Chapitre 25B: juillet 1775

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Simon ( 05/12/1774 - 20/07/1775)

Je suivais avec beaucoup d'attention les conseils du praticien qui me conseilla de relaver tous ses linges, avec un autre savon. Mon petit garçon se retrouva donc tout nu dans la maison le temps que j’aille lui laver ses vêtements au vinaigre blanc. Le soir, Léon prit un air décontracté après avoir observé les boutons de mon fils.

— Dites – donc, seriez - vous sûre que Léon – Paul n'aurait pas contracté la varicelle ?

En effet, maladie bien loin d'être une allergie, je n'y avais pas pensé et avait aveuglement fait confiance au médecin. Mon mari avait raison. Les boutons se mirent progressivement à recouvrir son visage, son dos, ses jambes, lui provoquant des démangeaisons impressionnantes. Nous dûmes même lui mettre des gants pour qu'il n'ait pas de trous dans la peau à force de se gratter, mais heureusement, cela ne dura pas bien longtemps, et au bout d'une semaine et demie, ces boutons n’existaient plus que dans nos souvenirs.

Mon petit rouquin, en excellente santé et plein d’énergie pour souffler ses deux bougies le seize juillet, se gava de gâteau à la crème, la bouche toute barbouillée. Sa robe tâchée, il sauta et couru partout à la vue de l'énorme paquet cadeau que je sortis comme par magie de dessous la table.

—''Calmez - vous donc, Léon – Paul… Le priais - je en connaissant la patience limitée de mon mari.

Il déchira le papier qui entourait le paquet et à la vue de la splendide draisienne, mon fils paru étonné. D'abord je fus très déçue car il s'amusa avec le papier cadeau, mais quand je lui montrais la façon dont il pouvait faire avancer la voiture, il ne la quitta plus. Léon me parut interloqué.

—''Comment fonctionne t – il, ce véhicule ?

—''Avec les pieds. C'est un artisan dans le village qui fabrique cela.

—''Vous avez dû vous ruiner, gâter un enfant, ce n'est pas qu'un peu donner de la confiture aux cochons.

—''C'est aussi mon fils, et puis si elle ne sert pas à Léon – Paul, elle servira à Simon. J'avais envie de lui faire plaisir, mais vous savez, je ne dépenserais pas tous les jours autant d'argent pour lui.

—''Encore heureux ! Vous savez Louise, un enfant n'a pas besoin de jeux chers pour être heureux, je suis sûr qu'un crayon pour s'exercer à l'écriture l'aurait tout autant comblé.

Je fus contente car Léon – Paul comprit vite comment faire avancer sa draisienne, et le lendemain, nous sortîmes dans le village faire des tours et des tours avec son bolide. Ce un beau jouet en bois, tout équipé, possédait un garde boue, deux roues tout terrain et un guidon. J’’y avais investi toutes mes économies, avec l'aide de Mathurin, qui m'avait en petite partie aidé à financer le cadeau. Pour mon mari, l’aide venait de ma cousine et mon frère. Mes belles – filles avaient l’air jalouses, je le sentais, mais après tout, elles n'étaient pas mes enfants et je trouvais cela normal de favoriser mon fils aîné, que, sans le dire à haute voix bien sûr, j’affectionnais avec Simon tout particulièrement par rapport aux autres enfants.

Quand un peu plus tard, Gustavine revint de l’école avec ses deux amies, je me sentis littéralement débordée. D’abord Simon paraissait malade, râlant sans trop de raisons, ne tétant pas trop, il avait sans doute attrapé une petite fièvre à cause de sa poussée dentaire, ensuite Michel s’ennuyait ferme, me posant sans cesse des questions qui me paraissaient ridicules.

—''Quelle est la couleur du ciel aujourd’hui Louise ?

Quant à Caroline et Malou, elles se tapaient dessus, car Caroline ne voulait pas prêter sa poupée, alors ma nièce tentait de lui arracher des mains et cela finissait en pleurs.

—''Louiiii iiiiise... Caroline elle veut pas dooonner ma poupée…

Gustavine et ses amies durent se débrouiller pour leur en-cas, mais je crois qu’elles n’en furent pas pour le moins fâchées. Je constata juste une pénurie de biscuits le soir quand je rouvris les placards…

Léon fit le soir même venir Léopold Dumas, le propriétaire d’un splendide étalon, à la maison, pour conclure le prix de la saillie avec les deux juments. Tandis que nous prenions notre repas, et que je tentais de bercer d'un bras Simon qui n’allait vraiment pas bien, j’écoutais les négociations d’une oreille. A la base, monsieur Dumas considérait cinq louis comme un bon prix, apparemment trop cher pour Léon qui avait proposé quatre louis, offre finalement acceptée par le propriétaire, qui en avait profité pour prendre un verre en notre compagnie. Il ne nous adressa même pas un regard, discuta un peu avec Léon de son cabinet, toujours à Paris qui ne cessait de lui donner meilleure réputation, avant de rentrer chez lui. Ils avaient savamment conclu la saillie pour le matin suivant, et en effet, je pu entendre de l'agitation provenir de la cour vers six heures le lendemain, j'allais voir à la fenêtre, curieuse.

Dans la nuit du vingt au vingt – et un juillet, alors bien qu’il ne pleurait pas, je savais que Simon était malade. Je le découvrais trempé de sa sueur dans son berceau, le visage livide, les yeux révulsés, secoué de spasmes, prit de ce que j’aurais appelé une crise de tétanie. Impuissante, je le prenais dans mes bras, et lui parlais tout bas, pour l’apaiser. Après avoir fait de mon mieux pour qu'il se rendorme, je retournais me coucher, lourde de fatigue.

Lorsque je me réveillais le lendemain matin, Simon était mort.

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