Chapitre 38 - Liliraele

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Je vis les silhouettes des trois princes jaillir au galop des bois, Saorsa n’avait pas attendu pour lancer sa propre monture au galop, au grand dam de Sadralbe qui poussa un cri pour la retenir. Sauf que couchée sur l’encolure de sa monture, elle galopait trop en avant, puis surtout, les princes l’avaient rejoint et ils s’étaient lancés dans une course. Je souris légèrement, elle était déjà chez elle ma petite sœur. Et les portes s’ouvraient au loin. Mon père claqua la langue :


« Elle aurait pu nous attendre !

- Il n’y a qu’une route père, je crois qu’il aurait été difficile de nous égarer. »


Il fronça les sourcils et je ne lui fis qu’une moue paisible, je restais surprise du pont levis qui était baissé, Saorsa nous avait parlé de porte, on avait entendu parler de porte… mais pas pont-levis. Je ne savais pas quoi penser, c’était presque effrayant cette forteresse, quoi que si on se rappelait que jamais la forteresse n’était tombée, c’était moins surprenant. Je baissai la tête vers le précipice lorsqu’on passa par-dessus et j’avalais ma salive, c’était vraiment… haut. Les trois frères étaient déjà là et descendaient de cheval, Aalrika arriva, portant une robe cette fois avec quelques broches gravées tenant la fourrure qui couvrait ses épaules. La femme d’Eoran était là, habillé de manière plus nordique que la dernière fois, elle sourit à son époux qui descendit de son cheval pour s’installer dans son fauteuil roulant. Comment faisait-il ici ? Je notais brusquement quelque chose : pas de marche pour accéder au palais. Aalrika sourit et parla d’une voix forte :


« Bienvenu Saorsa, fille d’Isean ! Que ton retour ici soit doux ! Tu es la bienvenue ici !

- Reine Aalrika, ton hospitalité est reçue avec plaisir, la route a été longue. »

J’avais l’impression que c’était des formules rituelles, ma sœur descendit de cheval pour étreindre la reine qui se retourna vers mon père.


« Bienvenu à toi roi Wilkin, bienvenu à toi Princesse Liliraele. Que votre séjour soit doux, vous êtes la bienvenue ici. »


J’imitais ma sœur et descendis de cheval, mais je viens faire une révérence, Aolis s’approcha de moi pour me prendre par la taille et m’embrasser la joue. Je restais surprise, mais je ne dis rien, lui souriant juste un peu, mon père étant occupé à faire les salutations avec la reine. Tout semblait bien se passer jusqu’à ce qu’une exclamation de colère ne me fasse lever la tête. Sadralbe venait d’attraper le bras de ma petite sœur et la tirer vigoureusement vers lui, alors que, je supposais, que l’instant d’avant elle était… trop proche d’Itham ? Itham gronda de colère et Saorsa essaya de se dégager. Eoran et Akiyama s’avancèrent alors que quelques instants avant ils s’occupaient de la gestion des écuries. La reine s’interposa aussitôt.


« Que se passe-t-il ?! Itham ? Saorsa ? Chasseur ? »


Elle n’avait pas retenu le nom de Sadralbe ? J’en doutais fortement, mon père s’en mêla aussitôt.


« Sadralbe est le fiancé de Midelia, sa proximité avec Itham n’est pas… honorable pour elle. Ni pour lui.

- Pourquoi ? Saorsa ? Est-ce vrai ?

- Vrai, ils m’ont fiancé à Sadralbe. »


Aalrika plongea son regard dans celui de ma sœur qui lâcha une phrase dans une autre langue et la reine secoua doucement la tête avant de faire un signe de tête :


« Itham, amène Saorsa à sa chambre.

- Oui Mama. »


Le prince souleva son amie, ou son amour ?, dans les airs et la déposa sur son épaule avant de disparaître rapidement. Aolis gronda légèrement :


« Fiancer Saorsa… Et puis quoi encore ? »


Je tournai le regard vers le jeune homme qui secoua encore une fois la tête avant de passer ses doigts dans ses cheveux.


