Chapitre 11 : Le secret de Kinoshita Saya

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Nous étions déjà à notre à la fin de notre semaine à Paris.

Après moults visites touristiques, Yuna et moi avions pensés voir un dernier lieu : les catacombes. Si on nous avait demandés pourquoi nous voulions voir cet endroit, j’aurais répondu que nous voulions voir et nous imprégner de ce morceau d’Histoire de Paris. Si ça avait été Yuna qui avait répondu, elle aurait dit qu’elle voulait savoir si l’endroit était effrayant. Était-ce le cas ?

-J’ai pas vraiment eu peur, là-dessous. Mais je crois que c’était parce qu’on était avec un guide et en groupe. Seule, je dis pas…, m’avait-elle alors que nous étions sur le chemin du retour.

-Yuna, non !

-Quoi ?

-On ne faussera pas compagnie au groupe pour explorer de notre côté !

-Mais ! Pourquoi ?

-Parce que le guide a dit que c’était un vrai labyrinthe là-dessous et en plus, je ne suis pas sûr de la légalité de ton affaire !

Elle m’a fait la tête jusqu’à ce qu’on sorte.

Le lendemain, dernier jour à Paris, nous sommes restés à l’appartement. D’une part, pour profiter l’un de l’autre à fond (pas besoin de faire un dessin) et de l’autre, pour tout nettoyer avant notre départ.

Nous avions déjà nos billets de train pour notre départ en direction du Havre. Nous devions retrouver Kinoshita et Aoyama à la Gare du Nord, le lendemain matin.

En parlant de Kinoshita, elle et Yuna semblaient s’entendre de mieux en mieux. Ce n’était pas la grande amitié, selon ma copine, mais comparé aux débuts, elles avaient clairement fait du chemin. Pareil avec Aoyama, mais dans une mesure différente. Peut-être que le fait qu’elles seraient en compétition l’une contre l’autre dans les prochains tournois de basket rentrait en compte…

Mais je me posais quand même quelque question… La dernière fois que nous sommes sortis à quatre pour une balade, je trouvais Kinoshita de plus en plus tactile avec Yuna. Je savais qu’entre filles, la proximité était plus simple mais… Quelque chose dans ma tête me disait qu’il y avait autre chose. Et une autre me disait que j’étais paranoïaque. Ne sachant quoi en penser clairement, j’ai mis ça de côté. Pour l’instant…

Jour du départ pour le Havre. Gare du Nord.

Notre train était prévu pour dix heures, avec arrivée à destination vers midi. Yuna et moi étions arrivés trop tôt à la gare et en patientant, nous avons pris un café. Kinoshita et Aoyama sont arrivés vingt minutes avant le départ, mais une annonce avait été diffusée comme quoi notre train allait avoir un peu de retard.

-« Un peu », c’est assez relatif, quand on parle des trains, en France…, nous avait-dit Kinoshita avec une mine un peu abattu à la suite de cette annonce.

Finalement, après une vingtaine de minutes après l’heure de départ prévu, nous avons enfin pu monter à bord et nous installer à nos places : quatre sièges qui se faisaient face, avec une tablette nous séparant. Encore quelques minutes plus tard, le train quittait enfin la gare.

Pour passer le temps, Aoyama sortit un jeu de cartes et nous jouâmes une bonne vingtaine de minutes, avant que Kinoshita et moi arrêtions. Alors que Yuna discutait tranquillement avec Aoyama, je lisais mon livre et Kinoshita faisait de même avec le sien.

Elle et moi n’avions pas reparlé de l’incident du restaurant depuis que je lui avais envoyé ce message. Et à dire vrai, j’étais un peu sur mes gardes, maintenant. J’avais toujours en tête ce qu’elle m’avait envoyé quand je lui ai demandé de plus faire ça : « Je vais essayer ». C’était vraiment trop ambigüe pour que je la crois !

