Chapitre 26 - Liliraele

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En quelques heures, ma petite sœur s’était transfigurée, elle s’était brusquement ouverte, elle discutait vivement, riait et était très proche des trois garçons… C’était la première fois que je la voyais si heureuse après tout, les trois princes semblaient vraiment heureux de la revoir. Aolis m’avait adressé quelques mots polis et un beau sourire, mais visiblement il était toute à sa joie de revoir son amie, qui pourrait lui en vouloir ? Pas moi, ça me faisait plaisir de la voir aussi souriante, rire même, je m’en rendais compte en l’écoutant qu’elle parlait de plus en plus vite passant d’un dialecte du nord à un autre sans aucun problème. Les autres la suivaient, mais pas moi, Akiyama marchait aux côtés d son époux. J’avouais avoir été surprise en le voyant handicapé, mais il semblait s’en moquer et en être fier. Étocle avait l’air bien attrapé et j’étais contente qu’on le mouche un peu. Ça faisait du bien.

Je dus interrompre le moment pour lui signifier qu’il fallait aller se changer un peu pour le repas. Elle accepta et se laissa faire sagement, m’entraînant joyeusement dans mes appartements. C’était tellement… surprenant de la voir heureuse, rire et s’exprimer. Enfin, une toilette plus tard, elle m’aida à lacer ma robe et arranger mes boucles sur mes épaules en glissant les rubans à l’intérieur. Puis elle s’occupa d’elle-même, refusant mon aide d’un signe de tête, sa coiffure était complexe, rassemblant les mèches de cheveux de devant en deux tresses qu’elle ramena en arrière avant de glisser une longue mèches à l’intérieur pour former une nouvelle tresse épis entourée d’une autre petite tresse et deux torsades retenaient d’autres de ses mèches autour de la tresse principale. Les rubans blancs tranchaient avec ses cheveux sombres, mais elle semblait vraiment très différente dans sa robe, elle avait d’ailleurs hésité à mettre des bas… et finalement elle en avait pris des noirs, sa robe lui tombait parfaitement, les rubans et la coiffure la mettait en valeur, sa peau tannée par le soleil faisait ressortir ses yeux bleu clair. Elle ne portait pas de bijou, visiblement ce n’était pas très important pour elle, je ne saisissais pas encore toutes les subtilités de son royaume. Je souris tranquillement quand elle enfila ses ballerines, elle m’avait donné le nom et elle s’étira longuement. Elle était restée presque entièrement silencieuse durant toute la préparation, Sadralbe était resté à l’extérieur de la pièce, mais je sentais une drôle d’agitation dans les couloirs…  Est-ce que c’était dû aux nordistes qui étaient vifs et quand même nombreux, même si certains refusaient de dormir à l’intérieur et avaient monté des tentes à l’extérieur, leur manière de vivre sans aucun doute. Enfin, pour l’instant on devait se rendre au banquet.


Est-ce que c’était dû aux nordistes qui étaient vifs et quand même nombreux, même si certains refusaient de dormir à l’intérieur et avaient monté des tentes à l’extérieur, leur manière de vivre sans aucun doute. Enfin, pour l’instant on devait se rendre au banquet.

J’avouais m’être attendue à des fourrures, et même la reine ainsi ! Mais non, les trois frères, Eoran avait un autre fauteuil qui semblait beaucoup plus léger et maniable. Mais lui et ses frères portaient des pantalons noirs brodés d’argent, de longues tuniques colorées, fendues sur les côtés et entièrement brodés de motifs géométriques, sans manches par-dessus une chemise proche du corps également brodée finement. Eoran portait une tunique bleue avec des broderies aux différentes nuances de la même couleur avec également d’autres en or, même principes pour Aolis mais en vert et pour Itham c’était du rouge. Le laçage pour referme la tunique était non pas juste sous la gorge mais le long de l’épaule gauche, et je notais brusquement que ma petite sœur avait la même ouverture. La reine Aalrika portait également une robe de la même longueur que celle de ma cadette, mais grise et violette, brodée lourdement, avec des manches. Elle aussi elle avait des ballerines. Tous allaient danser ou quoi ? Les garçons avaient également glissé des rubans dans les cheveux tressés également, de la même couleur que leur tunique, pourquoi Saorsa n’avait-elle pas fait pareil ? La reine avait rassemblé ses cheveux en tresse qui entouraient une espèce de couronnes faîte de lacets en cuir avec des bijoux en métaux. Je voyais quelques bracelets aux poignets, mais si ce n’était le pendentif que tous portaient d’un rouge inquiétant et les poignards richement décorés qui pendaient à leur ceinture, c’était vraiment très léger…

« Les poignards, c’est pour quoi ?

