Chapitre 28H: mars - mai 1780

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Michel, après avoir écouté d'une oreille on ne peut plus attentive Joséphine jouer, fait maintes erreurs, et s'être corrigé, nous joua une petite partie de ''la marche turque'', de Wolfgang Amadeus Mozart. Si jeune, Mozart était un véritable prodige de la musique depuis qu'il était tout petit, puisque dès les années 1760 – 1762, alors qu'il n'avait que cinq ou six ans, on nous avait fait part de son génie dans les journaux. Nous applaudîmes tous, pour Michel, c'était une victoire, quelque chose de tellement gratifiant d'être reconnu pour son talent. Il adorait jouer et il était très doué, ses mains glissait sur l'instrument comme s’il avait fait cela toute sa vie.

Mars et avril étaient des périodes où souvent, il ne se passait pas grand – chose. Seule exception à la règle pour cette année, nous nous rendîmes tous à Paris en mars, pour célébrer la première communion de Malou. Elle retrouva son père et son frère, ravie, Auguste fils avait tellement grandi, il ne ressemblait pas à sa mère plutôt à son père, avec ses boucles brunes et ses grands yeux verts, il faisait sa fierté. Les deux enfants, vêtus de leurs habits de cérémonie, expliquèrent les raisons pour lesquelles ils souhaitaient communier, ils récitèrent l'évangile et reçurent chacun l’hostie, avant qu'ils n'aillent se confesser auprès du Père. Pour la première fois depuis longtemps, je revoyais Adélaïde, sœur d'Auguste, et aussi pour la première fois je rencontrais son mari, Adrien, et leurs deux enfants, Augustin – Louis, cinq ans et demi et Charles, trois ans. Je discutais longuement avec Adélaïde, tandis que mes fils, toujours aussi sociables, jouaient avec Augustin et Charles, deux adorables enfants aussi sages l'un que l'autre, bien que Augustin soit très timide. Alors que Léon discutait avec Adrien, j'apprenais que le couple était endeuillé d'un enfant depuis la naissance de son benjamin, un garçon prénommé Jean, mort à l'âge de dix mois l'année dernière. Sur ces tristes nouvelles, je ne me réjouissais pas de voir Malou si peu proche de son frère, les deux ne s'adressaient même pas la parole, c'est pourquoi je tentais de les rapprocher.

—''Que faites-vous Auguste ? Demandais – je au jeune garçon assis près de son père qui s'ennuyait.

—''Je ne fais rien. Me répondit -il l'air triste.

—''Qu'avez-vous eu pour votre anniversaire de l'année dernière ? Vous avez une très jolie chemise.

—''J'ai eu des livres, mais cette chemise je l'ai depuis longtemps.

—''Allez donc voir votre sœur, je suis sûre que vous aurez beaucoup de choses à lui dire.

Sans aucune envie je sentais, Auguste alla vers sa sœur, qui s'ennuyait elle aussi, grignotant des dragées, assise sur ce petit muret. Je les observais de loin.

—''Tout va bien ? Lui demanda-t-il après un long instant d'hésitation.

—''Oui. J'ai trouvé la cérémonie tout à fait agréable.

—''Moi aussi. Vous aviez une jolie robe, c'est Louise qui vous l'a cousu ?

—''Non, c'était la robe de communion de maman. Louise m'a même dit que je pourrais porter sa robe de mariée quand je ferais mes épousailles.

Un long silence s'installa entre le frère et la sœur, avant que Auguste ne soit rappelé par son père. Malou était déçue, j'étais sûre qu'elle aurait préféré discuter davantage avec son frère aîné. Quant à Michel, il était resté assis sur un muret a l'ombre d'un chêne durant toute l'après – midi, rêvant comme à son habitude. Son père, qui avait embrassé Malou, n'avait même pas demandé à voir son fils, ni même comment il allait, ni même s’il était venu. Pauvre garçon je me disait.

Le midi nous prîmes un repas tous ensemble dans le parc qui jouxtait l'église, convivial, chaleureux, délicieux, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas partagé un tel moment en famille. Les gens regardaient Michel de travers, se demandant pourquoi je lui donnais encore à manger à huit ans (il arrivait seulement à manger seul dans un bol, à la maison), c'était lourd, surtout les chuchotements dans les oreilles des commères tout sauf discrètes et scrupuleuses, comportement que j'avais du mal à comprendre. J'avais fait exprès de placer Michel a table en face de son père, mais il n'y avait rien à faire, Auguste savait qu'il était son fils, bien sûr, mais il l’ignorait complètement. Cependant je remarquais de sa part, quand Michel renversa la cruche d'eau sur la table, un coup d’œil qui signifiait tout, particulièrement difficile à digérer. C'était dur à dire mais je comprenais pourquoi Léon était réticent à l'emmener dans les fêtes de famille. Le pauvre enfant n'y était pour rien, seulement lui ne subissait pas le regard des autres.

A cheval entre l'hiver et l'été, nous subissions durant avril et mai averses et périodes de beau temps, bien qu'il vente toujours beaucoup. Je me souviens des promenades avec Émile, ses cheveux mi- longs s'envolaient presque au vent, il courait en agitant les bras comme un oiseau porté par le souffle des nuages, c'était beau.

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