(Reste sur tes gardes, Soldat Shûhei ! L’ennemi peut attaquer à tout moment !)

(L’ennemi… Mais Kinoshita n’est pas… !)

Soudain, je sentis quelque chose caresser ma jambe en pensant sous mon jean. Un léger frisson m’a parcouru et j’ai légèrement sursauté. Cette sensation… Je la reconnaissais !

J’ai jeté un œil à Kinoshita, qui semblait lire tranquillement son livre comme si de rien n’était. Discrètement, pour ne pas alerter Aoyama et Yuna, j’ai regardé sous la petite tablette où nous avions posés quelques affaires, en espérant que ce n’était que mon imagination.

Hélas, ce ne fut pas le cas. À cet instant, Kinoshita Saya, qui avait retiré sa chaussure, était en train de me caresser la jambe avec son pied nu.

Après avoir lorgné rapidement sur ses (belles) jambes, j’ai été atteint d’une prise de conscience en plus d’une crise panique que je dissimulais du mieux que je le pouvais. Ce n’était pas comme au restaurant, là ! Au restaurant, elle avait une table entière pour dissimuler son acte ! Mais là, il suffisait de baisser la tête pour voir ce qu’elle faisait ! Et si Yuna baissait la sienne…

Je devais agir et avec la plus grande discrétion. J’ai d’abord secoué ma jambe pour lui faire comprendre qu’elle devait arrêter. Ce n’était pas très efficace… Par la suite, elle a légèrement baissé son livre et nos regards se sont croisés. Le mien traduisait de l’agacement et une pointe de colère. Le sien… me rappelait l’espièglerie que je voyais quand Yuna m’embêtait. Ça et autre chose…

Tout en soutenant mon regard et en ignorant les deux autres, elle continuait de me faire du pied. À chaque fois que je secouais ma jambe pour qu’elle arrête, elle revenait inlassablement à la charge. Je n’étais pas un expert dans le domaine, mais c’était clairement une tactique de séduction ! Plutôt agressive, en plus ! Je savais que je devais être plus ferme, pour qu’elle comprenne. Mais je craignais de trop attiré l’attention. J’avais l’impression d’être coincé ! D’avoir été ferré comme un poisson !

(Réfléchis ! Réfléchis ! Comment je vais me sortir de ça ?)

Alors que je cherchais une solution, un miracle ou autre, ce qui me sauva… ce fut Yuna. Soudainement, il m’a prise dans ses bras et m’a câliné. J’ai bien sûr été surpris mais pas autant que Kinoshita, qui retira aussitôt son pied.

-Qu’est-ce que tu fais, toi !? ai-je demandé à Yuna.

-T’as pas écouté ? Aoyama et moi, on voudrait aller à la plage. Y a bien une plage, au Havre, n’est-ce pas, Saya ?

-Oui, répondit cette dernière. Le tram passe non loin de là où nous logerons et peut nous y emmener rapidement.

-Génial. Tu entends, Shûhei ? Tu vas bientôt me voir dans mon joli maillot de bain ! Et tu auras intérêt à ne regarder que moi !

Il disait cela en plaisantant à moitié et en riait. Un garçon normal se serait estimé chanceux et heureux à la perspective de bientôt passer du temps à la plage, entouré de filles en maillots de bain. Mais avec Kinoshita qui agissait bizarrement, je ne savais pas si c’était une si bonne nouvelle que ça…

Aux alentours de midi, comme prévu, nous sommes arrivés à la gare du Havre. Cette dernière était bien plus petite que la Gare du Nord, à Paris. Yuna et moi avions même comparé ça à une gare de province, au Japon.

