Constat

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 Bon, là, c'est le constat. Autant ne pas s'en cacher, personne ne comprend. Absolument personne. D'abord, un d'entre nous l'a vu. C'est Arthur, après le retour de vacances, en égrenant les poèmes dont son département a la charge. Je me rappelle encore avec netteté. Notre poète préféré pose son regard sur un sonnet, et là, tout à coup, les yeux s'ouvrant en grand, se met à feuler comme un chat. Bon, normalement, on ne prend pas garde aux sons qu'émet Arthur. Le jeunot est, avec nous, une des muses chargées du Bureau des Arts célestes. Délégué au contrôle des poèmes terrestres, Arthur s'assure de leur pesant de cacahuètes en expert reconnu. Car, quand on ajoute ses ébats avec Paulo, son Dormeur du val, son bateau bourré et sa coupe de cheveux éternellement foutraque, faut quand même admettre que le jeune endosse avec panache son statut de superbe talent. Pour le rendre plus heureux encore, on le surnomme le Voyant. Bref, ce jour là c'est Arthur, donc, le découvreur du truc. Comme deux ronds de flan, qu'on a pu être.

  • Eh ! Les gars ! Elle a, elle a...
  • Elle a ... Elle a ... Eh ben, crache-la Arthur, ta valda !
  • Elle a foutu le camp !

 Bon, au début, faut admettre qu'on a pas forcément cru notre ado préféré. Passé l'étonnement, c'est l'épouvante. Elle a foutu le camp. Arthur a eu du nez. La lettre n'est plus là, dans aucun texte. On a cherché, ça c'est sûr. Longtemps. Plus un roman, plus une lettre, plus une correspondance, plus un compte-rendu, plus aucun journal pour comporter la lettre. Là, autant vous en parler à vous, c'est le bordel total. Total. Les gars sont comme fous.

*          *          *

 Et encore, ce n'est pas le plus beau. Vous voulez l'apprendre ? Le plus beau, dans cette blague, on s'en rend compte seulement le jour d'après. C'est comme la peste, ce truc. Ça se propage. Des hommes aux muses, comme des poux. Là, c'est Proust, le chef du contrôle des romans, en se prenant le chou avec Sade, le chef du bureau rose, qu'a repéré ça chez nous, quand on parle.

  • Gros dégueulasse !
  • Mangeur de gâteaux !
  • Ah, non, Comte ! Je ne mange pas de gâteaux ! Tout, sauf ça ! Quand je me remémore, je mange des ... des ... heu ... des ...
  • Des ... Des ... Des gâteaux, crénom ! Vous êtes un mangeur de gâteaux ! Et surtout, cher Marcel, cessez de m'appeler Comte de Sade ! Pouvez-vous ne pas écorcher mon nom complet ?

 Alors là, notre esthète moustachu a regardé notre satyre préféré, les yeux ronds comme d'énormes boules, et a balancé ça :

  • Votre nom complet ? Quel est ce nom complet, très cher ?
  • Vous le savez ! Je m'appelle le ... heu ... le ... le ... Comte de Sade ?

 Là, les deux se sont regardés longuement, perplexes. De cette seconde, nous avons su. On a chopé le truc. Tous. Hommes de lettres et muses. Tous. Les gars comme les dames. Alors, ben, on désespère dès lors, beaucoup. Parce que le remède, vous vous en doutez je pense, on le cherche comme des tarés, sans succès pour le moment. On ne compte pas nos heures. C'est comme ça ... La lettre a foutu le camp... Alors je vous parle de tout ça car la peur, à présent, on l'a pour vous. Vous. Les lecteurs. Prenez garde ! Quand vous causez, prenez garde. Au cas où ... Bonne chance, et rappelez-vous : la lettre peut foutre le camp à tout moment. Bonne chance à vous ... Nous, de notre côté, on mène l'enquête ...

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