« Il y a un problème ? Fis-je avec inquiétude.

- Saorsa est liée à Itham. La fiancer est une insulte… »


Il secoua la tête et je notais brusquement qu’il ne sentait pas la peau de bête ou la sueur, mais bien un léger parfum boisé. Je ne m’y attendais pas du tout, mais il me sourit simplement avant de m’inviter à le suivre dans les couloirs.


En entrant, je compris pourquoi Eoran se débrouillait seul en permanence ou presque dans cet endroit : il n’y avait pas d’escalier, uniquement des pentes, plus ou moins douces, pour monter, je fronçai les sourcils :


« Il n’y a pas d’escalier ?

- Thyre Bergelottir n’a pas souhaité en construire dans son château. C’était après l’unification des tributs. Expliqua t-il.

- Il était également handicapé ?

- Pas la même maladie qu’Eoran, mais oui. »


Ceci expliquait cela… mais j’aimais bien, il me mena jusqu’à ma chambre et ouvrit la porte, la chambre était simple, avec de grandes tentures aux murs, des tapis épais au sol et un feu flambait dans la cheminé. Des malles étaient ouvertes, prêtes à accueillir mes affaires et une autre porte.


« La salle de bain. »


Je souris et poussai la porte, effectivement il y avait tout pour prendre soin de soi. Il me sourit simplement avant de se tourner vers la porte.


« Je vais vous laisser vous reposer et demander aux servantes de vous porter de l’eau chaude. »


Il me sourit avant de sortir, mais je l’entendis appeler son frère jumeau dans le couloir, je passai pour voir si ma sœur n’était pas là, non, par contre j’entendis une bride de conversation entre les jumeaux, même s’ils usaient de leur propre langue, ils la mélangeaient toutes les deux phrases à d’autres :


« Elle a encore perdu du poids…

- À ce point ? … … …

- Caenar… »


Je n’entendis pas la suite de la discussion, ils s’étaient éloignés, où était ma sœur ? Je refermai la porte avant d’inspirer profondément et m’approcher de la fenêtre, la forêt s’étendait, épaisse, sous autour du château, des montagnes au loin, le lac où ils devaient patiner l’hiver. Au loin, je pouvais distinguer la mer, ça avait l’air d’être un bel endroit en tout cas. J’étais sûre que j’arriverais à m’y faire sans aucune difficulté, enfin non. J’aurais beaucoup de mal, mais ma sœur serait avec moi, je ne la laisserais pas repartir… Je sursautai quand la porte s’ouvrit derrière moi. Les servantes du lieu, elles étaient plus grandes que moi et surtout avaient des sceaux emplis d’une eau visiblement chaude au vu des volutes de vapeur. Elles se dirigèrent vers la salle de bain pour les vider dans le grand baquet avant de revenir m’aider à ôter ma robe avant que je ne puisse me plonger dans l’eau chaude. Je poussais un soupir profond de soulagement, l’eau était très chaude, et ça faisait du bien, ça permettait à mes muscles endoloris après plusieurs jours de chevauché. La vapeur sentait bon, les servantes discutaient tranquillement, pas la langue de la cour, mais je reconnaissais, vaguement, quelques mots. Je les laissai faire, chanter également et prendre mes affaires pour les laver, la deuxième prépara une tenue pour ce soir. Elle enduisit ses mains d’une huile avant de les passer dans mes cheveux trempés. Ça sentait bon… Je me laissai coiffer et laver sans rien faire. J’aimais ça, c’était plus qu’agréable de se laisser porter par des doigts experts. Je crois que je finis même par m’endormir un peu, et la servante due me secouer pour que j’ouvre les yeux avec difficulté. Elle m’aida à sortir du bain, enduisit ma peau d’une lotion sentant bon sans que je ne parvienne à mettre le nom de la plante. Je passais une tenue du Nord pour la première fois, une robe aux genoux, d’un joli vert avec des broderies géométriques et une broche de métal ornait ma poitrine pour retenir des fourrures. Les manches étaient longues cette fois avec des bas. La servante vérifia les plis de ma robe avant qu’on ne frappe à ma porte. Je me trouvais vraiment jolie dans la robe. C’était une robe assortie aux couleurs d’Aolis, j’avais remarqué que la teinte était semblable à celle de la tunique qu’il portait le jour de la fête dans le sud.


