Basawena, le jeune crocodile

3 minutes de lecture

La poule Kuh, assoiffée, descendit un jour au bord de la rivière. Le jeune crocodile Basawena gourmand, salive entre les dents, regardait sa future proie avancer gentiment. Tout près de la rive, il ouvrit sa gueule devant la volaille, qui, prise de panique, caqueta :

— Frère, mon frère croco, ne me mange pas !

Bloqué dans son élan, le jeune crocodile Basawena réfléchit.

— Pourquoi ma mère ne m'a jamais dit que j'avais une sœur poule ? Le jeune crocodile Basawena s'en alla, refusant d'avaler un membre de sa famille.

Le lendemain matin, il surveillait la rive, certain que la poule Kuh avait rusé la veille pour échapper à la menace qu'il représentait. La poule Kuh descendit boire, vit le croco, cria de même :
— Frère, mon frère croco, ne me mange pas !

Et le crocodile Basawena interloqué par la sincérité s’en retourna en maudissant la poule Kuh de ne pas lui remplir le ventre. La nuit fut difficile. Il demanda à son père la vérité.

— Comment peux-tu donc être le frère de cette poule ? Tu vis dans l'eau, elle sur la terre. Son bec est pointu, le tien serti de dents. À moins que ta mère n'ait vu le coq, je suis certain de n'avoir pas plus de plumes sur les pattes que de poignées sur le dos. Cette poule Kuh te conduit en bateau. Mange-la !

Le lendemain matin, Basawena attendit sans se cacher sur la rive, certain que la poule Kuh viendrait boire l'eau du fleuve. La poule se présenta en se dandinant le croupion. Lorsque le crocodile Basawena la serra entre ses dents, elle cria plus convaincante encore :
— Frère, mon frère croco, ne me mange pas !

Une parole du père du jeune crocodile Basawena restait dans sa tête :

À moins que ta mère n'ait vu le coq...

Il décida d'aller à la rencontre de son ami Ngubi le serpent afin de l'interroger et d'élucider une fois pour toutes la question de sa filiation avec les galinacées.

Le jeune crocodile Basawena se mit en route. Il marcha deux jours, marcha deux nuits dans le sable, entre les herbes sèches. Quand il rencontra enfin son ami Ngubi le serpent.

— Hé ! Bonjour ! C'est comment ?
— Ça va un peu.
— Et l'autre peu ?
— L'autre peu est dans la main de Dieu.
— Et la famille ? demanda le jeune crocodile Basawena.
— Ça va aller. Mon frère Nguba est malade. C'est le ventre. Mais il supporte, il est le seul qui peut travailler à courir les champs ! Son fils Nguba-Nguba, qui connaît si bien écouter, est parti chercher le travail en ville comme psychiatre.

— Grand bien leur fasse, lui dit le jeune crocodile Basawena. Je suis très ennuyé serpent Ngubi mon ami. Tous les jours, la poule Kuh vient au fleuve pour se désaltérer. Tous les jours, quand je désire la manger, elle m'appelle son frère. Je me suis dit que je ne pouvais pas rester ainsi sans connaître la vérité sur ma famille. Je décidais de te trouver toi mon ami Ngubi, pour tenir une palabre avec toi.

— Oh jeune crocodile Basawena ! Tu n’es qu’un sot, répondit Ngubi le serpent. Tu ne dois rien faire de tout cela, car autrement, tu perdrais tes paroles et tu montrerais que tu es un ignorant. Ne sais-tu pas, jeune crocodile Basawena, que les oies vivent dans l'eau et pondent des œufs. Ne sais-tu pas, jeune crocodile Basawena que les canards vivent dans l'eau et pondent des œufs. Ne sais-tu pas, jeune crocodile Basawena que les tortues en font de même. Ne sais-tu pas, jeune crocodile Basawena que nous aussi, d'ailleurs, pondons des œufs, tout comme les poules. Et toi, mon stupide ami Basawena , d'où viens-tu donc sinon d'un œuf ? Nous sommes donc tous frères dans un certain sens. C'est pour cette raison que les crocodiles ne mangent pas les poules.

— Bien grand merci, Ngubi mon ami ! Bon, on est ensemble ?
— Oui, on est ensemble. Ça ira déjà.

***

Le jeune crocodile Basawena pleurait dans la savane.

— Je me suis perdu !

Toualou qui se cachait par là, nu, écouta la plainte du saurien.

— Porte-moi jusqu'à la rivière. Le feu de mes pattes risque de brûler l'herbe sèche.

— Ça, je le peux.

Le grand berger Toualou chargea le crocodile Basawena sur son dos. Ils se dirigèrent vers le grand fleuve. Toualou se conforta dans des explications tordues à donner aux femmes. Basawena reprit des forces.

Arrivé au bord de l'eau, Toualou lâcha le crocodile.

— Tu n'es pas mon frère toi au moins ?

— Non j'ai le sang chaud rigola Toualou.

Rassuré Basawena dévora Toualou tout cru.

Agapatou en femme attentive qui passait par ici s'approcha sans crainte du saurien. Elle lui ouvrit le ventre, récupéra Toualou en mille morceaux. Bonne couturière elle raccommoda son mauvais compagnon, néanmoins mari, en utilisant de la peau du reptile.

— Comment te sens-tu ? demande-t-elle en versant une larme.

— Un peu faible et j'ai faim, lui dit-il.

— Prend un peu de ma boule et partons retrouver mon père. Le crocodile lui servira de tapis, la viande de repas.



Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire bertrand môgendre ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0