Chapitre 13 - La Fin

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Quand elle ouvrit les yeux, Hope se sentait pâteuse. Elle cligna lentement des paupières, s’accoutumant doucement à la luminosité ambiante. Tout était si clair, si brillant… ça n’avait rien à voir avec l’ambiance sombre et tamisée du manoir qu’elle connaissait.

Quelques battements de paupières plus tard, Hope put enfin voir le monde autour d’elle. Elle remarqua d’abord le plafond et ses néons d’un blanc terne, puis les murs et le mobilier dans des tons bleu pâle. Puis un homme, assit tout près d’elle. Amaigrit, les yeux cernés et étrangement pâle, il se trouvait là, endormi dans un fauteuil à l’air peu confortable. Hope le reconnut tout de suite…

Son père.

Il semblait avoir vieillit d’un coup. Ses cheveux étaient plus grisonnants, son visage plus ridé. Il avait l’air de ne pas avoir dormi depuis des lustres.

En le voyant, une foule de souvenir défila devant les yeux de la jeune fille et une bouffée de soulagement l’envahi, lui piquant les yeux. Incapable de se retenir, elle se mit à pleurer, sanglotant et tremblant dans son lit d’hôpital. En l’entendant, son père se réveilla brusquement et bondit presque de sa chaise.

– Hope ? Tu es réveillée… sanglota-t-il en prenant la main de sa fille. Dieu merci tu es réveillée… J’ai eu si peur, ma chérie…

– Papa…

Sa voix était étrangement rauque et sa gorge lui faisait soudain très mal. Son père la regarda, inquiet. Il tremblait. L’homme se mit à pleurer à chaude larme avec sa fille, lui caressant les cheveux, embrassant ses joues et son front, bien trop heureux de la savoir vivante.

– Chut… tout va bien ma fille, tout va bien. Tu as eu un accident… tu es à l’hôpital, tout va bien. J-je vais appeler un médecin.

Hope avala difficilement sa salive. Alors qu’il se redressait pour courir vers la porte, elle réussit, non sans mal, à lever le bras pour attraper sa manche. Son père se retourna, surprit. Les lèvres de Hope tremblèrent quand elle lui demanda :

– Reste… je t’en prie… ne pars pas…

– Je reste, dit précipitamment son père en retournant à ses côtés. Tu vois ? Je ne vais nulle part. Laisse-moi juste…

Il fouilla dans les câbles tout près du lit de sa fille et trouva enfin un petit boitier blanc à l’unique bouton coloré.

– Le voilà, dit-il en le ramenant vers lui avant d’appuyer dessus. Tu vois ? Je ne vais nulle part, continua-t-il en serrant la main de Hope dans les siennes. Le médecin va arriver, tout va bien…

– Merci, papa… soupira Hope en fermant les yeux.

Après quelques minutes, des infirmières arrivèrent avec un homme en blouse blanche. L’adolescente, épuisée, se força à rester éveillée, alors que les aides-soignants l’aidaient à se redresser dans son lit.

On lui expliqua qu’elle avait frôlé la mort, un accident terrible dont elle et sa meilleure amie Katie étaient ressortie à peine conscientes. Mais alors que son amie luttait contre la douleur, Hope, elle, avait sombré dans le coma. Pendant des semaines, son père la veilla, dormant presque à l’hôpital, oubliant quasiment de manger. Il n’avait pensé qu’à une chose : voir sa fille ouvrir les yeux et être à ses côtés à ce moment-là.

Le médecin expliqua qu’elle avait eu de la chance. Un traumatisme crânien et quelques côtes cassées. Mais elle avait survécu, elle était vivante. Le conducteur de l’autre véhicule, en revanche, n’avait pas eu cette chance. Mort sur le coup, il n’eut même pas le temps de voir la couleur du ciel avant de s’éteindre.

Hope ne le plaignit pas. À cause de lui elles avaient failli mourir.