Lorsque nous avons posé le pied à l’extérieur, nous avons ressenti un effet… apaisant. À Paris, l’agitation de la foule avait un drôle d’effet sur Yuna et moi. Ça n’avait rien à voir avec Tokyo, où on a mis un peu de temps à s’habituer à l’effervescence de la ville. Là-bas, on pouvait être stressé très rapidement, juste en marchant dans la rue. Ajouté à cela les gens qui nous regardaient bizarrement quand on passait à côté d’eux sur le trottoir, surtout certains vieux, certains commentaires déplacés de types lorsqu’ils voyaient Yuna (heureusement pour elle qu’elle ne pige pas un mot de français), le bruit permanent et d’autres choses…

Là, c’était plus calme. Moins de monde dans les rues, moins de bruits… J’avais presque l’impression d’être dans ma ville natale.

GRUUUUU…

Nous sommes tournés vers l’origine de ce bruit insolite, pour comprendre que c’était l’estomac de Yuna qui criait famine. Elle nous regardait en rigolant légèrement, l’air un peu gênée. Kinoshita proposa alors qu’on aille déjeuner avant de rejoindre l’appartement que nous avions loué. Une bonne chose qu’on avait qu’à traverser la rue pour trouver un restaurant. Nous avons opté de manger dans un endroit en face de la gare appelé Le Bosphore, un restaurant rapide où on pouvait manger des kebabs. En entrant, le patron semblait avoir reconnu Kinoshita et lui souhaita le bonjour comme s’ils étaient de vieux amis. Après avoir commandé nos plats, nous avons pris place à un table.

-Tu connais le chef ? demanda Aoyama à Kinoshita.

-Si on veut, répondit cette dernière. La première fois que je suis venue dans cette ville, j’ai dîné dans ce restaurant. Depuis, chaque fois que je viens au Havre, j’y viens manger au moins deux fois : à l’arrivée et au départ.

-Tu es venu souvent, dans cette ville ?

-C’est la deuxième ville où j’ai séjourné le plus, après Paris.

Ce fut là que je me suis dit que c’était une bonne chose qu’elle soit avec nous, pour cette partie du séjour. Malgré ce qu’elle avait fait plutôt…

(Faudra quand même qu’on discute en privé de ça…)

Après un repas plus copieux que nous le pensions (enfin, surtout pour Yuna et Aoyama, qui se sont presque goinfrée tellement elles avaient faim et qu’elles trouvaient ça bon…), nous avons remonté ce qu’ils appelaient ici Cours de la République jusqu’à un café appelé The Campus. Dans les environs, nous sommes entrés dans un immeuble, non loin d’une résidence pour étudiants, avons monté des escaliers étroits (imaginez faire ça avec des bagages) et arrivés à l’étage indiqué, nous avons ouvert la porte de notre nouveau lieu de séjour. L’appartement était petit mais bien décoré. Pas de baignoire (au grand dam d’Aoyama et Yuna) mais une douche fonctionnelle. Un petit coin cuisine qui communiquait directement avec ce qui servait de salon et deux chambres avec lit, où on risquait d’être serré à deux.

-Une bonne excuse pour se faire des câlins, non ? fit remarquer Yuna en voyant l’endroit où nous allions dormir.

-Tu penses très souvent à ça, depuis qu’on est parti de Tokyo…, lui ai-je fait remarquer.

-Pas ma faute si j’aime le faire avec mon petit copain…

Elle a légèrement rougi en disant cela et souriait en même temps.

(Dire qu’elle ne pensait pas du tout au sexe, jusqu’en décembre dernier…)

Après un tour rapide des lieux, Kinoshita a déclaré qu’il fallait sortir faire des courses et ensuite, si nous en avions encore envie, nous irions à la plage. Le programme semblait convenir aux autres et je n’avais rien contre.

Elle me demanda de l’accompagner pour les courses. Une bonne chose, vu qu’on avait des choses à se dire loin des oreilles des autres. Surtout celles de Yuna.

Nous sommes allés au marché un peu plus bas de Cours de la République pour faire nos achats. Alors que Kinoshita prenait de quoi faire un petit-déjeuner convenable pour demain, j’entamais le fameux sujet qui allait fâcher :

-Kinoshita, il faut qu’on parle.

