Les jeux vidéos compétitifs : la nouvelle drogue du 21e siècle ?

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Chers amis, nous abordons aujourd'hui un sujet qui me tient particulièrement à coeur : les jeux vidéos. Mais pas n'importe lesquels...

Fortnite, Apex Legends, League of Legends, Overwatch, ... sont tous des jeux vidéos compétitifs ayant fixés la nouvelle tendance terme de gaming : la compétition. Le principe est simple, vous obtenez une copie d'un de ces jeux, vous l'installez sur votre PC, et c'est parti. Un plongeon dans l'addiction et l'agonie permanante.

Les règles du jeu mortel sont simples : combattez en solo ou accompagnés et remportez la victoire pour augmenter votre palmarès et/ou votre côte qui définit votre classement sur la monumentale échelle du monde (ou du continent...). A priori, rien de bien méchant ! Un nouveau type de jeux vidéos qui vient supplanter les MMORPG ( jeux de rôles en ligne) pour se faire un nid confortable parmi ses pairs. Un "vent de fraîcheur" diront les joueurs passionnés du genre. Un réveil de l'esprit de compétition, une autre dimension à l'univers vidéo-ludique, que demander de plus ? Tout cela semble en apparence fort joli et sympathique ou, pour ceux qui n'ont pas l'habitude de toucher une manette, une mode comme une autre sans grande importance. Discussions dans les cours de récrés entre potes, échanges en anglais entre joueurs de tous horizons, soirées détentes avec les copains à taper du noob (mauvais joueurs)... Et si je vous disais que ce qu'on appel encore aujourd'hui un "jeu vidéo" est en réalité une des drogues les plus puissantes que l'humanité ait connu ?

Certains sont surement déjà en train de tirer la sonnette d'alarme tandis que d'autres restent sceptiques face à ma thèse, mais laissez-moi plutôt expliciter ! Je vais commencer par donner la définition de la compétition trouvable dans le Larousse : " Compétition : action de chercher à obtenir en même temps que d'autres le même titre, la même charge ou dignité, la même fonction, etc. ". Aucun doute, le terme compétition attrait parfaitement à la nouvelle mode que sont les jeux compétitifs, les deux idées pouvant quasiment se surperposer. Cependant, il subsite une différence fondamentale, et c'est dans l'essence même de chaque mot qu'on peut la déceler. La compétition (et ses dérivés) ont pour but de forger l'esprit, le mental et de pimenter l'existence. Bien plus loin, on peut dire que l'être humain est modelé à travers le compétition qui le pousse à dépasser ses limites. C'est un concept qui fait appel à énormément d'aspects positifs de l'Homme, et procure des effets tout à fait bénéfiques pour le développement personnel.

Dans le cas des jeux vidéos compétitifs, le fond est tout autre. Sous ses airs innocents, le match est en réalité une drogue infiniment complexe et parfaitement indétectable à court terme. En effet, quand le sportif du monde réel dispute un match, il va se développer socialement et s'ouvrir aux autres, que ce soit volontaire ou non. Dans le cas du joueur e-sport ( e-sport étant le terme qui définit le "sport" en ligne), c'est l'opposé qui se produit. Malgré l'usage d'un tchat, d'un microphone qui permet la communication ou bien l'interaction d'un vidéaste avec son public qui l'observe en direct, la personne derrière son écran à une tendance maléfique à s'isoler mentalement et psychologiquement. A son bureau, il ne voit pas le jeu de groupe tel un match de football, son champ de vision est restreint à son personnage. Cette limite empêche le joueur de se rendre compte de ce qui se passe autour de lui et amène généralement à un état d'esprit plutôt sec et tranchant. C'est à dire que lors d'une défaite, il pensera la plupart du temps que son équipe n'était pas assez forte ou bien qu'ils ont fait exprès de perdre. Cette conception minimaliste de la situation va très généralement donner lieu à des remarques à caractères racistes, discriminatoires et autres horreurs qui ont pour but de blesser l'autre. Il y a bien évidemment des mauvais perdants dans les sports du monde réel également, mais la portée et la gravité des actes est significativement moindre que ceux d'un jeu compétitif. Si je m'arrêtais là vous pourriez me dire que je m'alarme pour rien et que ce n'est bien évidemment qu'une conséquence d'internet, le fait d'être caché derrière un écran et de se sentir invincible. Vous auriez parfaitement raison de penser cela, puisqu'effectivement à première vue l'on pourrait estimer que ça ne s'arrête qu'à un fort sentiment d'impunité. Bien entendu si le problème s'arrêtait à ça, j'aurais vite fait de le classer dans la même catégorie que les insultes sur les réseaux sociaux... Mais ce que j'ai encore à vous annoncer est plus effroyable encore.

