Observations

4 minutes de lecture

- Logan ! Tu viens ?

- J'arrive, deux minutes !

Ce soir ça fait un peu plus d'une semaine que les cours ont reprit.

Dehors il fait déjà nuit, mais la ville est baignée dans le reflet d'une douce pleine lune qui inspire Eliott. Il y a moins d'une demi-heure qu'il a invité environ la moitié du lycée pour un match de basket nocturne. J'ai beaucoup d'estime pour Eliott, mais parfois quand je le suis, je me demande ce que je fais là. C'est exactement la question que je me pose à cet instant précis.

Il fait nuit, je déteste toute sorte de sports incluant un ballon ou n'importe quel objet rebondissant par définition et pourtant, je suis là, perché sur la dernière rangée de sièges en plastique froid du minuscule stade. Parfois quand je le regarde jouer je réalise à quel point nous ne pouvions pas être plus opposées. Du haut de son mètre 96, il sourit comme un mannequin professionnel le ferait à une quarantaine de photographes. Il faut dire que sa peau ébène ferait des envieux tant elle rend bien sûr papier glacé. Lorsque l'on est à côté l'un de l'autre, avec mon corps anguleux et mon teint couleur de lune, je me demande si la nature ne s'est pas un peu amusée.

Je suis tiré de mes pensées par des applaudissements. Je ne comprends pas toujours les règles de ce jeu, mais Cally semble avoir mis un très beau panier, car ses coéquipiers l'ont soulevée sur leurs épaules pour faire faire le tour du stade en l'acclamant.

Cally est une jeune fille aux cheveux roux interminables, médaillée pour une dizaine de concours d'éloquence, excellente basketteuse et insupportable négociatrice avec qui il est difficile de se faire entendre.

Il faut dire que j'ai toujours été un peu artiste, avant même de découvrir la photographie, j'étais rêveur, bordélique parfois et je possédais cette imagination débordante qui me donnait l'air un peu à côté de mes pompes. Cally, elle, aime le concret, les gens stables et les faits avérés, ce qui complique notre entente au grand désespoir d'Eliott pour qui l'entente entre son meilleur ami et sa petite amie est primordiale. Sur ce point ils se sont bien trouvés avec Eliott. Si je suis les idées farfelues il est clairement la technique. Il a de l'or au bout des doigts et reconstruit, embellit chaque objet qu'il touche.

Pragmatique, c'est lui qui me rattachera au sol le jour ou je finirai par m'envoler.

Je fus une nouvelle fois interrompu dans mes pensées, non pas par des applaudissements, mais plutôt par une apparition. À quelques chaises de moi, enroulée dans une immense écharpe Athénaïs soufflait sur ses doigts gelés malgré les fines mitaines qui les couvraient. Je pensais pourtant n'avoir posé mon regard que quelques secondes sur sa silhouette gelée, mais elle se retourna quasi immédiatement.

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Logan vit mon regard se poser sur le minuscule carnet poser sur mes genoux.

Ce qui fut m'a confirmation que je n'aurais jamais dû venir ici, il est tard, je déteste les foules et il est fait incroyablement froid pour un mois de septembre.

Je m'étais dit en lisant les messages qu'il se passerait peut-être quelque chose d'intéressant, un sujet sur lequel écrire, ce ne fut pas le cas. Et pour ajouter à ma poisse, je venais de sentir sa présence.

À quelques mètres de moi, Logan Lawson était assis, le regard perdu vers l'horizon.

Ce n'est pas qu'il me fait peur, mais Logan a toujours été quelqu’un dont je me méfiais. Avec son sweat bordeaux et ses mains enroulées dans des bandes de cuirs usées il n’a pourtant pas l'air de grand-chose. Mais il est le fils de la patronne du bar le plus glauque du pays, il connaît le vieux quartier ouest comme sa poche, il a grandi en parcourant les ruelles abandonnées depuis des générations, probablement un appareil photo à la main.

Il a ce sens de l'observation, du détail, à la fois fort intéressant, mais aussi incroyablement effrayant lorsqu’il vous fixe comme il le fait à cet instant précis.

- Salut, lança-t-il après quelques minutes.

- Salut, soufflai-je dans la brume.

Il a compris pensai-je en le voyant faire des aller-retour entre mon carnet et mon visage.

- Tu écris pour le journal, c'est ça ? demanda-t-il enfin.

J'avais raison de me méfier. J'acquiesçais.

- Je suis le journal précisais-je en me préparant à une flopée de question qui mettrait immédiatement fin à mon anonymat

- Ca te dirait d'avoir un photographe ?

OK, celle-là je ne l'avais pas vu venir

- T'es sérieux ?

- Écoute, je sais que je n'en aie pas forcément l'air mais j'aime bien fouiller dans les histoires pour connaître les détails croustillant qui s'y trouvent. Je ne suis pas un auteur très doué mais j'ai quand même bien envie d'être aux premières lignes pour assister aux rares événements intéressant de cette ville.

- Tu sais disparaître s'il le faut et tenir ta langue même quand c'est pour faire l’intéressant ?

- Évidemment

- Très bien, mais s'il s'avère que s'est un mensonge, tu risques de t'en souvenir, compris ?

- Euh, ouais, promis.

Je replaçais une mèche tombée sur mes yeux avant de lui glisser

- Demain, 11 h 15 troisième étage, que je ne te pas vois avant petit scarabée

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