-Oui ?

-Qu’est-ce qui t’as pris, dans le train ?

-Quoi ? Tu n’as pas aimé ?

(Non mais t’es sérieuse !?)

-Vraiment ? Tu veux la jouer comme ça ? Qu’est-ce qui te prend ?

Pour seule réponse, je n’ai eu droit qu’à un sourire qui se voulait espiègle. Et j’ai trouvé cela irritant. Je l’ai suivi et ai continué :

-Tu es folle, de faire ça ! Tu sais que je suis avec Yuna et que j’y tiens, à ma relation avec elle.

-Je sais.

-Alors pourquoi tu fais ça ! En plus, ça te ressemble pas !

Elle s’arrêta subitement puis se tourna vers moi. Le visage dur, elle me lança ceci :

-Qu’est-ce que tu en sais ? Qu’est-ce que tu sais de moi ?

Elle n’avait pas employé son habituel ton calme qui la caractérisait si bien. Ce n’était pas non plus celui qu’elle employait quand elle usait de son autorité de déléguée ou quand elle était légèrement irritée. Non, j’avais l’impression que c’était à un niveau différent ; un niveau que je n’avais pas encore vu. De plus, elle n’avait pas complètement tort. En-dehors de ce que je savais d’elle au lycée, je ne la connaissais pas tant que ça. En même temps, elle comme moi restions discrets sur nos vies privées.

Fallait-il que je creuse un peu plus pour savoir le pourquoi du comment ?

(En douceur, alors…)

Alors que je m’apprêtais à lui demander quelque chose, tandis qu’elle prenait de quoi boire, elle s’est tournée vers moi :

-Tu veux vraiment le savoir ?

J’ai été pris au dépourvu. Une question sérieuse, dont je redoutais un peu la réponse.

-Oui.

-Même si ça risque de changer notre relation ?

Nouvelle question sérieuse, nouvelle peur de la réponse…

-Oui…

-D’accord…

Elle se dirigeait vers un rayon pour acheter ce qui semblait être de petits appareils anti-moustiques.

-Est-ce que tu peux attendre ? me demanda-t-elle pendant qu’elle les mettait dans le panier.

-Pardon ?

-Je veux bien te le dire. Mais pas avec du monde autour de nous. Ce soir, quand Saeko et Yuna seront endormis.

-J’aime pas trop ce que tu me proposes, là…

-Il n’y a pas d’arrière-pensées, je te jure. Je te le dirais ce soir. Alors ?

Après ses précédents coups, je me méfiais. Mais d’un autre côté, ma curiosité était trop attisée pour faire marche-arrière. J’ai donc accepté, même si mes tripes me disaient que c’était une mauvaise idée…

Après un moment, nous avons vérifié que nous avions bien tout acheté.

-Attends, il manque quelque chose…

-Quoi ? Non, il y a t…

Mais elle ne m’écouta pas et fila vers… le rayon alcool !? Sérieusement !

-Kinoshita ! ai-je soufflé pour ne pas trop attirer l’attention. Qu’est-ce que tu fous !

Elle m’ignorait. Royalement.

-Kinoshita ! On est mineur ! On peut pas…

-Calme-toi, Nishiyama ! a-t-elle murmuré. Tu es trop sérieux ! On est en vacances et pas au Japon, alors détends-toi un peu.

