Manon Thieblemont n'était pas jolie.

Elle avait un trop long nez et son visage était trop masculin.

Une mâchoire carrée et un front proéminent.

Des cheveux blonds et secs, que personne n'entretenait comme il le fallait.

Manon Thieblemont croisa ses mains devant elle et interrogea sans peur les hommes qui gouvernaient ce monde.

Un procès en bonne et due forme par l'intermédiaire des rares médias qui avaient le courage de s'opposer.

" Quels sont les critères de choix des femmes et des hommes qui formeront l'humanité ?," demanda séchement Marie Thieblemont.

Elle ajouta ensuite :

" La beauté ? L'intelligence ? Les femmes doivent être belles et les hommes intelligents ? Ils doivent être jeunes et sans défaut ? Vous faites quoi ? Une sélection naturelle ?"

Elle sourit et annonça en s'écartant de la tribune d'où elle parlait si fort :

" Je vous présente trois femmes sélectionnées dans mon quartier pour ne pas être stérilisées. Julie, Lucie, Clémence."

Trois merveilleuses femmes apparurent, gênées d'être ainsi mises en avant.

Manon se plaça à leur côté et le contraste fut saisissant.

Ce n'était pas la beauté et la laideur, mais on s'en rapprochait.

" Je préfère l'intelligence à la beauté ! Vous auriez renvoyé Stephen Hawking ou Marie Curie. Il faut d'autres critères que simplement la beauté.

- Il faut être laid pour être intelligent ?," s'amusa un des journalistes.

Il fut foudroyé du regard par Manon Thieblemont, elle asséna :

" Non. Mais il ne faut pas penser qu'à la perfection du corps. Julie, Lucie et Clémence sont de magnifiques jeunes femmes...mais cela suffit-il pour fonder une nouvelle humanité ?

- Vous voulez dire qu'étant des femmes, elles doivent être laides pour être intelligentes ?

- Hedy Lamarr fut considérée comme l'une des plus belles femmes du monde, elle fut une exceptionnelle scientifique et une farouche antinazie. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit !"

On comprit.

Il fallait revoir le processus de sélection.

La beauté ne suffisait pas.

Il fallait faire passer des tests.

Mais l'intelligence était-elle nécessaire ?

Quels tests faire passer ?

On sourit et on décida de laisser la main-mise à chaque commune pour régler le problème.

La fertilité était illégale.

La laideur devint suspecte.

L'intelligence était subjective.

Réfléchir devint un crime.