025 Les Belles Roches

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Le restaurant « Les Belles Roches » tire son nom du site remarquable où il brille comme une perle dans son écrin. A l’est de la ville, face au couchant, une grande falaise de roches rouges barre le paysage. Cette falaise est traversée de nombreuses cavités, vestiges de l’époque ancienne où l’eau était abondante dans la région. La falaise est née de l’effondrement d’une partie du plateau et, du coup, certaines de ces cavités souterraines débouchent maintenant dans le vide. Lors de la première colonisation de Solera, Arthur Nitzer avait été conquis par ce paysage grandiose. Après avoir cheminé dans une galerie naturelle, il avait brusquement débouché au milieu de la falaise. Une plaine immense s’étendait à ses pieds, l’horizon, au loin, était limité par une chaîne de montagnes bleutée. Il sentit le potentiel de ce site. Il eut l’idée audacieuse de créer un établissement troglodyte. Plusieurs cavités étaient utilisées, une très grande servant de salle principale au restaurant, des plus petites étant transformées en loges privées. La bourgeoisie naissante de Solera adora ce concept original. Mais avoir un site remarquable ne suffisait pas, il fallait en plus avoir un grand chef aux cuisines. Il alla débaucher Paul Bonhomme, une étoile montante de la gastronomie. Paul faisait partie de la brigade d’un restaurant trois étoiles sur Ursianne, le quatrième créé par un chef réputé. Autant dire qu’il ne pouvait pas exprimer sa créativité, étant limité aux recettes de son patron. Par contre, il avait beaucoup appris, et l’offre de Monsieur Nitzer tombait à point : il allait enfin pouvoir s’exprimer dans « son » restaurant, et expérimenter ses idées nouvelles. Il débarqua donc sur Solera avec son épouse et son fils. Le succès fut remarquable et planétaire. Tout est relatif d’ailleurs, Solera ne comptait à l'époque que quelques millions d’habitants, dont bien peu avaient les moyens de fréquenter un établissement de luxe comme celui-ci. Il espérait que son fils prenne sa succession derrière les fourneaux, mais le petit Bonhomme n’avait pas la vocation. D’un autre coté son épouse regrettait la vie qu’elle menait sur Ursianne, ne supportant pas le coté province reculée de cette planète. Elle finit par se décider à partir, emmenant le rejeton dans ses bagages. Ce fut très dur pour Paul, d’autant que son enthousiasme s’était un peu émoussé et qu’il se laissait aller à la routine, loin de la créativité de ses débuts. Un rayon de soleil éclairait quand même sa vie, il s’agissait de Vincent, le fils de son patron. Curieux, l’enfant passait beaucoup de temps dans les cuisines. Au début, pour lui faire plaisir, Paul lui avait appris quelques recettes de desserts, comme son fondant de chocolat aux aristelles, un fruit local, ou ses sphères de lave froide, des petites boules de pâte fourrée de mousse de fruits refroidie a l'azote liquide. L’enfant s’était piqué au jeu, et, au fil du temps, s’était intéressé à la totalité de la carte. Et un jour, il avait alors dix sept ans, il apporta à Paul sa première création. Le vieux cuisinier en fut bouleversé, d’autant plus qu’il comprit à la première bouchée que l’élève avait dépassé le maître. Restait un problème, convaincre le père Nitzer que son fils était bien plus doué pour la cuisine que pour la politique, carrière qu’il rêvait de lui voir embrasser. Il finit quand même par se rendre à l’évidence : Vincent allait devenir un chef fameux, à défaut d’être un ministre ou un président passable. Le restaurant « Les Belles Roches » vit sa notoriété croître encore plus, et désormais certains gastronomes n’hésitaient plus à traverser l’espace pour goûter cette cuisine « magique ». Pour une table dans la grande salle, il fallait retenir plusieurs mois à l’avance. Quand aux loges mieux valait être pistonné !