(Kinoshita. L’âme la plus sérieuse que je connaisse, qui me dit que je le suis trop… J’aurai tout vue, ma parole…)

Ainsi, elle prit tranquillement un pack de cannettes de bières et une bouteille de vodka. Et pas une petite. Tout aussi tranquillement, elle est allée à la caisse pour payer. Moi, je n’étais pas tranquille avec le fait de me présenter à la caisse avec de l’alcool, alors que nous n’avions pas l’âge d’en acheter. Certes, j’avais fait quelques… disons… « bêtises » au collège mais pour ce genre de trucs, je n’étais jamais impliqué directement. La caissière qui scannait nos articles, la plus jeune de celles présentes, nous a jeté un drôle de regard mais n’a rien dit. Kinoshita était d’un calme incroyable, alors que moi, dans mon for intérieur, j’étais en stress, surtout avec l’agent de sécurité non loin. Finalement, nous avons payés sans encombre tout ce que nous avions pris. La caissière n’en avait clairement rien à faire, qu’on ait acheté de l’alcool alors que nous étions mineurs. Ce qui m’étonna quand même un peu.

En sortant du marché, et une fois à bonne distance, j’ai fait part de mon étonnement à Kinoshita, qui m’a expliqué calmement :

-Tu as l’air un peu plus vieux que moi, physiquement. Ils ont dû penser que l’alcool, c’était pour toi.

-… Je fais pas mes seize ans ?

-C’est peut-être ta taille qui fait ça…

(…C’est tout ?)

Nous sommes rentrés après ça.

Les deux autres avaient leurs affaires prêtes et étaient impatientes d’aller à la plage. Pendant que je rangeais les provisions, Kinoshita leur demanda :

-Vous avez bien mis vos maillots avant d’y aller, non ?

-Pourquoi ? demanda Yuna. On se changera dans les cabines.

-Il n’y a pas de cabines, là-bas. Du moins, pas quand j’y suis allé, les autres fois.

-Quoi ? Mais ils font comment, ceux qui vivent ici ?

-Ils ont déjà leurs maillots sous leurs vêtements. Ou ils se changent en se cachant sous une serviette…

-C’est une blague ?!

-Non.

La tête de Yuna et d’Aoyama en entendant cela… Ça n’avait pas de prix !

-Shûhei… Tu ne nous imagines pas en train de nous changer sous des serviettes, à la vue de tous, j’espère.

Je me suis figé d’un coup et l’image a commencée à se dessiner dans mon esprit… jusqu’à ce qu’Aoyama ne me lance son sac de plage en pleine tête pour arrêter le processus.

Une fois tout le monde prêt, nous sommes sortis pour aller prendre le tram, direction la fameuse plage du Havre. La température avait encore monté d’un cran ou deux. Je n’avais qu’une hâte : me rafraîchir un bon coup en piquant une tête dans la mer française.

Au terminus, nous sommes descendus et l’air iodée de la mer nous chatouillait déjà les narines. En tendant l’oreille, on entendait déjà la mer nous appeler. La plage n’était qu’à quelques pas devant et Yuna, trop impatiente, y a foncé sans nous attendre. Suivie de près par Aoyama, qui avait vraisemblablement aussi hâte.

-Des enfants…, ai-je commenté.

-Allons, laisse-les s’amuser, Papa…, me dit Kinoshita.

-Parce que tu te prends pour leur mère ?

Elle s’est contentée de me sourire et a commencé à marcher pour rejoindre les deux autres. J’ai soupiré et l’ai imité. Il n’y avait pas grand monde aux alentours et heureusement. Je n’aurais pas aimé qu’un type louche sur Yuna en train d’enlever ses vêtements… pour dévoiler bikini couvrait bien ce qu’il y avait à couvrir tout en laissant assez de place à l’imagination ! Quand nos regards se sont croisés, elle m’a fait un clin d’œil on ne peut plus charmeur et mon cœur a fait un gros « boum ».

(Je crois que je suis retombé amoureux…)

Là où le bikini de Yuna était coloré, celui d’Aoyama était noir d’encre mais me paraissait tout aussi sexy. Nos regards se sont croisés aussi et elle a un peu rougit. Malheureusement pour moi, Yuna m’a vu et elle a gonflé ses joues avant de venir me donner un coup de poing à l’épaule. Elle a exigé un câlin pour me faire pardonner, que je lui ai donné volontiers.