« Vous savez la couleur de la robe de Saorsa ? »


La servante me regarda avec un air surpris et presque hésitant.


« Saorsa ? Rouge et noire sans aucun doute. »


Pourquoi était-ce si évident pour elle ? J’avalai ma salive.


« Il s’agit des couleurs de sa meute ?

- Plus ou moins oui, c’était surtout les couleurs préférées de sa mère. Les meutes n’ont pas vraiment de couleur comme les nobles.

- Je vois. Soufflais-je. »


Je caressais le tissu épais de la robe avant qu’on ne frappe ma porte, Aolis entra, vêtu d’une autre tunique verte, cette fois plus épaisse, avec une chemise également et des bracelets de métal torsadé, une broche gravée également tenait une fourrure sur son épaule.


« Altesse Liliraele, si vous voulez bien venir. »


Il me sourit simplement et je viens prendre son bras pour le suivre. La grande salle était emplie de chef de tribus et de monde. Il y avait également la délégation de mon père et des musiciens au fond, je reconnus les bardes de l’auberge qui jouaient déjà un fond de musique dans cette ambiance étrange. De lourdes tentures pendaient aux murs, les poutres soutenant la haute charpente elle aussi sculptée. C’était beau… vraiment beau. Je glissais une mèche de cheveux derrière mon oreille.


« Cela vous plaît ? »


Je levai les yeux vers Aolis qui me dominait largement en taille.


« Beaucoup oui. »


Il me sourit simplement avant de me guider gentiment jusqu’à ma place, Eoran discutait avec Saorsa qui portait effectivement une robe nordienne rouge et noire. Je la vis rire, sans l’entendre à cause du bourdonnement, elle avait l’air heureuse et dans son élément, c’était le plus important. Sadralbe était juste à côté et il écoutait avec attention. Itham s’approcha et vient embrasser la joue de ma petite sœur avant de lui chuchoter quelque chose. Elle rougit ! Ma sœur rougit ! Mais ce fut tout et Itham s’assit à la droite de sa mère. Cette dernière se leva et claqua dans ses mains, le silence se fit presque instantanément, elle observa chaque personne avant de sourire :


« Je n’aime pas les longs discours. Alors, je ne ferais que souhaiter la bienvenue à nos futurs alliés du sud et les remercier de leur venue. Santé à tous puis Tungl, Lycannos, et le Phénix veiller sur nous. Bon appétit. »


On leva tous en cœur nos verres quand la reine se rassit. Ce n’était pas du vin, mais de la bière, c’était agréable, et la soirée se déroula dans la bonne humeur, malgré une tension grandissante entre Itham et Sadrable.


Nous étions à deux jours du mariage, assises à discuter avec d’autres dames du nord, Akiyama, et ma sœur, surveillée par Sadralbe, quand le son grave d’une corne se fit entendre. Ma petite sœur bondit vivement à la fenêtre et l’ouvrit en grand, le son de la corne emplis la pièce pendant encore quelques secondes puis un cri monta des remparts.


« Les loups ! Les loups arrivent ! »


La réponse ne tarda pas venant d’Aalrika elle-même :


« Ouvrez la porte et sonnez le tambour ! »


Saorsa était immobile, les yeux écarquillés, son regard rivé sur l’entrée du château, à nouveau le cor sonna et j’entendis un mot soufflé entre ses lèvres :


« Père… »

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