Chapitre 8 : Chloé (bis) - Le lendemain

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Je me disais que ma conscience et mon inconscient avaient choisi Chloé tous les deux. Je la regardais. Elle n’avait pas l’air de trembler avec moi ou du moins n’en montrait aucun signe. Mais le souvenir de mes ex ou de rencontres fortuites, avait mis en lumière le fait que j’avais le chic pour faire foirer les choses. Et pas qu’une fois. Et Chloé était là, dans ma vie depuis si longtemps. Et elle le savait. Surtout, Allan s’inquiétait de tout ça. Ou plutôt de moi et ma capacité à ruiner les situations favorables.

Ma seule consolation était que Chloé avait vécu la même chose. Mais elle croyait fortement qui ce qui nous arriverait dépendrait de nous deux. Elle était si spéciale pour moi. Et je l’étais pour elle. Et elle croyait en nous deux. Mais elle avait peur que je vacille et que je renonce à nous deux au moindre doute.

Parfois, je nous trouvais tous dysfonctionnels. Et moi, j’étais le type de gars dont on disait "heureusement, je ne suis pas lui !" J’avais bien changé, mais je gardais cette réflexion dans un coin de ma mémoire pour me rappeler d’où je venais et comment j’étais perçu.

Les retrouvailles se passèrent à merveille. Au bout de tant d’années, Chloé et moi entamions notre période d’essai. Archie nous voyait déjà très amoureux.

Allan était fier que je trouve le bonheur avec sa meilleure amie. Mais dans son odyssée psycho-sexuelle, il continuait de spéculer sur les relations amoureuses. Sous couvert de bête de sexe froide, il était beaucoup mieux que ça. Anne était désormais dans sa vie pour le tempérer. Elle-même s'était laissée convaincre à une vie de couple et y avait finalement succombé.

L'heure n'était toutefois pas aux réjouissances. Je devais définitivement clore le chapitre Rachel. Cette fin avec elle et les souvenirs latents avaient une allure de Guerre Froide. Je fis un nécessaire avec les quelques affaires qu'elle avait laissé chez moi pour les lui rendre. Elle m'attendait dans un café près de Central Park. Je pris l'initiative de la discussion.

—Comment vas-tu ?
—Ça ira.

Le silence était de plomb.

—Es-tu avec elle ? Cela ne me regarde pas, mais tu comprends. Enfin, tu n’es pas obligé de répondre.
—Oui, je crois… Je veux dire qu’il serait peut-être temps qu’on essaie quelque chose Chloé et moi.

—C’est bien.

Une larme s’échappa et faisait son chemin le long de sa joue.

—Tu sais Alessandro, aujourd’hui, certaines choses me paraissent insurmontables. Je ne sais plus ce que je veux. Il y a peu de temps, tu étais là, près de moi. J’étais dans tes bras…

Elle prit une courte pause, tentant de se ressaisir.

—J'ai pris des mauvaises décisions et je ne t'ai pas respecté comme tu aurais dû le mériter. J'ai passé trop de temps dans le sillage d’Aaron. Il me hante même quand c'est fini. Finalement, je ne me suis pas remis avec lui. Mais je vais commencer à vivre pour moi.

Je me sentais mal.

—Aujourd’hui, j’enterre tout ça. Lui. Toi. J’essaie de me projeter, mais je suis fatiguée. Une soirée cauchemardesque comme celle-ci m’a épuisé sur le plan émotionnel. Et c'est de ma faute.

—Que vas-tu faire ?

—Toute tentative de projection dans l’avenir me renvoie une image de moi dans une maison au fin fond de je ne sais quelle ville, un peu plus grosse, un peu moins jolie… Mais aimée. Sacré cliché. Enfin, tu comprends ce que je veux dire.

J’avais ressenti ses paroles comme si j’avais vécu le parcours. Pourtant, les choses ont changé. En si peu de temps. Pour la première fois, j’avais brisé le cœur de quelqu’un. Sans le vouloir. Que je pensais vraiment aimer. Son baiser d’adieu me rappela que nous avions été merveilleusement bien tous les deux. Et que ce fut trop court. Il était temps pour moi que je parte.

—Tu es un homme bon. Ne gâche pas tout avec elle.

Ses derniers mots résonnèrent dans ma tête. Le retour à la réalité fut brutal. Chloé me posa des questions sur notre entrevue. Elle semblait nerveuse et je tentais de la rassurer. Mais je n’allais pas bien. J’étais enfin avec elle, mais j’avais laissé derrière moi une âme déchirée. Je ne voulais pas la contrarier, mais mes mots de réconfort sonnaient tellement faux.

—Ça va, je te dis.

Elle s'offusqua.

—Et c’est tout ? Ça va ? Si c’était moi, ça n’irait pas ! Ça n’irait pas du tout !

Je ne voulais pas de conflit.

—Tu veux m’entendre dire quoi ? Que ce n’était pas bien du tout ? Oui ! C’était affreux. Je n’ai pas l’habitude de tout cela. Je me sens mal !

Elle se radoucit et prit ma main.

—Alessandro, il n’y a que les gens sans cœur qui sont capables de se séparer et ne rien ressentir, sans plus penser à la personne avec qui ils étaient pourtant si bien.
—Je me sens coupable alors que je n’ai rien vu venir.

Elle se serra contre moi.

—À côté de ça, je ne veux pas être triste. Je suis avec toi. Je veux te prendre dans mes bras. Je veux t’embrasser.
—Alors fais-le. Et on le fera. Encore et encore. Mais tu dois te débarrasser de ce qui te ronge. Pour toi. Pour nous.

Elle avait cette façon particulière de me regarder. Son pouce cajolait ma joue et plus je la regardais, plus elle me souriait. Comme si tout allait bien se passer.

Chloé partit finalement s’endormir. Je n'avais pas sommeil. Mon cœur était las et s'était épuisé dans l'attente d'aimer réellement. À force d'égarement et de résignation, je n'y croyais plus guère jusqu'à ce qu'elle se révèle à moi. Tous nos petits moments, nos fous rires, nos moments complices, les soutiens mutuels, les noyades, verres après verres, et nos ivresses passées n'étaient que le prélude de notre vie à venir.

Tous ces petits détails me revenaient par vagues successives. Dans mes tempêtes, elle avait été mon calme. La plénitude dans mon vide intérieur. Elle était mon sourire du matin, et mon ciaio bello du soir. Elle était un rêve éveillé dans mes cauchemars. Elle avait été ma veille. Elle devenait mon présent et mon lendemain. Elle était la chaleur sur mon visage froid. Elle était mon souffle coupé, la main que j'avais tenue le plus. Elle avait été mon engueulade préférée. Mon exaspération et mon enchantement.

Elle serait maintenant le visage que je découvre en ouvrant les yeux. Perdu dans mes pensées, je n'avais pas entendu qu'elle s'était réveillée.

—Tu viens te coucher ?

Elle me regarda tendrement.

—Ramène-moi au lit.

Je me regardais dans la glace. Tout cela, était-il enfin vrai ? Je retournais me coucher auprès de Chloé. Dans son léger sommeil, j’osais enfin lui dire « je t’aime ». En guise de réponse, elle se blottit dans mes bras et serra si fort pour mieux s’endormir.

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