-Qui va rester surveiller les affaires ? demanda Kinoshita.

-Allez-y. J’irais me baigner ap...

Kinoshita, qui avait enlevé ses vêtements, nous montrait… un maillot de bain une pièce assez quelconque. Bon, les formes étaient présentes… bien rondes… pas trop grosses… agréables à…

-AÏE !

Yuna venait de me pincer !

-Arrête de baver sur Saya ou je me fâche !

-Mais je…

-Ce n’est pas bien, Nishiyama, a soupiré l’intéressée avant de prendre Yuna dans ses bras. Pour la peine, je te la confisque.

Yuna semblait gênée que Kinoshita colle son corps contre le sien, mais ce n’était rien comparé à la tête d’Aoyama, qui semblait un peu énervée.

Très vite, les filles sont allées se baigner pendant que j’enlevais mon t-shirt (vive celui qui a invité le short de bain) et m’asseyais en les regardant. Elles s’amusaient à s’éclabousser comme de petits enfants puis Aoyama voulut les couler l’une après l’autre, avant d’être à son tour prise pour cible. J’étais content de voir Yuna s’amuser comme ça, en vrai. Cela faisait ressortir son côté mignon, bien que je n’avais pas du tout l’intention de lui dire. Mais celle qui semblait le plus s’amuser à ce jeu, c’était Kinoshita. Depuis que je la connaissais, je ne l’avais jamais vu si… expressive. La voir sourire ; rire comme ça, elle ne l’avait jamais fait au Japon. Même lorsqu’elle était avec ses amies, Aoyama comprise, je n’avais pas le souvenir d’avoir vu autre chose sur son visage qu’une forme de stoïcisme. La voir comme ça, mon cœur faisait de petits « boums ». Et ce n’était pas vraiment une bonne chose…

Après une vingtaine de minutes, Kinoshita et moi avons permutés. Cela faisait du bien de nager dans une eau bien fraîche et j’en aurais davantage profité, si Yuna n’avait pas tenté de me couler ! Mais bon, je me suis vengé en lui rendant la pareille mais cette fourbe s’est alors alliée à Aoyama et elles s’y sont mise à deux contre moi. Un jeu de gamins mais bon, je me suis amusé aussi. Un peu.

Petite digression. Si je ne l’avais pas touché, je n’aurais jamais imaginé que la peau d’Aoyama était si douce… Et qu’elle pouvait pousser des cris aigues et mignons quand on l’attrapait par surprise.

On a enchaîné ainsi les permutations une bonne partie de l’après-midi. Avant de partir, les filles ont expérimentés le fait d’enfiler des vêtements secs sous une serviette. Et étant un mec, j’ai été tenue éloigné des opérations, en leur tournant le dos.

-Mais si quelqu’un me voyait…, fit Aoyama avec un ton inquiet.

-On fait écran. Ne t’inquiète pas, lui assura Kinoshita.

-AAAAAAH ! Ma culotte s’est envolée !

-Shûhei ! Je t’interdis de te retourner ! me cria Yuna.

(C’est malin ! Tu me donnes envie de me retourner, maintenant !)

Au final, c’était un bon moment à la plage…

Le soir, après un bon dîner et après que Yuna et Aoyama soient parties se coucher tôt, fatiguée de leur journée en partie à cause de la chaleur, j’ai retrouvé Kinoshita, vêtue d’un short et d’un débardeur pour faire office de pyjama, dans le salon… une cannette de bière à la main. J’aurais pu m’indigner et tout ça, mais je me doutais bien que si elle avait acheté de l’alcool, ce n’était pas pour fixer les canettes. Elle avait un peu les joues rouges mais ne semblait pas ivre. En me voyant, elle m’a souri.

-Tu en veux une ?

Elle a alors désigné la cannette supplémentaire posé sur la table basse.