Plongeons un peu plus au coeur de l'atmosphère malsaine. Lors d'une défaite sur un jeu de ce type, le joueur ressent une certaine frustration qui va grandir avec le temps et le nombre de parties jouées sur un certain labs de temps. Certaines personnes achevant jusqu'à 30 match par jour, il est facile de deviner dans quel état mental elle se retrouve si elle a perdu 25 des 30 confrontations. On pourrait mettre en face de cela la légendaire réplique "il y a des jours avec et d'autres sans", mais nous allons voir que cette phrase n'a que peu d'importance dans la vie du joueur. En effet, un détail particulièrement bien caché est que à chaque partie jouée (victoire ou défaite), des hormones sont stimulées provocant à tour de rôle la joie, la colère, la frustration, le mépris ( parfois des larmes...) et autres émotions propres à chacun. Chaque émotion ainsi que le passage d'une à l'autre est un réalité une dose dangereuse d'addiction injectée dans le corps. Comme nous le savons, un être humain ne peut ressentir de la joie que quand il a ressenti de la peine, de telle sorte à ce que deux émotions soient totalement antagonistes l'une de l'autre. L'addiction transcende donc le sentiment de frustration qui d'une manière logique pousserait la personne à quitter la partie ou la pièce pour revenir le lendemain en meilleur état d'esprit. Le fait est que dans la plupart des cas, le joueur abandonne son siège pour quelques minutes avant de relancer le jeu et de se lancer dans un nouveau match. La période de sevrage est donc relativement courte, et la durée d'exposition à l'addiction très étendue sur une journée.

L'enchainement de parties prend donc place et amène avec lui deux conséquences majeures dévastatrices : la première étant le bouleversement du système émotionnel, la deuxième un enfermement sur soi-même. Au sein de l'esprit de la personne, plus rien n'a de sens lorsqu'elle joue. Une insulte sera considérée comme une vérité absolue et indétrônable, le harcèlement un outil de domination et la provocation un bien nécessaire à la victoire. Un tiers passera facilement de la peine due à une insulte à son encontre, à l'euphorie produite par un mouvement de jeu bien réalisé, à la haine absolue parce qu'on coéquipier a raté telle ou telle action. Une immersion totale dans la folie passagère mais récurante. Cet état émotionnel n'est pas limité qu'aux jeux vidéos puisqu'il peut prendre une part plus ou moins grande dans la vie de la personne, jusqu'à détruire ses relations dans les cas les plus extrêmes. Que ce soit par les réactions de l'entourage ou des utilisateurs d'un jeu, la personne se sent blessée au plus profond d'elle-même et va commencer à se construire une carapace, un monde propre à elle. Ses pensées ne tourneront plus qu'autour du jeu en question, laissant peu de répit à son bien-être. Nous soulignerons le fait qu'il n'y a pas que dans le cas des jeux compétitifs que les comportements associaux naissent et ressortent, mais dans d'autres catégories de jeux aussi, la fréquence étant tout de même supérieure dans les jeux compétitifs.

Comme vous l'aurez compris, jouer c'est observer la montée en puissance de sa propre machine infernale. Bien au delà des parties disputées, la machine s'alimente de choses beaucoup plus larges. Les rêves, l'égo, la fierté, la négativité, la recherche du bonheur et de l'adrénaline, le sentiment de domination, ... Tout est bon pour faire tourner le moulin. Terminons enfin par le couperet, le glas de l'humanité, ce qui constitue l'amplificateur des effets de cette drogue que sont les jeux vidéos compétitifs : la comparaison. Qui dit compétition dit statistiques, et qui dit statistiques dit comparaisons. Durant son parcours pour le haut du panier, le joueur sera torturé et ses entrailles viciées par une envie de gagner et d'atteindre la plus haut niveau. On lui fera miroiter monts et merveilles en lui montrant des joueurs professionnels qui étalent leur savoir et leur génie suprême, laissant à la moyenne le culte d'un tiers et l'appropriation mentale des exploits de ce dernier pour tenter de les reproduire ... Se dresseront aussi ceux qui profitent de la faiblesse des gens dans un désir sadique de s'enrichir en proposant des solutions dites "miracles" pour que tous puissent mener cette vie de rêve à haut niveau. La règle fondamentale, plus que ça, la loi primordiale du jeu vidéo, c'est de prendre du plaisir. Le plaisir fait naître le génie, le génie fait donne vie aux exploits. Dans une trame diabolique, le joueur est coincé et ne rencontre plus que très rarement du plaisir. Cette absence de plaisir fini de détruire quiconque n'a pas eu la bonne fortune de se retrouver parmi les meilleurs, ou n'importe quelle pauvre âme qui se sera perdue dans sa passion désormais évanouie.

Enfin, les concepteurs. Eux qui agissent sans trop savoir s'ils jouent avec la vie des gens ou bien s'ils ne restent que dans la limite du profit lié à un travail d'entreprise. Savent-ils à quel point ce qu'ils font est néfaste ?

Les jeux compétitifs représentent, selon moi et pour toutes ces raisons, la drogue la plus dangereuse à long terme d'une 21e siècle. Car cette drogue ne fait pas que détruire physiquement ou mentalement, elle brise la personne et la torture sur la longueur sans qu'une aide suffisante à ce jour puisse être apportée. Les victimes sont nombreuses : Des jeunes adolescents infiniment vulnérables jusqu'a l'adulte de 35 ans aguerri qui souffre pourtant lui aussi de la pandémie que subissent nos contemporains. Nous faisons face à une mode dangereuse qui, je l'espère, n'aura qu'un temps très limité de vie et des effets réversibles.

LeFauxCerf

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