Chapitre 28 : La Némélithe

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Lorsqu’Eonia ouvrit la porte de ma chambre, j’étirais mes membres pour les soulager. En vain. En seulement deux entraînements, Kalya m’avait montré la brutalité qui l’animait. Et mon corps en subissait les conséquences. De plus, les nuits ici me paraissaient courtes et, contrairement à l’université, je n’avais pas la possibilité de faire l’école buissonnière.

L’Elementaris me salua, comme la veille, puis m’offrit un maigre sourire auquel je fus réticent à répondre. Je n’avais pas oublié qu’elle avait admis que son peuple et elle-même entretenaient des doutes sur ma réussite. Ils me voyaient comme un égoïste qui finirait probablement par être, indirectement, leur fossoyeur. Sachant cela, je ne savais pas comment me comporter avec elle. Elle avait été franche et, même si ses propos m’avaient blessé, j’aimais ce trait de personnalité chez les gens. Et puis, en y réfléchissant bien, je ne lui en voulais pas à elle spécifiquement, mais plutôt au peuple Elementarien tout entier pour se montrer aussi hypocrite. Après une hésitation, je finis par lui rendre son sourire.

Je me levai, mettant de côté le peu de pudeur qui me restait, et me dirigeai dans la salle de bain en sous-vêtement. Je fermai la porte, me déshabillai et me glissai immédiatement sous la douche. L’eau chaude coula sur mes épaules et embruma toute la pièce. Je souris de plaisir lorsque la chaleur détendit mes pauvres muscles entièrement courbaturés. Sans oublier les sept hématomes que j’avais décomptés et que mon corps n’avait pas encore fait disparaître.

Kalya était vraiment d’une brutalité déplorable.

Dans un soupir, je me rappelai que c’était à ma demande qu’elle m’avait botté les fesses de cette manière… Et que cela ne risquait pas de cesser de sitôt, pas tant que je ne serais pas capable de mieux me débrouiller au combat. En plus, j’étais certain qu’elle y prenait un malin plaisir aussi. L’image de mon mentor, le dos courbé comme une ancienne à cause du Dænami, surgit dans mon esprit. Je réprimai un rire. Avec un peu de chance, elle serait tout aussi courbaturée et se montrerait plus souple avec moi. Je n’y croyais pas vraiment mais cela suffit à me motiver pour quitter le bien-être procuré par l’eau chaude. Lorsque je sortis, mon regard se porta sur le miroir dénué de buée. Sa constitution en eau était un avantage non-négligeable lorsque l’on prenait des douches aussi chaudes que j’aimais le faire.

Je le touchais du bout du doigt, amusé. Le reflet fut troublé quelques instants avant de redevenir aussi lisse que du verre. Je trouvais cette magie tout simplement fabuleuse ! Et l’image était tout aussi limpide que celle d’une simple glace… Je fis alors attention au reflet et reculai d’un pas. Le cri de stupeur qui m’échappa fut des plus ridicule. Encore sous le coup de la surprise, je finis par me rapprocher. Je rabattis mes cheveux en arrière pour mieux détailler mon visage.

Cela faisait un moment maintenant que je ne m'étais pas regardé dans un miroir. Je n’étais pas obnubilé par mon physique, mais jamais je n’aurais pensé être un jour aussi désemparé par mon apparence. Du moins, pas dans le bon sens du terme. Le visage de la personne qui me scrutait ne ressemblait plus à celui que j’avais vu pendant plus de trois ans, chaque matin dans mon appartement à Paris.

Mon teint avait quelque peu bruni par le soleil Californien et était en partie couvert par une barbe brune hirsute. Je ressemblais à un pauvre voyageur abandonné sur une île déserte depuis des années ! Néanmoins, ma peau contrastait avec cette image : elle était à présent dénuée de toutes ces imperfections qui me répugnaient depuis mon adolescence. Toute trace d’acné avait disparu. Les cernes et les quelques rides avaient aussi laissé place à une peau saine, lisse et lumineuse.

Mon visage n’en était qu’embelli !

Il n’en était pas pour autant plus doux. Au contraire, il me paraissait même plus strict et ferme. Ni mes iris clairs, ni l’absence d’impureté sur mon visage, ne suffisait à atténuer la dureté de mon regard. J’aurais pu, à m’y méprendre, penser faire face à un militaire. Cette idée me fit esquisser un sourire. Moi qui détestais obéir aux ordres, je me comparais à ceux dont la discipline était la règle de vie. Lorsque mes lèvres s’étirèrent, pendant un bref instant, je retrouvai l’ancien Peter et son visage calme et réconfortant.

