Souvenirs

5 minutes de lecture

Aujourd’hui, je me marie. Ce jour devrait être le plus beau de ma vie, pourtant, il semble m’avoir échappé. Que s'est-il passé pour que j’en arrive à détruire ce qui faisait de moi une femme comblée . Un mari aimant et attentionné, c’était tout ce dont j’avais besoin. Son caractère était un peu rude, il est vrai, mais il était justement l’objet de mon attrait envers lui. Aujourd’hui, pourtant, je meurs.

###

Jade se souvenait de l’amour qu’elle avait sacrifié, alors que son souffle se faisait de plus en plus court.

Tout s’était passé très vite, et pourtant, l’issue était connue d’avance. On ne pouvait décemment agir comme elle l’avait fait, et ne pas voir se dérouler sous ses yeux, la déconstruction de son monde idéal, soutenu par des fondations faites de mensonges, que l’évènement le plus anodin fit s’écrouler.

###

Huit ans auparavant, au sortir d’une boîte de nuit branchée qui avait échauffé les corps et les esprits, Jade avait rencontré Pierre. Au premier regard, ils s’étaient tout les deux sentis terriblement attirés. Une pulsion et un désir physique intense les avait fait se mêler, jusqu’à ce que le soleil soit haut dans le ciel. Cette fois-ci, contrairement à leurs habitudes, ils restèrent blottis l'un contre l'autre.

###

Six ans après cette rencontre, tout deux décidèrent que leur histoire valait la peine d’être vécue avec plus de stabilité. Ils se fiancèrent. C’est à cet instant même que quelque chose d’étrange se passa chez Jade. Le monde devint soudain trop petit pour elle. Elle se sentait enfermée. Elle suffoquait. Elle ne trouvait plus en Pierre le souffle dont elle avait besoin.

###

- Jade, ma chérie, ça va ? J’ai l’impression que non.

- Ba oui, ça va. Répondit-elle, surprise de la question, et de son apnée inattendue. Pourquoi retenait-elle son souffle ?!

- Je crois que j’ai besoin de prendre l’air. Je vais sortir notre chien.

- Mais je viens juste de le rentrer. T’es sûre que ça va ?

- Mais oui ! Laisse moi. Je te dis que j’ai besoin de sortir.

- Couvre toi au moins, il fait vraiment froid.

###

Qu’est-ce qu’il était agaçant à toujours vouloir me contrôler. Je ne suis pas sa fille. Je sors si j’ai envie.

- Hector, dépêche toi !

Hector était un petit bouledogue français, tout blanc avec une petite tache noire sur l’oeil droit, et sur le bout de sa petite patte arrière gauche. Il avait la fâcheuse habitude de renifler chaque pneu des voitures garées le long de la route, devant chez eux, mais ce soir, son attention était fixée ailleurs.

###

Elia, la petite chienne chihuahua de leurs voisins, courrait vers Hector tout en remuant la queue. Tout deux s’adoraient. Ces derniers temps, leurs maîtres également.

- Finalement t’as réussi à sortir. T’as pas répondu à mon message. J’ai cru que je serais tout seul dehors. À me cailler dans le froid.

- Oh ça va, tu vas pas commencer. Tu sais que j’ai envie de te voir.

Leurs deux chiens alors devant les ébats volés de leurs maîtres.

###

Ce fût ainsi que tout s’accéléra. Jade et Jack, le grand blond au prénom américain, aux muscles saillants et aux tatouages apparents, fût le catalyseur d’une chute libre incontrôlable.

Pourtant, Pierre ne voyait rien, il était toujours aussi amoureux de sa future épouse. Il la regardait avec les yeux de l’amant perdu dans l’avenir insondable d’une vie commune.

Pour lui, sa fiancée était simplement angoissée par le mariage à venir.

###

Chaque soir, Jade trouvait toutes excuses improbables pour sortir, et retrouver, l’espace de quelques instants, l’amant de la soirée. Ces ébats volés étaient devenus une addiction. Un rituel étaient même installé entre eux. Il lui envoyait un message anodin, dont le sujet était souvent lié au sport, puisqu’il était aussi le coach dans la salle qu’elle fréquentait. Elle sortait alors, souvent avec Hector et revenait quinze minutes plus tard.

###

Jack n’était pourtant pas le seul. Il était le premier d’une longue lignée, mais il n’était pas le seul.

- T’en vois d’autres que moi ? Osa-t-il lui demander un jour.

- Ba oui, Pierre. Rigola-t-elle. C’est quoi cette question aussi bête que toi.

- J’sais pas, j’me disais que si tu faisais ça avec moi, tu pourrais le faire avec d’autres.

Tombait-il amoureux d’elle ? En tout cas, elle chavira devant cette attitude naïve et innocente.

- Évite ça.

###

Plus les jours passaient, plus Jade et Pierre s’éloignaient doucement. Ils ne se rendaient pas compte de cette faille qui se dessinait sur leurs coeurs. Inconsciemment, Pierre savait, mais il ne se doutait pas de la réalité de ce qui pouvait se passer, sous ses yeux.

Jade, chaque jour, rencontrait de nouveaux hommes. La technologie a permis de consommer les corps si facilement, que les modes de consommation ont créé les relations fast-sex.

###

Aussitôt commandé, à peine consommé et vite oublié. Toutefois, des expériences deviennent des rencontres qui se prolongent, mais jamais elles n’offrent le bonheur authentique partagé. Alors, Jade consommait, encore, toujours, et même parfois trop. Elle oubliait même sa vie et le seul qui l’aimait vraiment, pour se noyer dans l’outrancière jouissance facilité par le progrès technologique. D’un glissement du doigt on se consomme.

###

Puis, partout où elle allait, son seul objectif était de séduire et collectionner les rendez vous volés.

Un soir, Jade et Pierre retrouvèrent leurs amis communs, dans une salle qui avait été privatisée pour l’occasion. C’était le nouvel an, celui de tous les risques, car la majorité des hommes présents étaient aussi ses amants. Ces derniers étaient bien évidemment venus à cette soirée, accompagnés de leurs femmes ou de leurs copines.

###

L’alcool coulait à profusion, et les esprits s’échauffèrent autant que les inhibitions se délitèrent, à mesure que les verres se vidaient. Pierre perdit de vue sa fiancée, mais qu’importe, il était heureux. L’ivresse qui montait posait un voile de naïveté sur son coeur. Antoine et Jay tenaient compagnie à Pierre.

- Les gars, merci, hein, elle est trop bien cette soirée. J’suis tellement content, oui, je suis content, j’vous aime les gars.

###

Pendant ce temps, dans l’ombre des recoins de la cuisine qui jouxtait la salle, des soupirs étouffés emplissaient l’espace. Ils se pensaient tranquilles pour leur danse volée. Pourtant, certains les entendirent, et d’autres virent les reflets de leurs mouvements.

Alors Jay et Antoine occupèrent Pierre.

- Tiens, Jack, t’étais où, hein, t’es allé pisser dans la cuisine ou quoi ?

Jack en revenait, tout en ajustant sa chemise à son pantalon.

###

- Ça fait du bien les gars. Dit-il, avec le large sourire du plaisir satisfait.

- Tiens, ça me donne envie à moi aussi, surenchéri Jay.

- Il y a de la place pour tout le monde, mais pas tous en même temps, hein. Dit Jack, hilare.

Les trois compères se regardaient, entendus dans leurs actes malsains. Ils se disaient entre eux que cette opportunité se devait d’être partagée entre amis.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire greg_dcx ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0