(Bah… Pourquoi pas, après tout.)

J’ai pris la cannette, l’ai ouverte et me suis assis à côté d’elle pour boire. J’avais oublié le goût particulier d’une bière bien fraîche…

-Première bière ? demanda Kinoshita en rigolant légèrement.

-Non. Mais ça faisait longtemps…

Elle était un peu surprise et son expression m’offrait une grande satisfaction, donnant un goût particulier à ma bière. D’ailleurs, si mes souvenirs étaient bons, la dernière que j’avais bu datait du collège, quand je faisais n’importe quoi.

-Tu arrives encore à me surprendre, Nishiyama. Je suis impressionnée.

-Tu vas te décider à me le dire, alors ?

Je ne voulais pas faire traîner ça davantage. Mon regard en disait long : elle allait me donner des explications claires, qu’elle le veuille ou non.

Avant de me répondre, elle a pris une nouvelle gorgée de bière.

-Nishiyama, comment réagirais-tu si je te disais que je ne suis jamais tombée profondément amoureuse d’un garçon ?

J’étais… un peu surpris.

-Vraiment ? Tu n’as jamais été amoureuse ?

-Je n’ai pas dit ça…

Elle a repris une gorgée.

-J’ai dit que je ne suis jamais tombée profondément amoureuse d’un garçon…, répéta-t-elle.

Silence.

-Je vois…, ai-je dit.

Elle a ri légèrement et a poursuivi :

-J’ai eu de légers coups de cœurs mais ils étaient éphémères. Mais… avec les filles, c’était tout l’inverse.

Silence, de nouveau.

-Quand j’aimais une fille, c’était toujours sincère. Mais cela me faisait mal aussi. L’autre voulait se cacher. Pas moi.

Elle prit une nouvelle mais plus longue gorgée.

-Je ne leur en veux pas… Faire son coming-out, ce n’est jamais simple. Encore plus au Japon.

Elle a arrêté de parler. Je n’ai rien dit. Je me doutais bien qu’elle guettait ma réaction. D’autres n’auraient pas su quoi dire ou faire, par gêne, mais moi, je choisissais de rester calme et de l’écouter jusqu’au bout.

Elle s’est mise à rire, pour briser le silence.

-Tu es vraiment plein de surprises, Nishiyama. Je crois que c’est ça qui me plaît chez toi.

-Ça n’explique pas pourquoi tu as fait ce que tu as fait, ces fois-là…, ai-je dit.

-Si.

Je l’ai regardé, dubitatif. D’une traite, elle a bu ce qui lui restait de bière.

-Nishiyama… Est-ce que tu as compris ce que j’essaye de te dire depuis tout à l’heure ?

Je n’étais pas sûr…

-Kinoshita… Est-ce que tu es… lesbienne ?

Elle sourit.

-Pas… exactement.

Elle se tourna vers moi puis m’avoua :

-J’aime les filles ET les garçons. Bien que j’aie une préférence pour les filles.

(Ok… C’est surprenant. Et je commence à voir où elle veut en venir…)

Je ne savais pas si c’était à cause de l’ambiance ou de l’alcool, mais elle s’était lentement approchée de moi. Doucement, ses lèvres se sont posées sur les miennes et je… l’ai laissé faire. Je… ne voulais pas la laisser aller plus loin mais je n’arrivais pas à la repousser non plus. Après avoir rompu ce baiser, elle m’a regardé et m’a avoué ceci :

-Nishiyama… Tu es le premier garçon que je trouve vraiment attirant. Pas pour ton physique mais pour ton esprit éclairé et plus ouvert que les autres.

Elle était là, à me fixait sérieusement. Puis, ces mots sortirent de sa bouche :

-Nishiyama, je suis amoureuse de toi.

Puis… elle baissa les yeux, comme honteuse de ce qu’elle me dit ensuite :

-Et… je crois que je suis attirée par Yuna.

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