A l’heure convenue Steve arrêta sa voiture devant l’hôtel de Christa. Il eut du mal à reconnaître la jeune femme, habituellement en combinaison de travail, dans cette gravure de mode qui apparut en haut des escaliers. Une robe rouge assez courte et au décolleté généreux, des hauts-talons étincelants, une coiffure de rêve. La déesse descendit gracieusement les marches et s’arrêta devant lui, examinant à son tour le mercenaire. Loin des tenues militaires il avait revêtu un complet bleu d’une grande sobriété qu’il portait avec élégance, jouant de sa forte stature. Seule fantaisie, une chemise à jabot. D’habitude, Christa trouvait cela ridicule, mais c’était le top de la mode masculine et, sur lui, c’était très acceptable. Durant le trajet, il parlèrent peu, intimidés d’être sortis de leur rôle habituel.

L’arrivée au « Belles Roches » était impressionnante. Le parking était situé au pied de la falaise et on accédait au restaurant par un ascenseur panoramique entièrement vitré, déconseillé aux personnes souffrant de vertige. Steve fut ravi de contempler la mine stupéfaite de son invitée, restant bouche bée devant le paysage s'étalant devant eux. La salle principale était vaste, environ trente mètres de large sur vingt cinq de profondeur. Chaque table était éclairée par des bougies et le soleil couchant pénétrant en biais colorait de rose le plafond rocheux.

  — Comment avez-vous fait pour avoir de la place  ? Je me suis laissée dire qu'il fallait s'y prendre longtemps à l'avance et vous m'avez invitée il y a seulement deux jours.

Steve sourit.

  — Chut  ! C’est un secret. Et puis qui vous dit que je m'y suis pris seulement il y a deux jours ?

Christa lui jeta un regard surpris puis fronça les sourcils.

  — Et naturellement vous étiez sûr que j'accepterais votre invitation?

  — Sûr, non. Mais j'avais l'espoir...

  — Vous n'avez pas l'habitude que la gente féminine vous résiste, je suppose ?

  — Je ne pense pas que vous fassiez partie de la gente féminine « standard ». Honnêtement, non, je n'étais pas sûr du tout. Mais j'aurais été très déçu de votre refus.

  — Et puis qu'auriez-vous fait de votre réservation?

  — Hum... Une réservation cela peut s'annuler. Ou alors, j'aurais pu venir avec Erin, mais la situation aurait été moins... romantique. Et puis partager un repas avec une collaboratrice ! La conversation aurait tourné toute la soirée sur le boulot et, dans ce temple de la gastronomie, ce serrait un crime, pire un sacrilège! Bon, en attendant vous êtes là et je suis le plus heureux des hommes. J’aurais préféré une loge, mais elles sont retenues si longtemps à l’avance…

Il se tut, contemplant avec admiration la toilette de son invitée. Celle-ci se dandina un peu sur sa chaise, gênée, puis se pencha sur son sac à main pour en retirer un petit paquet.

  — C’est très gentil de m’inviter dans un restaurant si sélect. Alors moi aussi j’ai voulu vous faire un cadeau.

Steve, surprit, faillit se récrier que ce n’était pas la peine mais quelque chose dans l’attitude de Christa éveilla sa curiosité : il sentit que ce cadeau devait être spécial. Le paquet était magnifiquement enrubanné mais très léger. Le regard de la jeune femme pétillait de malice. Il l’ouvrit et trouva un petit carré de tissu bleu, avec deux bout de fils et son prénom brodé dans un coin. Interloqué, il jeta un coup d’œil à Christa qui avait l’air de s’amuser beaucoup. Elle consentit à s’expliquer.

— On appelle ça une bavette. Cela remplace les serviettes pour les petits enfants qui bavent beaucoup, particulièrement lorsqu’ils font leurs premières dents.

Steve fronça les sourcils, ne voyant pas où elle voulait en venir.

  — Vous vous souvenez de ce que vous m’avez dit en m’invitant ? Que si je m’apprêtais bien, vous passeriez la soirée à baver dans votre assiette. Lorsque je me suis vue dans la glace, j’ai pensé, en toute modestie, qu’il valait quand même mieux prévenir que guérir.

Steve eut un sourire mi figue mi raisin.

  — Vous voulez que je mette ça  ?

  — Vous êtes contre les précautions  ?

  — Non, bien sûr.

Il essaya de l’attacher autour du cou mais celui-ci était trop important pour cet ustensile pour bébé.

  — Trop petit, désolé.

  — Vous vous dégonflez !

Il posa la bavette sur son jabot et passa les fils dans l’ouverture de sa chemise.