Mes yeux finirent par cesser de décortiquer mon visage et descendirent. Là, je retins un nouveau hoquet en découvrant que les plus grandes métamorphoses s'étaient opérées sur le reste de mon corps. Généralement, on se rend compte avoir grandi lorsque l’on se compare à quelqu’un d’autre. Je l’avais remarqué à côté de mon père, une dizaine de jours plus tôt. Mais je n’en avais pas besoin pour me rendre compte que j’avais d’ores et déjà dépassé le mètre quatre-vingts de plusieurs bons centimètres. Je n’étais pas aussi grand que mon ami Matt, fort heureusement, mais plus que Maël et Florian, j’en étais certain ! De plus, l’absence presque totale de pilosité sur mon torse me laissait amplement admirer la forme de mes pectoraux qui se dessinaient au-dessus de mes abdominaux à présent nettement visibles. Mes épaules aussi s’étaient élargies, suivies de bras à la musculature puissante.

Il me fallait admettre que la Ternaíre ne m’avait pas changé que psychologiquement. Tout chez moi avait été modifié.

Comment n’avais-je pas pu le remarquer avant ?

« Tes entraînements, la Ternaíre et l’environnement magique de Thorlann, intervint Astérion, ont accéléré le processus de croissance engendré par mes pouvoirs.

C’est… »

Aucun mot ne pouvait exprimer ce que je ressentais. Moi qui avais toujours été complexé par ma taille et ma silhouette maigrichonne, je venais de voir mon souhait le plus secret réalisé. Mon corps était finalement devenu le reflet de mes performances physiques.

« À présent, tu n’as plus d’excuse pour échouer face à une Elementaris aussi ridiculement petite que Kalya. »

Je ris tout en observant les muscles de mon dos.

« Toutefois, cesse de te reluquer comme cela, ajouta l’Eternel. Je refuse d’être coincé dans le corps d’un humain narcissique !

— C’est hypocrite venant de ta part, remarquai-je. »

Néanmoins, j’arrêtai aussitôt et enfilai des vêtements propres. Une mèche de cheveux brune retomba devant mon visage et je la repoussai avec agacement.

« Je déteste avoir les cheveux aussi longs… maugréai-je.

— Je trouve que cela nous donne un point commun, au contraire !

Raison de plus pour me les couper, ironisai-je. »

Je sortis de la salle de bain et croisai le regard interrogateur de Eonia se poser sur moi.

« Vous avez été long, remarqua-t-elle.

— Oui, excuse-moi. J’espère que l’on n’est pas en retard.

— Non, rien ne presse. Il vous reste encore une vingtaine de minutes pour profiter de la nourriture. »

Je ne me le fis pas dire deux fois et engloutis la brioche et la confiture qu’elle m’avait apportées. La bouche à moitié pleine, je lui demandai :

« Au fait, j’aimerais savoir si vous auriez des rasoirs ici ?

— Vous parlez de ces objets qui servent aux humains à tailler leur pilosité faciale ? m’interrogea-t-elle. »

L’expression me fit rire avant de me rendre compte que je ne trouvais pas de mot pour dire « barbe » en Esternal. Remarquant probablement ma surprise, elle précisa :

« Je parle votre langue, je comprends donc de quoi vous parlez. Mais les Elementaris mâles n’ont pas de barbe (elle prononça le mot en français avec un léger accent) et n’ont donc pas besoin de tels objets. Et si le mot a un jour existé, nous l’avons oublié depuis longtemps. Cependant, nous pouvons demander à l’un de nos Jovërns d’en prendre un dans la ville la plus proche et de vous le ramener ensuite.

— Ce serait super ! Mais comment allez-vous le prévenir ?

— Nous lui enverrons un message porté par un oiseau, c’est le meilleur moyen de communication que nous possédons ici. »

L’usage du téléphone chez les Elementaris m’aurait surpris. Et puis envoyer une lettre par un rapace était beaucoup plus amusant qu’un simple SMS.

« Et pour vos cheveux, vous faites comment ? demandai-je en croquant dans une poire juteuse.

— Que voulez-vous dire ? s’étonna-t-elle en haussant un sourcil.

