L'émotion, la vraie, la bonne, la brute, la truande, est celle qui s'insinue partout, sous la peau, dans les yeux, dans les méandres de l'estomac. L'émotion est tension, comme un arc sans flèche. L'émotion reste parfois sous clé, quand elle est trop forte, quand elle est secrète ou quand ce n'est pas le moment.

Mon émotion d'aujourd'hui, c'est à vous, Scribayeurs, Scribayeuses, que je la dois. Pourquoi après des années d'émotions retenues, d'écriture secrète, ai-je soudain réussi à proposer mes lignes à des inconnus ? Je n'en ai aucune idée, j'étais prête, c'est tout... Ce n'est rien et pourtant, c'est si fort ! J'ai publié comme j'aurais sauté d'une falaise : dans le vide, un peu en fermant les yeux, un peu sans réfléchir comme on se dit que finalement, on verra bien si l'eau est bonne ou pas, une fois qu'on tombera dedans. Or ici l'eau est chaude, accueillante, merveilleuse.

Mettre des mots sur l'émotion-qui-ne-dit-pas-son-nom, ce n'est pas simple. Pourtant le ressenti est caché derrière chaque mot mais aussi, derrière chaque son, car la musicalité des phrases porte pour moi, depuis toujours, presque autant de sens que le verbe en lui-même.

Fierté ?

Non, je ne crois pas, les mots sortent comme une évidence mais je n'ai pas de raison d'en être fière, ou d'en avoir honte.

Amour ?

Non plus, car ce sont bien les personnages et non moi que vous aimerez, ou que vous n'aimerez pas.

Espoir ?

Non, car je n'attends rien, pas de Goncourt ;) Ni même de qualification d'écrivain... A 16 ans, je voulais être Arthur Rimbaud ; à 17, il était déjà trop tard ! Alors depuis je n'espère plus.

Plaisir ?

Oh oui, plaisir de lire et d'être lue, plaisir de voir que ce qu'ont pu suinter mes tripes sait trouver écho dans d'autres lieux, d'autres yeux, d'autres temps.

L'émotion tord le ventre, étreint les poumons, ruisselle sous les paupières. Elle grandit, désarçonne, étouffe même parfois. Mais toujours, encore, elle illumine !!!

Merci à tous.