Katie arriva quelques temps plus tard, assise dans un fauteuil roulant, un grand sourire aux lèvres. Elle avait un bras dans le plâtre et une minerve autour du cou, mais semblait toujours aussi en forme que dans son souvenir.

Pourtant, et malgré le fait qu’elle ait enfin retrouvé ceux qu’elle aimait, Hope ne pouvait s’empêcher de se sentir ailleurs. Vivante, mais ailleurs. Comme si quelque chose lui manquait sans qu’elle ne sache de quoi il s’agissait. Et, le temps passant, Hope n’arrivait toujours pas à mettre la main dessus. Elle avait la désagréable impression que la vérité lui glissait entre les doigts.

Hope resta quelques jours à l’hôpital avant d’avoir la possibilité de rentrer chez elle avec son père.

Quelques mois plus tard, alors que l’adolescente s’était totalement remise de ses blessures, Hope décida d’arrêter ses études et de quitter l’université. Elle retourna s’installer chez son père et se mit à la recherche d’un travail. Son accident l’avait poussé à s’intéresser aux livres qu’elle se mit à dévorer comme à écrire. Elle s’était même trouvé un poste de vendeuse dans une petite librairie à quelques rues de chez elle.

Mais, même si tout semblait être rentré dans l’ordre, Hope se sentait différente.

Cela faisait déjà quelques jours que la jeune fille travaillait à la librairie. Elle rangeait de nouveaux arrivages quand la porte de la boutique sonna. Elle entendit sa collègue parler au nouveau client, lui demandant si elle pouvait l’aider.

Quand il lui répondit, sa voix lui sembla familière.

– Je cherche un livre de conte.

Hope resta figé un moment, sa main en suspend dans l’air. Où avait-elle entendu cette voix déjà ?

Alors que Hope se creusait les méninges, elle entendit la caisse sonner et la vendeuse dire au revoir au client. Prise d’une impulsion soudaine, l’adolescente laissa les livres en plan et courut à la poursuite de l’homme mystère, ignorant les interrogations de sa collègue. Une fois au milieu de la rue, elle regarda de tout côté avant de le repérer, quelques mètres plus loin, un sac de la boutique à la main.

– Hey !

L’inconnu s’arrêta, Hope s’approcha.

– On se connait ? J’ai l’impression de vous avoir déjà vu.

Le jeune homme se retourna lentement et plongea son regard dans celui de l’adolescente. Aussitôt, une foule de souvenir déferla dans l’esprit de la jeune fille. Le manoir. La lune pourpre. Peine. La forêt. Les miroirs.

Le gardien.

Hope sentit son cœur bondir dans sa poitrine en le reconnaissant et ne put s’empêcher de sourire. Voyant qu’elle avait compris, il lui rendit son sourire.

– Qui es-tu ? lança-t-elle en l’air.

– Moi ?

Il eut un sourire espiègle. Ses yeux pétillèrent d’une émotion que la jeune fille ne lui avait encore jamais vu, mais qui lui donna chaud au cœur.

– Je suis un Invisible.

Les larmes montèrent aux yeux de Hope sans qu’elle ne puisse les retenir. Et, sans s’arrêter de sourire, elle les laissa couler.

– Prend soin de toi, Hope.

Puis il se retourna et continua son chemin, disparaissant dans la foule de passant.

Hope resta là un moment, regardant l’endroit où il venait de disparaître. Elle était soulagée de l’avoir retrouvé, de le savoir encore là, quelque part. Alors, elle se redressa, sécha ses larmes d’un revers de main et retourna dans la boutique, le cœur léger.

Dans la vitrine, joliment exposé sur son présentoir, on pouvait voir un tout nouveau livre à la couverture illustrée. La Princesse et l’Ange, de Hope King.

Une plume d’un blanc éclatant apparut. Elle descendit lentement dans les airs jusqu’à l’ouvrage où elle se posa tout près, comme un rappelle que, quelque part, un ange veille.

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