— J’aimerais couper les miens, expliquai-je. Les femmes de ton peuple ont des cheveux comme les humains donc vous devez bien avoir un endroit pour vous les couper, non ? Ou au moins les ustensiles pour. »

Couper de si beaux cheveux… se lamenta Astérion. »

Je l’ignorai et écoutai la réponse de l’Elementaris :

« Nos cheveux poussent jusqu'à une certaine longueur et s'arrêtent ensuite. La plupart d’entre-nous gardent donc la longueur qu’ils atteignent, mais il arrive que certaines préfèrent les raccourcir. Pour cela nous avons en effet des ustensiles. Mais nous le faisons nous-mêmes, nous n’avons personne de spécialisé dans ce rôle. »

Je doutais sincèrement être capable de manier un ciseau sans me le planter dans le crâne et l’interrogeai :

« Tu accepterais de me les couper dans ce cas ? »

Elle fronça les sourcils, soucieuse.

« Je peux essayer, mais je n’ai jamais fait cela avant…

— Tu peux me les couper courts, la rassurai-je. J’en ai marre qu’ils me tombent devant les yeux…

Mauvaise idée, me souffla l’Eternel. »

Eonia réfléchit encore quelques instants avant de se sortir de la pièce. Cinq minutes plus tard, alors que je finissais tout juste ma tasse de lait frais, elle revenait, une paire de ciseau en main. Elle me fit m’asseoir, se mit dans mon dos et commença à couper. En voyant les touffes de cheveux qui tombaient généreusement à chaque coup, certaines plus longues que d’autres, je commençai à douter de ma décision.

Malgré tout, je restai silencieux jusqu’à…

« C'est bon, vous pouvez me dire ce que vous en pensez. »

Calmement, je me levai et me dirigeai dans la salle de bain pour découvrir le résultat. Sachant qu’Eonia m’observait, je demeurai impassible. Pourtant, dans ma tête, ma conscience devait à peu près avoir le visage de l’homme sur le tableau « Le cri » qu’Edvard Munch peignit en 1893.

J’espère cette comparaison suffisamment explicite.

En réalité, je ne pouvais en vouloir qu’à moi-même. Elle m’avait prévenu qu’elle n’avait jamais fait cela auparavant mais je faisais confiance au talent et à l’instinct naturel des Elementaris. Après tout, ils semblaient faire des merveilles avec tout ce qu’ils touchaient. Pourtant, je dus admettre qu’ils étaient bien plus doués en matière de combat ou de sculpture qu’en matière de coiffure. Entre ma mèche de devant coupée en diagonale et les quatre-cinq centimètres de différence entre le côté gauche et le côté de droit de mon crâne, je savais qu’il y avait un souci.

« Et voilà ! Je l’avais dit ! ricana Astérion. Tu pourras peut-être tuer les Xenos de rire avec cette tête ! »

Si seulement j’avais pu l’étrangler…

Décidé, je retournai vers Eonia, tâchant de dissimuler ma contrariété.

« Alors ? demanda cette dernière. »

Je devinai à ses yeux l’appréhension qui la rongeait. Elle avait fait de son mieux, c’était évident.

« Pourrais-tu simplement ajuster les longueurs ? lui demandai-je d’une voix neutre.

De toute manière, ce ne sera pas pire...

— La ferme Astérion !

— Ajuster ? répéta l’Elementaris. Oui, je crois… »

Et, tout en offrant une prière au dieu des coiffeurs, je la laissai reprendre.

Il ne lui fallut que quelques minutes pour me laisser m’admirer une seconde fois. Cette fois, aucun hurlement ne me vint. C’était court, plus que ce à quoi j’avais l’habitude, mais je n’avais plus l’impression de m’être battu avec une tondeuse. Il me restait deux centimètres de cheveux, tout au plus. En fait, c’était presque normal. Si on omettait quelques mèches rebelles que je comptais couper moi-même plus tard.

« C'est très bien ! lui dis-je. Merci ! »

Elle lâcha un soupir de soulagement avant de jeter un regard par la fenêtre et de s’exclamer :

« Nous allons être en retard ! Il faut nous dépêcher !

— Je connais la route, la rassurai-je, ne t'inquiète pas. Tu n'es pas obligé de m'accompagner si tu as d’autres choses à faire… »

Le temps que je termine ma phrase, ses yeux prirent la couleur d’un nuage d’orage. Elle fit un pas vers moi et appuya le bout de son index contre mon torse ce qui me força à reculer.

« On m'a demandé de m'occuper de vous afin que vous vous sentiez à votre aise, énonça-t-elle avec sévérité. Le Kalheni en personne m’a confié cette tâche et il est hors de question que je vous laisse vagabonder seul dans Thorlann alors que je suis supposé être avec vous ! »

Je déglutis. Elle qui m’était jusque-là apparu timide et douce, elle me faisait à présent presque aussi peur que Kalya.