  — Voilà, je suis prêt.

Il regarda ostensiblement la poitrine de la jeune femme en louchant, la bouche ouverte comme un débile profond. Christa éclata de rire, alors que les clients des tables voisines les regardaient d’un air désapprobateur.

  — C’est bon  ! Je lève votre gage.

Steve enleva prestement l’accessoire.

  — Au fait qu’est-ce qui m’a valu ce gage  ?

  — Hum…de m’avoir observé pendant que je travaillais avec un regard peu professionnel.

Steve posa la main sur son cœur, faisant semblant d’être offensé.

  — Moi ? Vous me prêtez des intentions ...

Elle hocha la tête souriante.

  — Pourtant vous n’avez pas l’air de redouter mon regard ce soir.

  — Vous m’invitez, je me devais de faire un effort. Et puis ce soir je me suis habillée spécialement pour être regardée.

  — Je pourrais toujours m’en servir ainsi.

Steve avait roulé la bavette et faisait semblant de s’éponger le front avec. Puis il la brandit et en menaça Christa.

  —Avouez ! C’était un test  ?

  — Peut être…Je vous l'ai dit: je voulais savoir si vous étiez pour les protections  !

Elle rit, les joues un peu empourprées. Steve se redressa sur sa chaise et sourit.

  — J’aime quand vous riez.

  — Même si c’est de vous ?

  — Ce n’est pas méchant. Mieux vaut vous amuser que vous ennuyer.

  — C’est vrai, je l'avoue : c’était un test. Je voulais être sûre que vous compreniez la plaisanterie et que vous ne vous vexeriez pas pour un rien.

Elle se pencha vers lui.

  — Et puis vous aussi vous m'avez déjà testée...

  — Ah bon ? Quand ça ?

  — Lorsque vous m'avez expliqué le pourquoi du surnom de Carlos. Avouez que vous vouliez voir ma réaction !

  — On ne sait jamais, vous pouviez très bien vous intéresser plus à lui qu'à moi. Alors, autant ruiner sa réputation, en vous prévenant qu'il est un peu cavaleur.

  — Hum, il est très mignon. Ça ne m'étonne pas qu'il ai du succès. J'avoue que moi-même...

  — Vous vous moquez encore de moi !

  — Vous savez, je suis très taquine. Il faut me supporter.

  — Voici qu’une nouvelle Christa Kalemberg m’est révélée, loin de la scientifique sérieuse que je croise tous les jours.

  — Mon Dieu ! Je suis si rébarbative que ça ?

  — Rébarbative n’est pas le mot qui convient. Mais vous vous immergez dans votre travail totalement, vous semblez passionnée et j’ai l’impression que, dans ses conditions, vous êtes injoignable, recluse dans votre bulle.

Christa réfléchit, interloquée.

  — C’est peut-être l’impression que je donne, pourtant je ne me sens pas si différente que ça…

  — Vous êtes un chef d’entreprise comme moi. Il vous faut organiser le travail de votre équipe, gérer les conflits, booster la dynamique du groupe. Je connais cela. Mais il y a une charge supplémentaire pour vous, c’est votre activité de scientifique. Lorsque j’ai mis mon équipe en place sur une mission, mon rôle en tant que responsable est limité. En dehors du commandement, pour la routine journalière, je ne suis pas plus indispensable que mes officiers. Et même pour le commandement, mon bras droit, Erin, peut me remplacer à tout moment. Par contre j’ai l’impression qu’en plus d’avoir la responsabilité hiérarchique de votre équipe, vous en êtes l’élément essentiel sur le plan du travail scientifique. Je trouve que c’est une double tâche écrasante.

Christa soupira.

  — Vous avez mis le doigt sur le problème. Je suis en permanence en surrégime. Mais d’un autre coté, lorsque je me trouve entre deux contrats, mes journées me paraissent interminables. Je ne supporte pas l’inactivité.

  — Boulot-dodo, c’est quand même une alternance infernale. N’y a-t-il pas de place pour autre chose dans votre vie…

  — L’amour, c’est ça  ? Serait-ce une avance déguisée ?

Steve rougit, sentant qu’il avait mis les pieds dans le plat d’une façon peu subtile. Mais Christa le regardait en souriant, il y avait plus d’ironie que de reproche dans son regard. Il sourit à son tour, encouragé par son attitude.

