Aurora White

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 Le juge frappa trois coups de marteau pour réclamer le silence. Suite à la déclaration de Black, les familles des victimes s’étaient offusquées avec force. Trois hommes s’étaient même levés pour l’insulter et le pointer du doigts. D’un geste furieux, Grey exigea aux agents de police de les expulser. Il ne donna crédit à aucune protestation. Il ne supportait pas que le public intervienne lors des procès. Si ça n’avait tenu qu’à lui, il l’aurait fait à huit-clos. Cependant, même le vénérable homme de loi qu’il était ne pouvait rien refuser au Maire.
 Son attention se reporta de nouveau sur l’accusé. Il souriait toujours, avec un air suffisant qui avait le don d’irriter le juge.
 « Il l’a fait exprès. Ce salopard se moque de tout. Mais s’il se croit plus malin que nous, il se met le doigt dans l’œil. »
 — Monsieur Black, vous n’êtes pas sans savoir que cette honorable cour peut se montrer bienveillante en cas d’aveux. Mais si vous plaidez non-coupable en même temps, cela n’a plus aucun sens !
 — Votre seigneurie, soyons honnête, ce ne sont pas des aveux qui vont changer grand-chose si je suis jugé coupable. Or, justement, je pense que je n’ai rien fait de mal. J’ai fait toutes ces choses que Monsieur… truc, là, a dit, mais en quoi cela serait-il mal ?
 — Vous persistez donc à plaider non-coupable ?
 — Bien sûr !
 Juste Grey soupira. Bien entendu, un être arrogant tel que lui n’allait pas s’avouer vaincu si vite. C’était donc irrémédiablement parti pour un procès qui s’annonçait long et fastidieux. Tout ça pour un résultat identique, il l’aurait parié. Mais hélas, même un juge ne pouvait changer le protocole. Il adressa un regard aux deux avocats. Maitre Brown, à la défense, avait déjà l’air de baisser les bras. Quant à Maitre Cobalt, il avait le regard confiant de celui qui se voyait déjà remporter une partie facile.
 — Vous pouvez maintenant appeler vos témoins.
 — La poursuite appelle Aurora White à la barre des témoins !
 Parmi le public, plusieurs personnes tournèrent la tête de gauche à droite à la recherche de celle que Maitre Cobalt avait fait mander. Il fallut quelques secondes avant que cette dernière daigne se lever. Elle avait pris place tout au fond de la salle. Elle souffla un coup pour se donner courage. Ses quelques voisins s’écartèrent pour la laisser passer et elle défila dans l’allée que Black avait empruntée plus tôt, tête baissée, mal à l’aise.
 Tout le contraire de Black, pensa le juge Grey. Tandis que la jeune femme avançait, il reporta son attention sur l’accusé. L’expression de celui-ci avait changé. Il paraissait soudain plus soucieux. Il se mordit les lèvres et échangea un murmure avec son avocat qui feignit de l’ignorer en haussant les sourcils. Si la cour et le procès avaient échoué à fendre sa carapace, cette femme, elle, avait réalisé les premières fissures. Perdu à son observation, Grey fut ramené à la réalité à la voix du greffier.
 — Madame White, levez votre main droite. Affirmez-vous solennellement de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité ? Dites : “Je l’affirme solennellement.”
 — Je l’affirme solennellement.
 — Madame White, entama Maitre Cobalt en s’approchant. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous, je vous prie ?
 — Je m’appelle Aurora Anna Gabrielle White. Je suis âgée de 27 ans et j’ai récemment été diplômée en médecine. Je travaille depuis peu à l’Hôpital de la Sainte Sérénité, dans le service de maternité. J’habite à deux kilomètres de mon lieu de travail, dans un appartement qui appartient à ma famille.
 — Ma foi, voilà qui est impressionnant, madame White. Je vous félicite pour votre réussite dans vos études. La médecine n’est pas facile. Mais elle est très importante pour notre société. Savoir qu’une jeune personne dynamique et morale telle que vous exerce dans nos hôpitaux nous réchauffe le cœur.
 — J-Je vous remercie.
 Sacré renard, ricana silencieusement le juge. Il avait choisi une jeune médecin qui donnait la vie comme première opposante au fameux Dr La Mort. Il allait la présenter comme un ange aux membres du jury pour mieux descendre Black.
 L'interrogatoire reprit.
 — Madame White, pouvez-vous nous dire ce que vous faites ici, dans ce tribunal, aujourd’hui ?
 — Parce que M. Black a tué mon grand-père.
 — Et quand cela s’est-il produit ?
 — C’était il y a trois ans, environ.
 — Hélas, M. Black sévit depuis déjà aussi longtemps… Mais vous savez, ce n’est pas la seule raison pour laquelle je vous ai choisie vous plutôt qu’un autre. Bien d’autres personnes ici ont perdu un grand-parent ou un autre proche du fait de M. Black. Mais vous, mademoiselle White, vous l’avez rencontré. Je me trompe ?
 — Non, vous ne vous trompez pas.
 — L’avez-vous reconnu ?
 — Oui.
 Aurora White tourna la tête vers Black. Ce dernier eut le même mouvement, mais à l'opposé.
 — Comment ne pas le reconnaitre. La démarche arrogante… Le sourire fier… La capuche stupide… Un je-m’en-foutisme constant… un humour qui ne fait rire que lui…
 — Oh, alors ça, c’est un peu fort ! s’écria Black, l’air piqué à vif. J’ai plein d’amis qui adorent mes blagues !
 — Accusé, veuillez-vous taire ! intervint le juge en frappant un coup de marteau. Désolé madame White, Maitre Cobalt, poursuivez.
 — Je vous remercie, Monsieur le juge. Madame White, pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec Monsieur Black ? Je crois que c’était juste avant le décès de feu votre grand-père.
 — C’est exact… Tout a commencé… par une chasse d’eau.

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