« D'accord, concédai-je. Mais, dans ce cas, j’ai une requête en échange.

— Laquelle ? m’interrogea-t-elle, en fronçant les sourcils.

— Que tu cesses de me vouvoyer alors que tu as au moins deux fois mon âge. Je trouve ça particulièrement ridicule ! »

Une lueur amusée éclaira ses yeux qui reprenaient peu à peu leur couleur gris clair initiale.

« Si tu le souhaites, Peter.

— Parfait ! m’exclamai-je. Alors, allons-y avant que cette folle qui se dit mon mentor ne me fasse la peau ! »

J’eus tout juste le temps de voir Eonia sourire avant qu’elle n’ouvre la porte. À mon grand soulagement, notre relation s’apaisait enfin.

Je la suivis, le cœur plus léger.

Même si elle m’assura que cela n’avait rien à voir, j’étais certain que mon plongeon prématuré dans la rivière fut la punition orchestrée par Kalya pour mon retard. Son excuse de « Je n’avais pas vu la rivière » me semblait un peu légère. Finir trempé, alors que je n’étais même pas en sueur, ne fut pas particulièrement agréable. Sans omettre qu’elle profita bien de tout le temps qu’elle avait avec moi pour se moquer de ma nouvelle coupe. Maudite Elementaris ! Entre une flopée d’injures et de malédictions à son encontre, je jurai encore une fois de la noyer dès que l’occasion s’en présenterait.

Cependant, comme l’avait souligné Astérion, il y avait plus de chance que je finisse en victime si je m’y risquais.

Et je détestais l’admettre mais il avait très certainement raison.

Néanmoins, cet entraînement fut le premier où je ressentis une véritable amélioration. Mon esprit était désormais plus aiguisé et mes sens plus affutés. Je ne répétai plus les erreurs que j’avais commises quelques jours plus tôt et Kalya peinait de plus en plus à me surpasser. Oh, elle finissait bien par y arriver à un moment ou l’autre, mais pas sans encaisser quelques-uns de mes coups au préalable.

Mes compétences en combat rapproché étaient même devenues suffisamment bonnes à leurs yeux pour qu’ils m’autorisent à manier ma première épée. L’arme, apportée par Elysion, avait un manche noir assorti d’une lame d’un blanc pâle. Ce qui me surprit le plus, c’était sa légèreté. J’aurais pu, à m’y méprendre, penser que je brandissais un simple jouet en plastique. Elysion, dont l’arme de prédilection était justement l’épée, me fit m’exercer sur un pantin de bois. Il me précisa par ailleurs que les arbres sur lesquels ils avaient prélevées le bois étaient déjà morts. Néanmoins, je n’étais plus autant surpris par le désir écologique des Elementaris.

Pour n’avoir jamais croisé le fer avant, mes piètres connaissances en ce domaine se limitaient à Star Wars et le Seigneur des Anneaux. Sauf que, premièrement, j’étais loin d’être aussi doué qu’Aragorn ou Luke Skywalker et, deuxièmement, je ne contrôlais pas encore totalement ma force.

Au premier coup que j’assénai sur le pantin, non seulement l’épée le trancha nette avec une facilité déconcertante, mais l’arme me glissa des mains et alla se planter profondément dans le sol. Après l’en avoir extraite à grand renfort d’injures, ce qui devenait une très vilaine habitude, il me fallut une bonne heure pour m’habituer à sa légèreté tout en apprenant à restreindre mes propres mouvements tant que je n’y serais pas habitué.

Après une demi-heure à m’exercer, alors que je venais de trancher un nouveau mannequin comme s’il était fait en mousse, je finis par demander à mon maître épéiste :

« En quoi est faite la lame ? Elle est tellement tranchante et légère ! »

Jusqu’alors, je pensais que c’était ma force surdéveloppée qui me permettait de fendre le bois aussi facilement mais, après réflexion, je devais bien admettre que la lame y était pour beaucoup. En l’étudiant de plus près, je découvris qu’elle ne conservait aucune trace des accrocs contre le bois et continuait de le trancher plus facilement encore qu’une hache. Ma seule certitude : ce n’était pas du métal. Non, aucune épée en acier n’aurait pu être aussi acérée. Et puis, la lame ne renvoyait aucun reflet de lumière, ni n’émettait aucun son métallique lorsqu’elle percutait quelque chose. Au contraire, elle libérait un léger sifflement agréable à l’oreille.

