Chapitre 2G: décembre 1753 - mars 1754

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Elle devait au plus vite rentrer chez elle, car sa tante sûrement folle d'inquiétude risquait de faire porter sur les épaules de sa grande sœur le poids de sa disparition, Camille ne l'ayant pas convenablement surveillée.

Au matin suivant, la vision de l'homme encore assoupi lui donna suffisamment de confiance pour quitter le logement. Elle enfila donc son manteau comme on lui avait appris, ses chaussures comme elle le pouvait et aussi discrètement que possible, elle déverrouilla la porte pour sortir de l'immeuble.

De ses mains frêles, elle entrebâilla la porte monumentale de bois qui la séparait de l'extérieur, et le froid la saisit alors. Le jour venait à peine de se lever. Louise se décida à marcher au hasard, sans savoir où elle se rendait.

Soudain, au détour d'une rue, elle apperçu une esclave d'oncle Jean qui balayait le perron de l'hôtel.

Louise courut alors aussi vite que ses jambes frêles le lui permettait pour la rejoindre.

Cette dernière, en la voyant, rentra précipitamment à l'intérieur. Puis, après un instant de doute, la petite Louise apperçu sa tante. Ce fut pour elle un immense soulagement de retrouver un visage familier.

Elle la conduisit au chaud dans l'appartement, où tout le monde savoura avec joie son retour. Marguerite lui fit donner un bon bain, puis elle rejoignit Camille et Anne qui s'amusaient autour d'un jeu de cartes.

Sa sœur s'exclama d'un ton jovial :

— Nous avons eu si peur pour vous, Louise ! Mais heureusement, le Seigneur vous a protégé.

À la veille de la Saint - Nicolas, l'excitation était telle que le marchand de sable n'arrivait pas à les rejoindre, alors, réunies sous la couverture de Camille qui tenait la bougie, les trois petites se racontaient des contes. Puis leurs yeux se mirent à les piquer, la grande sœur éteignit la mèche et elles s'endormirent toutes les trois dans son grand lit.

Au matin, réveillée avant tout le monde et sans doute pressée de découvrir ses cadeaux, Camille-Marie enjamba Louise et Anne, et bien qu'elle ait pris garde à ne pas les réveiller, un mouvement du lit plus important que les autres les sortis des bras de Morphée. Louise courut alors vers sa chambre pour y découvrir les cadeaux lui étant destinés. Elle arriva dans la pièce froide inoccupée depuis la veille et alluma avec précaution la mèche de la bougie placée sur son chevet.

Devant son lit, le néant. Il y eu alors sur son visage une déception d'une telle amertume, que les pleurs ne l'atteignirent même pas. La déception qui s'affiche sur le visage d'une petite fille qui ne reçoit pas la surprise dont lui parle sa sœur et sa cousine depuis plusieurs mois.

Elle alla retrouver Camille pour se faire consoler et se vider de mes larmes. Elle non plus n'avait rien reçu, ni sa cousine Anne d'ailleurs. Mais elle était forte, ayant acquis un âge où comprendre certaines situations paraissait plus facile, alors que Louise, non.

Elle la consola donc, de tout ce qu'elle avait besoin, s'excusa du plus profond de son cœur de lui avoir promis des choses jamais arrivées. Une fois remise de leurs émotions, elles allèrent retrouver leur tante, qui prenait son déjeuner, dans sa robe de chambre de satin rose. Sans même les saluer, celle-ci leur fit, très agacée, une remarque qu'expliqua plus tard Camille à Louise.

— ''C'est la première fois et j’espère de tout mon cœur la dernière fois que je vous le fais remarquer. Il est absolument inadmissible que vous dormiez ensemble, est-ce claire ?

— Oui ma tante.

— Oui mère.

— Avez-vous compris, Louise ?

Devant son expression interrogée, Camille accorda un clin d'œil à sa petite sœur, ce qui lui redonna suffisamment de confiance en elle pour répondre positivement, mais timidement à sa tante Marguerite.

Puis Camille lui expliqua l'usage de garder son lit et que le fait de dormir à plusieurs était mal vu, car cela faisait de loin référence au péché de chair, ou au péché de la pédérastie, des mots encore bien trop abstraits pour elle.

Ils prirent par la suite leur déjeuner sans un mot et à la fin du repas, retrouvèrent sur leurs lits, en guise de cadeaux de Noël, une orange exquise. Puis le soir, toute la famille rejoignit l'église pour célébrer la messe de minuit, qui fut longue et ennuyeuse, surtout que Louise était très fatiguée à cette heure du soir. Le lendemain matin, lorsqu'elle vit que le petit Jésus avait été placé dans la crèche, elle ne pouvait que s'extasier, accroupie près de l'installation. Une naissance, c'était toujours joyeux, non ?

Rien ne se passa d’exceptionnel au nouvel an, ce passage symbolisait juste une nouvelle année qui commençait. Cette année, Louise fêterait ses quatre ans, un âge banal pour la plupart des personnes, mais très important pour elle, car cela ferait une année depuis son retour de chez sa nourrice.

Malheureusement, nous n'en étions pas encore au mois de mai, ensoleillé et joyeux.

Pour le moment, janvier régnait, froid et triste.

Louise attrapa une importante grippe vers la fin du mois de janvier, dont elle ne fut remise complètement qu'une semaine après, et au mois de mars, ce fut le vingtième anniversaire de mariage de sa tante et de son oncle. Ils fêtaient leurs noces de porcelaine. Oncle Jean délivra ainsi pour cette occasion à son épouse un magnifique service de céramique.

Puis le printemps réapparu bientôt, et les enfants retournèrent au parc. Louise retrouva les jumelles, les amies avec lesquelles elle préférait passer son temps. Bientôt, naîtrait leur frère ou leur sœur, et l'impatience les guettait. Louise se mit à dessiner sur le sable du square des visages inhumains, en s'amusant à dire qu'il ou elle ressemblerait à cela. Une des jumelles rajoutait des cornes et des dents monstrueuses à ses dessins, et les petites filles riaient a en avoir mal au ventre.

À son âge, comme elle se lassait vite d'une personne, elle jouais avec tout le monde, sans distinction de sexe ou de caractère, s'amusant parfois avec les garçons, parfois avec les filles, souvent avec les deux, et des fois toute seule. Lorsque c'était le cas, les autres enfants avaient vite fait de la taquiner pour l'inciter à retourner jouer avec eux. Il lui arrivait de passer des journées entières dehors, rentrant brièvement manger le midi.

Puis au début du mois de mars, celui que tout le monde attendait vit le jour. Lorsque Louise revit les sœurs après la naissance, elles étaient accompagnées de la nourrice qui portait dans ses bras un minuscule nourrisson. Elles coururent vers elle, voulant en même temps lui annoncer son sexe et son prénom. C'est ensemble et fières qu'elles s'écrièrent.

— C'est un garçon et il s'appelle Jean–Baptiste !

Elle s'approcha alors de la nourrice, et pu voir un petit ange qui ne ressemblait en rien aux monstres tracés sur le sable du square.

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