteuil, l’écran est allumé, un film pris au hasard, et je ferme les yeux, mon voisin à côté celui de l’accident, je m’approche doucement, je rentre dans son cône, tout d’abord il n’y a rien, j’allume une étincelle pour montrer que je suis là, si c’est comme l’autre fois, j’attends un petit peu, je ne sais pas trop ce que je vais faire, tenter comme l’autre fois d’échanger, il ne sait pas qui je suis, et même s’il le savait il ne peut pas bouger. La lumière se propage, éclatante de douleur, maintenant je sais que c’est son sentiment, je suis triste pour lui, je ressens sa couleur, le rêve est sans paroles, tout au moins celui-là, de nouveau au milieu de la pièce la carcasse de voiture apparaît, je ne sais quoi donner en échange sans trop me fatiguer, je crois que j’ai une idée suite à ma promenade. Quelque chose de calme, une partie du patio avec les plantes en pots, j’agrémente de fleurs, la ferraille au milieu commence à disparaître, je ne sais pas ce que je suis en train de lui dire, mais je crois qu’il regarde si c’est le mot exact, il faut que je fasse attention à ne pas trop créer, j’attends de voir sa réponse, et petit à petit je distingue des arbres, on dirait une forêt pas loin de mon espace, il me semble qu’un tout petit jardin est en train de se dessiner, ça me fait un peu sourire, je pense à celui de ma mère qu’elle veut refaire chaque année, ce dont je me souviens, ça finit toujours en vrac parce qu’elle n’a pas vraiment le temps de s’en occuper. Je le regarde faire, un bois et des cultures à toute petite échelle, je rajoute un chemin qui mène vers les arbres j’essaie de dessiner, c’est assez maladroit, mais on est dans un rêve, un couple de personnes avec un animal qui remontent le sentier, quand on regarde de loin on dirait un tableau, et c’est à ce moment que quelque chose se passe. La lumière fluctue, comme un tube d’éclairage qui commence à griller, la lumière éclatante devient éblouissante ou vire vers le sombre, ses objets disparaissent il ne reste que les miens qui commencent à flouter, je ne me concentre plus dessus, je me sens éjecté, le cône disparaît, enfin je crois, parce que à sa place il est devenu rouge, d’autres rouges apparaissent et viennent le rejoindre, j’entends dans le couloir une multitude pas je crois que c’est le moment de regagner ma place pour que j’ouvre les yeux.

Je me tourne du fauteuil je vois du personnel qui passe et qui semble se diriger plus loin, vers la chambre d’où je viens semble t’il. Un peu confusément, mais je n’ai pas tout compris, je crois qu’il vient de se réveiller, je viens de faire quelque chose, sans trop savoir comment. Je me lève de mon siège pour aller regarder, j’aperçois à travers la fenêtre du couloir un infirmier qui pousse une machine sur roulette avec un écran et des tubes, j’ai ouvert ma porte pour voir précisément, c’est bien la chambre de l’accident qui est restée ouverte, l’infirmier y pénètre, je n’ose pas m’approcher, mais je sais que c’est moi, j’ai dû faire quelque chose de bien, je demanderais ce soir au moment du repas, ou j’attendrais plutôt qu’on me le dise. Je retourne satisfait dans mon lit, j’éteins l’ordinateur et j’allume la télé, rien de bien intéressant, mais il faut que je me change les idées, je me sens trop content d’avoir fait quelque chose, vivement le repas.

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