Cold Blood

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Attention : vocabulaire cru

Des coups retentissent à ma porte. Je me redresse brusquement et tends l'oreille. Après quelques secondes, j'empoigne tous mes vêtements pendus dans mon armoire, arrache brusquement les cintres et les fous pêle-mêle dans le gros sac sur mon lit. Je fais de même avec les tiroirs où se trouvent mes sous-vêtements et mes placards.

Les coups reviennent, plus violent cette fois-ci.

— Police, ouvrez !

J'écarquille les yeux. Putain, fais chier. Comment ça se fait qu'ils sont déjà là ? J'ai pourtant pris grand soin de les envoyer sur une fausse piste. Ça aurait dû leur prendre ds mois avant qu'ils se rendent compte de la supercherie.

— Maître Vanderg, nous savons que vous êtes là. Ouvrez cette porte !

J'ai plus le choix. Dans un grognement sourd, j'enfouis mon sac sous mon lit et me précipite hors de ma chambre. Je passe les mains dans mes cheveux dans une tentative vaine de les discipliner et réajuste mon col de chemise. Je me fous quelques claques pour me réveiller et me compose un sourire faux sur le visage. Tu vas y arriver, Mark, t'es avocat, tu sais feinter. Ma main s'abat sur la poignée de la porte d'entrée.

— Capitaine Grandin, que me vaut le plaisir de votre visite ?

Ledit Grandin me bouscule pour entrer. À sa suite, une poignée de flics pénètre chez moi. Merde. Je pensais pas qu'ils avaient autant de doutes. Jouer le veuf effondré.

Vous avez des nouvelles de l'enquête ? Vous savez qui a tué Édouard ?

Ma voix a pile le trémolo qu'il faut. Les années passées à plaider m'aident beaucoup. Grandin me jette un regard suspicieux.

— Fouiller les lieux.

Je fronce les sourcils. Ils se prennent pour qui ?

— Avez-vous une commission rogatoire signée par un juge d'instruction ?

J'ai de grandes chances que non. Il n'y a pas beaucoup de juges qui prendraient le risque d'ordonner une perquisition chez un avocat. Encore plus contre quelqu'un comme moi. Le capitaine me jette un regard triomphant en tendant un papier.

— Je savais que vous alliez me demander. J'ai anticipé vos désirs.

Ce fumier de Johnsson. J'aurais dû m'en douter, il n'y a que lui qui ait les couilles de le faire. D'un coup d'œil, je peux voir qu'elle est en règle.

Capitaine ! retentit une voix derrière moi.

Un flic vient de mettre la main sur mon sac et le tend fièrement à Grandin.

— Vous pouvez m'expliquer ?

— Je n'ai pas le droit de prendre des vacances ? Lui demandé-je innocemment en souriant.

— Quand on n'a pas le droit de quitter la ville, non.

— Ais-je dit que je partais en dehors de celle-ci ?

Le visage de ce bon à rien de Grandin devient rouge, signe qu'il commence à s'agacer. Tant mieux, il sera plus amène de faire une faute et quand ce sera le cas, je ne le louperais pas, ce gros porc. Je tente de le pousser un peu plus :

Pourquoi vous en prenez-vous à un innocent plutôt que de chercher celui qui a tué mon mari ? Il doit sûrement se pavaner librement en pleine ville, riant au nez de vos hommes.

Grandin me fusille du regard. Il me rappelle celui que j'ai dû jeter à Édouard quand je l'ai retrouvé au pieu avec un autre. C'est dingue comment une balle entre les yeux peut changer un regard.

— Si vous êtes si innocent que ça, vous vous prêterez bien à un petit test sanguin de rien du tout ?

Comme si elle n'attendait que ça pour arriver, une bonne femme en blouse blanche s'approche de nous. Je reconnais le boîtier qu'elle a entre ses mains. Putain, je suis clairement dans la merde, là.

— Vous avez un...

— Tenez, me coupe Grandin en brandissant un second papier.

Putain de putain de putain. Je suis fait comme un rat. Je commence à transpirer et je me vois derrière des barreaux. C'est impossible, je ne peux pas y aller. Même si j'ai le bras long et que j'ai des contacts dans la pègre locale qui m'assurera sa protection, je ne peux pas me retrouver en prison. Ma carrière sera anéantie. Tout ça à cause de cet enculé d'Édouard. J'aurais dû le jeter comme la merde qu'il était après avoir baisé son petit cul. Quelle idée de s'être marier !

— Asseyez-vous, me demande la femme.

J'ai envie de lui faire ravaler son ton supérieur à cette connasse. Mais je ne peux rien faire. Elle remonte ma manche et quelques secondes plus tard, une petite aiguille me transperce le bras. Tandis que la vieille peau place la petite fiole dans le boîtier et attend le résultat, Grandin me surveille et je peux presque sentir son égo grossir autour de lui. Comme s'il ne l'était pas assez. Gros. Il sait qu'il m'a cueilli le meurtrier.

— Capitaine... s'exclame la femme.

Mon cœur bat plus vite quand j'aperçois son regard perdu. Elle tend le boîtier à Grandin. Je suis témoin en direct de son visage qui se décompose et du sang le quittant. Ses yeux passent du boîtier à moi, de moi au boîtier, complètement abasourdi. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, mais je sens que c'est bon signe pour moi.

— L'analyse... de votre sang in... indique qu'il ne contient pas n'y a pas de présence... , bredouille Grandin, livide.

— De ? le pressé-je.

— …. de MSMH*. Je suis... désolé nous nous sommes trompés, vous êtes innocent.

Mes douze ans de métier passés à ne rien laisser montrer de mes émotions sont tout juste assez pour masquer ma stupéfaction. À la place, je me façonne un sourire automatique que je sais fabriquer maintenant à la perfection.

— Je vous l'avez dit. Vous vous trompés de cible.

Je me lève de ma chaise et je rabats tranquillement la manche de ma chemise.

— Je suis vraiment navré, Maître mais vous comprenez que je devais bien...

— Non, je ne comprend pas, Grandin, asséné-je d'une voix glaçante.

Le gros capitaine se recroqueville comme une huître. Il sait qu'il vient de faire une énorme bourde de s'en prendre à un personnage comme moi sans assez de preuve. Il pensait que le testeur de sang serait suffisant pour me faire tomber. Et pour sa défense, cela aurait dû suffire. Depuis qu'il a été inventé, je n'ai jamais vu quelqu'un tromper le testeur. Même si je ne le montre pas, je suis sous le choc. Il y aurait une faille ? Ou est-ce moi qui suis...

Un sourire machiavélique se dessine sur mes lèvres. Je jubile intérieurement. Je comprends que je suis dorénavant tout puissant. Leur arme infaillible ne marche pas sur moi.

— Écoutez-moi bien, capitaine Grandin, susurré-je en me rapprochant de lui. Vous venez de faire une grossière erreur et croyez-moi, je ne la laisserais pas passer. Vous vous en êtes pris à la mauvaise personne. Votre carrière est terminée.

Grandin baisse les yeux, pitoyable. Il sait que j'ai le pouvoir de le détruire, comme tout le monde dans cette ville. Et maintenant, je ne vais plus me gêner.

* Mutation de Sang Meurtrier Humain. Ou quelque cbose comme ça, ça sonnait mieux dans ma tête.

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