Une vague se fracassa contre la roche abrupte. Sous la force de l’éclat, elle se fendilla en quelques centaines de gouttelettes brillantes.

Tout en haut, seule au bord de cette falaise, la nymphe pleurait.

Il fut un temps où sauter aurait mis fin à tous ses tourments, à ce désespoir qui dévorait son âme.

C’était un temps béni, où elle pouvait encore sentir la houle glaciale qui giflait son visage, l’herbe boueuse sous ses pieds et les embruns se poser sur ses joues rougies par le froid. Seul un homme pouvait lui rendre cet éclat de vie, celle-là même qui faisait battre son coeur.

Mais il était parti.

L’homme aux mille tours lui avait dérobé son coeur et s’en était allé, en quête d’un autre pays, d’une autre femme.

La solitude la consumait de l’intérieur. Pour elle, il n’y avait pas d’ailleurs. Le monde meilleur que ses amants retrouvaient toujours ne lui était pas destiné.

Elle cria.

Supplia le ciel de lui rendre la vie, supplia la mer de l’achever et la terre de l’emporter à jamais.

Les dieux entendirent-ils sa prière ?

Nul ne le sait, mais quand, triste à en mourir, elle se jeta dans la mer en furie, les eaux emportèrent son corps si loin qu’on ne le revit plus dans les alentours d’Ogygie.

Mais il est dit que Poséidon, tombé sous son charme, la recueillit en sa demeure, la protégeant du monde et de tous ses tourments.

Il est dit aussi que, prenant pitié, Zeus l’a transformée en poisson. Un poisson si beau qu’il lui aménagea une petite mare au coeur de l’Olympe, cachée à la jalouse Héra.

Mais où est la vérité ?

Nul ne le sait.

Après tout, ce ne sont que des légendes...