Top forme

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En jeune fille transie devant le Bad Boy ténébreux, j’étais au top. Sauf que là, j’étais vraiment en transe, et aussi trans-plein-de-choses. Transparente, transmutée, petite lulu transie - oui-oui-oui ! - en transit vers l'outremonde, devenue pour son malheur, désespéremment, redoutablement, transhumaine.

— Mon amour, un petit bisou d’une transhumaine grésillante et clignotante (dans mes bons jours) … Bisous… Bisous…

Voilà, j’étais devenue une zombie, et je n’aurais pas su où me mettre, si je n’étais pas déjà devenue si translucide, si extralucide pour une fois, osant le regarder dans les yeux, et j’entamerais certainement bientôt la litanie des dis, disjontée, disparue, sur l’air de Frozen, avant d’aller noyer mon chagrin dans la mare des dys, dysfonctionnelle, dystopique…

Je pleurais de toutes mes larmes cet amour impossible qui s’offrait, me jetant sur lui, essayant de le saisir, de l’embrasser.

— Vous n’auriez pas vu Béatrice ?

Linh et Luv se regardèrent avant de revenir poser leurs yeux sur moi qui virevoltait, Luv gonflant ses joues, Linh remontant du bout des doigts ses lunettes sur son nez.

— Non. Elle est souffrante en ce moment.

— Oui-oui ! Halala. C’est Tê Li Bâ, Tê Li Bâ… Elle souffle, elle souffle.

— Ha. Dommage. A tout à l’heure ?

— Oui…

Dans la classe, j’avais un peu repris mes esprits. Toujours encadrée par Linh et Luv, qui avaient enlevé leurs lunettes de soleil pour ne pas attirer l’attention, j’offrais une place vide au regard de tous.

A la fin des cours, il vint les voir, pendant que je terminais d’essuyer mes yeux bouffis, épongeant du mieux possible mes larmes bidimensionnelles.

— Est-ce qu’on pourrait aller discuter, dans un café ?

— Parce que… tu nous veux quoi, mon petit bouffon ?

— Vous êtes ses meilleures amies. Il me faut vous parler… d’elle. Béatrice.

Ô joie ! Existerait-il un Paradis au Royaume des quanta ?

Il veut leur parler de moi. Enfin, mon ancien moi. C’est toujours ça de pris. Car, y a-t-il plus grand réconfort que d’avoir dans sa vie été, ne serait-ce qu’une fois, aimée, d’amour sincère et vrai ?

Gratitude ! L’univers est en ordre.

Assise à cette table de café, flanquée de Luv et Linh, ultra méfiantes (les jalouses !) j’étais persuadée que je devenais, enfin, visible pour lui, là devant moi, rayonnante… enfin, scintillante… bon… clignotante… grésillante… Voilà, j’étais devenue plus calme, plus raisonnable. Il ne me voyait pas. Il fallait être sérieuse, là.

— Qu’est-ce que tu lui veux, bouffon ?

— Vous savez combien j’apprécie Béatrice…

— Ça ne se voit pas trop.

— Pourtant, c’est vrai ! Elle est toujours si parfaite, toujours si… première de la classe. Ça impressionne.

— Noir et blanc ? Ou couleurs…

— Ha ha ! Très drôle ! Luv, je flashe vraiment sur ton humour…

Non mais, Luv, là, il est ici pour parler de moi. Tu te crois où ? Je ne tolèrerai aucune diversion.

— Et puis son père est tellement génial !

Je sais, je sais… Mais moi aussi je suis géniale, hein ? Avec tous les efforts que je fais pour être à sa hauteur, tellement belle, tellement géniale, tellement première de la classe…

— Et sa voiture qui sent la vanille ? Il est doué pour les inventions.

De quoi il parle ? C’est bien les mecs, ça, parler de voitures, non mais ?

— Son frère aussi a l’air sympa…

Là, s’en est trop. Il commence à baisser grave dans mon estime, le Bad Boy.

— Alors ?

Alors ?

— Et bien vous savez que mon père est en prison. Ce n’est pas de sa faute, il est victime de ses amis, il n’a jamais su dire non. Je voudrais le faire sortir ! Alors je me demandais, par le plus grand des hasards, est-ce que le père de Béatrice n’aurait pas une invention, je ne sais pas moi, un truc comme on voit dans les foires, ces choses qui traversent les murs ?

Linh et Luv le regardaient fixement. Elles remirent toutes deux leurs lunettes de soleil pour voir ça. J’avais bondi sur lui, je le giflais, le lacérant de toutes mes particules.

— Quelque chose ne va pas ?

— Nous, ça va.

Linh approuva, hochant la tête.

— Tout va tlès tlès bien.

— Alors, vous lui parlerez ?

Luv à son tour hocha la tête.

En voyant son air contrit, si plein d’espoir, je lui en collais deux autres, pif ! Paf !

— Merci, merci…

Pas de quoi, ce fut un plaisir.

— Alors, on remet ça à demain ?

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