  — Il ne faudrait pas se réveiller trop tard et constater que l’on est passé à coté de choses importantes…

Christa le regarda attentivement.

  — Vous parlez pour moi ou pour vous ?

  — Peut-être pour moi. Je ne vous connais pas assez pour porter un jugement sur votre vie.

  — Vous savez ce que je me demande ? Êtes vous sincère ou me faites-vous du baratin ? Vous êtes en train de me faire croire qu’un soldat de métier pourrait avoir la nostalgie d’une vraie vie de couple, de famille même pourquoi pas ?

  — Honnêtement pas vraiment, pas encore en tout cas. Mais je sais que, bientôt, j’aurai envie de nouveauté dans mon existence. J’ai connu un certain nombre de périodes dans ma vie:  l’enfance au milieu d’une famille nombreuse, l’adolescence en internat, puis un séjour dans l’armée régulière, puis un travail de mercenaire et enfin la création de mon entreprise. Périodiquement, j’ai remis en cause ma façon de vivre. Mon avenir professionnel est tout tracé, mais, en même temps, je sais qu’il est proche de son apogée  : je n’ai pas la tentation, comme certains «confrères», de lever une petite armée et de fomenter des coups d’état, dans les coins reculés de la galaxie, Encore moins de sortir de la légalité pour m'enrichir, en pillant ou rançonnant : les exemples de ce genre d'exactions abondent malheureusement. Je ne suis pas encore las de la vie que je mène, mais en même temps, il m’arrive de m’interroger sur ce qui va me motiver dans l’avenir, me donner du plaisir, quel but je vais bien pouvoir choisir… Mais je meurs d’envie d’en savoir plus sur vous.

  — Oh, je ne suis pas quelqu’un de remarquable. J’ai eu une enfance heureuse, avec des parents qui m’ont beaucoup gâté. Ensuite j’ai fait des études qui m’ont passionnée et je suis sortie deuxième de ma promotion. J’ai commencé à travailler dans une grande entreprise, mais je ne m’y sentais pas à l’aise, je manquais d’air, de liberté de mouvement. Il y a un peu plus de deux ans, ma mère est morte des suites d'une longue maladie. Mon père, qui est retraité, a alors vendu tout ce qu’il possédait et, avec en plus les économies d’une vie, a réalisé l’apport personnel qui me manquait pour me lancer à mon compte. Voilà pourquoi, à vingt huit ans, je me retrouve chef d’entreprise. Je brasse beaucoup d’argent, mais les bénéfices restent maigres. Ça ne fait rien, c’est la vie qui me plaît.

  — Votre père doit être fier de vous.

Christa hocha la tête, brusquement émue à l’évocation du passé. Ils mangèrent un moment en silence. Pour alléger le climat Steve se lança dans des commentaires sur les talents du chef Vincent Nitzer et sur d’autres établissements qu’il avait déjà fréquentés. Ce fut Christa qui remis la conversation sur les rails des confidences mutuelles.

  — Je suppose que la vie d’un mercenaire ressemble à celle d’un soldat traditionnel, du moins tel que l’imagine le commun des mortels.

  — Hum…On nous prête une vie bien plus tumultueuse que celle que nous vivons réellement. Les gens projettent leurs propres fantasmes sur nous.

  — Vous ne me ferez pas croire que vous vivez comme des moines !

Steve sourit.

  —Non, bien sûr.

  — Mais vous ne voulez pas m’en dire plus. En parlant de ça je ruine vos plans…

  — Je n’ai pas de plan, sinon d’être sincère et de passer une soirée agréable en votre compagnie.

  — Et plus si affinité ?

Elle avait de nouveau son sourire ironique. Steve s’arrêta de manger et la fixa gravement.

  — Christa, vous me plaisez beaucoup, mais j’ai l’espoir, qu’entre nous, cela puisse être bien plus qu’une banale petite aventure. Si je vous ennuie, dites-le moi, J’endosserai sans problème le costume du dragueur impénitent.

Christa se redressa sur son siège et le regarda en souriant.

  — Ne changez rien. Je me sens bien avec vous, ici, ce soir.

Puis son regard pétilla à nouveau.