Pour toute réponse, Elysion me désigna du doigt les étranges roches qui parsemaient le haut de son crâne.

« La lame de cette épée est faite à partir de… de la roche qui pousse sur votre crâne ? m’écriai-je, stupéfait.

— Pas seulement la lame, précisa-t-il. Le manche aussi en est constitué, il a simplement été coloré. Toutes les armes et tous les ustensiles que tu trouveras à Thorlann sont constitués de Némélithe. Que ce soit les lames des lances, nos boucliers ou nos plats et nos couverts : la Némélithe est à nous ce que l’acier et le plastique sont à vous. Elle nous permet de ne pas mutiler, ni abattre des arbres qui ne le méritent pas.

— Mais vous la récoltez en…

— Nous taillant les cheveux, oui. Il est de tradition pour un Elementaris de tailler sa propre arme ou ses outils à partir de sa propre Némélithe. Et pour les femmes, généralement c’est à partir de celle de leur père, de leur frère ou de leur compagnon, que l’arme est réalisée. Cette roche a des propriétés magiques qui lui donne une valeur inestimable à nos yeux. Tout d’abord, sa résistance. Elle n’est pas aussi résistante que du diamant mais on s’en rapproche. De plus, à une certaine température, elle devient très malléable et facile à modeler pour n’importe quel Elementaris du feu. Une fois qu’elle a obtenu la forme souhaitée, une lame par exemple, on peut l’aiguiser lorsqu’elle est encore fraîche. Une fois reposée, elle conservera son tranchant durant des décennies sans s’émousser.

« Alors, pour la guerre, vous serez équipé d’armes comme celle-ci ? l’interrogeai-je tout en examinant avec un nouvel intérêt celle que je tenais dans mes mains.

— Oui, ainsi que d’armures semblables. Malheureusement, nous n’avons pas forgé d’équipements de guerre depuis longtemps et la quantité de Némélithe reste limitée. Elle ne pousse que d’un centimètre tous les deux ans environ et n’excède pas les quinze centimètres de hauteur.

— C’est stupéfiant !

— Je te l’accorde, approuva-t-il. Allez, reprenons ! »

Lorsque l’heure vint de manger, je n’étais pas devenu le meilleur escrimeur du monde mais je n’étais pas aussi lamentable que je l’avais craint. Je ne m’étais ni transpercé, ni tranché un doigt, et cela représentait déjà une grande victoire. Grâce à mes pouvoirs et mes entraînements, mon instinct était calibré pour le combat. J’étais certains qu’avec de telles armes entre les mains, aucun Xenos ne serait capable de faire face à tout un peuple d’Elementaris. Lorsque j’appris l’existence de cette matière magique, une question me tarauda : Aurait-elle pu changer l’issu de la Grande Bataille ? Après tout, je me souvenais des Elementaris maniant des armes de métal de fabrication humaine. La Némélithe aurait-elle pu faire la différence ?

Mon instinct me disait que non, mais un doute subsistait.

Le reste de la journée, je le passai avec Talane. Cette fois, le Kahn m’enseigna comment former un Krull, ces énormes golems de pierre utilisés pour les entraînements. Le problème avec ces créatures était qu’il fallait former une structure stable afin de le contrôler à sa guise. Et dès le départ, l’empilement des roches fut une déception. Je commençais à former la seconde jambe que la première s’écroulait. Puis je m’adonnais au bras pour voir que la tête était tombée.

Lorsqu’enfin j’y arrivais, après plus d’une heure de dur labeur, je me rendis compte que jamais je n’aurais pu être marionnettiste. Mon pauvre golem semblait plus faire des claquettes que donner des coups de pied. Et au moindre effort trop violent, il s’effondrait en morceaux. Contrôler ses mouvements par la pensée était d’une complexité supérieure à tout ce que j’avais eu à faire jusqu’ici. Même si Talane m’assura que c’était loin d’être simple, je vis bien que je l’avais beaucoup moins impressionné que la veille. Malgré tout, explorer toutes les facettes de ces nouveaux pouvoirs me plaisait et je n’étais pas prêt à renoncer.

Ce fut lessivé que, enfin, je pus rejoindre la Tour des Cieux. Après m’être débarrassé de mes vêtements humides, avoir pris une nouvelle douche et savouré le calme, ainsi que le repas que l’on m’avait apporté, je me jetai sur mon lit et laissai mon esprit dériver à sa guise jusqu’à trouver le sommeil.

Finalement, je commençais réellement à me plaire ici.

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