Un enfant sur son vélo

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https://www.youtube.com/watch?v=DM74fc2Umo0


Un enfant, sur son vélo. Il sillonne une campagne vallonnée, par un clair après-midi d'été. Il rentre chez lui. L'air sur son visage est agréable. Il regarde un peu les paysages à l'entour. Mais pas trop. Non, pas trop, parce qu'il ne connaît pas encore le vertige du regard. Les monts boisés, les côteaux parsemés de vignes, le réseau des clôtures, la route qui semble se faufiler parmi les prés comme pour ne pas déranger, le ciel si vaste qu'il pourrait ne jamais finir, tout cela lui semble limpide comme le bruit que fait son dérailleur, lorsqu'il ne pédale pas.

Il ne sait pas encore que, dans quelques années, il sera capable de remettre tout cela en question. Il ne connaît pas encore le monde immense de sensations, d'idées, d'images, de pressentiments qui s'ouvrira à lui, et dans lequel il aura souvent l'impression de se noyer. Il ne sait pas qu'il doutera de lui-même, de ce qu'il a jusqu'à maintenant simplement accueilli, considéré comme donné. Il ne sait pas qu'on peut avoir parfois raison, parfois tort dans son doute, et à quel point il est difficile de faire la différence.

Les cheveux ramenés en arrière par le vent, les yeux à moitié plissés, une innocente grimace sur le visage, il progresse, simple et fier, sur la route qui le mène chez lui. Il ne sait pas qu'un jour, il cherchera à savoir d'où il vient vraiment. Que sa maison à la campagne ne lui suffira plus. Qu'il trouvera le sentiment du foyer dans d'autres choses. Dans la musique, dans certaines amitiés, dans certaines émotions. Dans le bruit que fait le vent dans les arbres. Dans le chant des oiseaux par une matinée de printemps. Dans la lumière généreuse et inconcevable d'un soleil couchant. Il pensera que sa maison est faite de choses bien étranges. Il ne comprendra pas.

Il aura l'impression que, en quelque sorte, seul le ciel est à même d'être sa maison. À cause des étoiles. À cause du vide. Un peu par dépit, mais aussi pour d'autres raisons, plus profondes, plus vraies, il trouvera beaucoup de réconfort dans le vide.

À l'intérieur du cercle de la roue, les rayons défilent à toute vitesse. Lorsque l'enfant donne un coup de pédale, le bruit de crécelle s'interrompt. On croirait qu'il s'évertue à trouver un rythme secret, entre l'effort et le repos, le bruit et le silence. Pour l'instant, il est encore un géant, un habitant des paysages.

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