  — Et puis, je vous avais prévenu : j’aime bien plaisanter, mettre en boite. Alors, comme j’ai un beau mercenaire sous la main, je ne vais pas le ménager.

Steve soupira exagérément.

  — Allez-y, je suis une victime consentante.

  — Voyons Steve. Nous nous sommes à peine vus sur Ursianne. Je débarque sur Solera, quatre jours après vous m’invitez au restaurant, et là, vous me laissez entendre qu’avec moi ce n’est pas comme avec les autres, que vous êtes las de votre vie actuelle, etc…etc…N’avez-vous pas l’impression d’en faire un peu trop ?

  — Cette question sent le gros piège. Comment vais-je faire pour m’en tirer avec les honneurs ? C’est encore un test ?

  — Ne noyez pas le poisson et répondez-moi franchement.

Steve posa ses couverts et réfléchit avant de se lancer.

  — Vous voyez ces boules de lave froide. C’est un dessert délicieux. Et pourtant, que va-t-il nous en rester demain ? Dans huit jours ? Un souvenir qui va s’estomper progressivement. Dans quelques temps, nous nous souviendrons que nous avons aimé ce dessert, mais nous en aurons perdu le goût sur notre langue. C’est l’image de ma vie  : des souvenirs qui progressivement se confondent, s’effacent. J’aurais envie de retrouver tous les matins le goût de ce dessert dans ma bouche.

  — Si je comprends bien, vous me prenez pour une boule en pâte de choux avec de la mousse glacée à l’intérieur  ?

Elle le regardait avec un air un peu canaille, jouissant à l’avance de son embarras.

  — Avec mes comparaisons débiles je me piège moi-même. Et je peux vous faire confiance pour m’enfoncer.

  — Oh ! On se révolte  ?

Steve la regarda de la tête aux pieds, du moins ce qui était au dessus de la table. Il arborait un sourire carnassier.

  — Finalement, la façon dont vous avez fait semblant de comprendre mes explications est assez juste : une pâte de choux que l’on a envie de croquer, pour déguster ce qui est caché à l’intérieur.

  — Ah ! Le grand méchant loup fait son apparition !

  — Le petit Chaperon Rouge ferait bien de se méfier !

Le visage de Christa redevint sérieux.

  — Vous savez, j’ai compris ce que vous vouliez dire. Moi aussi je ressens parfois ce sentiment. D’une part j’ai envie de m’investir à cent vingt pour cent dans mon travail, trouver de nouveaux contrats, développer mon entreprise. D’un autre coté, j’ai déjà vingt huit ans, et si je veux aussi connaître une vie de famille, il faudra que j’y pense bientôt. Enfin j’estime avoir encore le temps.

Elle redressa une mèche de cheveux du bout des doigts.

  — Je crains que vous m’ailliez fait boire plus que de raison, je deviens bien trop bavarde!

  — Peut-on boire de l’eau avec une telle cuisine ?

  — Hum…Je faisais surtout allusion à votre manière discrète de me pousser à dépasser mes limites.

  — Nous avons mangé bien trop de calories pour un repas normal. Nous avons aussi absorbé trop d’alcool. Et alors  ? Ce soir c’est fête. Je suis très heureux que vous ayez accepté mon invitation.

  — C’est vrai  ? Nous glissons sur une pente dangereuse. Ce n’était pas prévu dans nos accords d’Ursianne.

Steve la regarda dans les yeux.

  — Je ne demande qu’à me laisser glisser sur cette pente.

  — N’allons pas trop vite. Savourons chaque instant de notre vie. Ne soyons pas si pressés d’être à demain.

La vue depuis l’ascenseur panoramique était féerique. La ville s’étendait au pied de la falaise et offrait sa géométrie pointillée de lumières multicolores. Dans la voiture ils parlèrent peu, la fatigue commençant à se faire sentir. Arrivé devant l’hôtel Steve voulut l’embrasser mais Christa le repoussa doucement.

— Non Steve. Pas si vite. Nous le regretterions.

Il la regarda remonter les escaliers avec des sentiments contradictoires. Il aurait tant aimé l’accompagner. Mais, d’un autre coté, elle avait raison : ils avaient tout leur temps, à eux d’apprécier chaque étape.

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