Death

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Les sons étouffés me parviennent avant même que je puisse ouvrir les yeux. Bien qu'une brume épaisse asphyxie encore mon cerveau, j'entends un bruit incessant et redondant vriller mes tympans. Je ne sais comment, mais je reconnais le bruit caractéristique des machines médicales.

La brume se resserre autour de mon crâne comme si elle voulait l'étouffer. Je gémis, lutte contre cette force mystérieuse qui semble ne pas vouloir que je me réveille. Dans ma tête, une voix retentit, suppliante :

Non, Adam, reste endormi, ne te réveille pas, je t'en conjure.

La brume renforce son emprise sur moi, m'asphyxiant presque. Je me débats, crie, et me secoue.

— Lâche-moi... Lâche-moi !

Je sens la brume perdre du terrain. Je la sens reculer, se recroqueviller sur elle-même. Je suis en train de gagner. Dans un dernier souffle, je la traverse.

Très bien, tu l'auras voulu.

J'ouvre les yeux. Enfin, je crois. Je ne vois rien, à part le néant. Au prix d'un immense effort, je tourne ma tête. J'aperçois alors un rai de lumière qui transperce l'obscurité, me permettant de distinguer les contours de la pièce dans laquelle je suis. Murs blancs, carrelage blanc, meubles crème, odeurs de mort et de médicaments... Je suis à l'hôpital. Ces mots me font l'effet d'un coup de poignard en plein cœur et entraînent avec eux, une déferlante de souvenir. Ma moto, mon accident, les voix de mes rêves, tout me revient.

La brume a libéré mon crâne, mais je sais qu'elle se tapit dans un recoin de ma tête. Elle semble... apeurée ?

Je décide de ne pas m'y attarder et profite de ma nouvelle clairvoyance pour prendre conscience de mon état. Je me sens... bien. Je me rends compte alors du bruit affolé des machines à côté de moi. J'avise les aiguilles qui transpercent ma peau et les arrache d'un coup sec. Je me relève alors sur mon lit. Aucun mal de tête à déclarer. Je lève mon bras. Il a l'air de fonctionner, plus ou moins. Je rabats la couverture et dans un gémissement, je m'assois, les jambes pendantes dans le vide. Je prends une grande inspiration et me laisse glisser. Les pieds touchent le carrelage froid et je me retiens au bord de mon lit. Parfait, mes jambes semblent supporter mon poids. Pas à pas, je me dirige prudemment vers la porte de ma chambre. J'abaisse la poignée et l'ouvre.

Pourquoi le couloir n'est pas éclairé ? Où sont passés les médecins, infirmiers et aide-soignants ? Pourquoi personne n'est arrivé quand je me suis réveillé ?

Dans mon crâne, la brume gémit :

Je t'en prie, n'y va pas. Reste ici.

Je refuse de l'écouter et m'engage dans le couloir. Au loin, j'aperçois de la lumière. J'accélère le pas, hâte de retrouver le contact humain. Je ne sais pas depuis quand j'ai été dans le coma. Mais ce que je sais, c'est que je veux retrouver mes parents et mon petit frère. Je veux sentir à nouveau la chaleur, la douceur et la protection que leurs bras enlacés autour de moi me conféreront.

J'entends des bruits étranges, comme des... déglutitions, mais je décide de ne pas y faire attention. La brume crie, me vrillant le crâne pour m'empêcher d'avancer.

Adam, reviens, s'il te plaît !

J'y suis presque, encore quelques mètres. Ça y est, je suis dans le tournant. La lumière électrique m'inonde.

Je reste figé de terreur. Mon cerveau refuse de croire ce que mes yeux voient. Elle se retourne. Elle a dû sentir ma présence. Je suis tétanisé, incapable de ne serait-ce que faire un pas en arrière pour fuir. Elle me fixe de ses yeux globuleux. Elle secoue son membre supérieur, faisant tomber un cadavre en blouse blanche qui y est empalé. Sa mâchoire s'ouvre en grand, avant de se refermer dans un claquement sec, faisant tomber des gouttes d'un liquide rougeâtre sur le carrelage immaculé.

Je trouve enfin la force de hurler d'effroi. Elle se jette sur moi. Le monde vacille, le néant revient.

Tu es en sécurité, maintenant Adam. Reste avec moi, tu ne crains plus rien.

Je laisse la brume m'envelopper et je l'accueille avec un immense soulagement.

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