- C’est des poignards d’identité en quelque sorte, chacun est unique, lié à soi. Ils seront tirés ce soir pour danser. Et pour rien d’autre.

- Danser ? »

Elle ne me fit qu’un sourire malicieux sans rien dire d’autres. Aalrika s’approcha, me salua et observa les rubans de ma sœur :

« Des rubans blancs ? »

Ça je l’avais compris, Aolis nous rejoignit presque en courant, Itham et Eoran suivirent plus calmement. Et avant que je ne comprenne comment, les rubans dansèrent entre eux, ceux blancs se glissèrent dans les cheveux des trois garçons, et elle se retrouva paré de ceux, bleus, vert, et rouge des garçons. Elle semblait particulièrement fière de cela, Itham glissa à nouveau sa main dans la sienne et elle vient déposer sa tête contre son épaule. J’entendis le grondement méprisant de Sadralbe, Itham se tourna et fit mine d’ouvrir la bouche, elle lui écrasa le pied et il jura avant qu’Aolis ne se glisse près de moi.

« Princesse Liliraele. »

Il n’avait que très peu d’accent, presque aucun, une simple pointe ! Ce n’était pas étonnant quand on voyait la facilité de Saorsa à apprendre les langues, d’ailleurs elle discutait avec la femme d’Eoran qui semblait heureuse d’être ici. Je souris à Aolis.

« Prince Aolis, je suis contente de vous voir.

- Vous êtes en beauté ce soir. Vous voulez un de mes rubans ? »

Il tendit la main vers les siens, il avait toujours un grand sourire, est-ce que parfois il ne souriait pas ? Je fronçais très légèrement les sourcils :

« À quoi correspondent ces rubans ? »

Je notais brusquement que comme ma petite sœur, et comme tous les nordiens, il avait des tatouages sur la clavicule j’en voyais qu’un tout petit morceau.

« Que représentent vos rubans brodés ? Repris-je sans lui avoir laissé le temps de répondre. Et pourquoi votre mère n’était-elle pas contente de voir ceux en blanc de Saorsa ?

- Nos couleurs, avec notre lignée. Un ruban blanc signifie la solitude, le deuil aussi, l’absence d’une meute pour elle également. Vous connaissez le langage des fleurs ?

- Pas du tout. »

Le deuil, la solitude, pas de meute… Je ne pouvais pas affirmer que ma sœur avait été entourée ici, quant au deuil et à la meute…

« Sa mère ? Et sa meute ?

- Isean est morte il y a plus de dix ans. Sa meute d’origine a disparu peu après. »

Je sentis une pierre tomber au creux de mon estomac. C’était cela qu’elle avait affiché ? La mort de sa mère ? Sa meute ? Mais cela… Personne ne savait rien ! Personne ne connaissait sauf… tous les nordiens.

« Et l’échange des rubans ?

- Nous partageons sa peine. Et je dois aussi porter vos couleurs. Permettez ? »

Il ôta délicatement un de mes rubans pour l’échanger avec le sien. Je le laissais faire sans rien dire, c’était… étrange comme situation. Il ne me fit qu’un clin d’œil en finissant de glisser son ruban dans ses cheveux et de rejoindre son frère, j’eus un petit pincement au cœur en voyant ma petite sœur si à l’aise avec eux… Elle semblait m’avais complètement oublié… Est-ce que je serais jalouse ? Non ! Non, bien sûr que non ! Elle se tourna vers Aolis et elle rit à nouveau, Aalrika observait ses fils avec attention, je me dirigeai vers elle, elle inclina la tête vers moi :

« Princesse.

- Majestée, je suis contente de voir Saorsa si heureuse.

- Je suis heureuse de la revoir tout court. »

Aie… j’avançais sur un terrain glissant ! Mais… quand même ! Je ne pouvais pas… reculer. J’avalais ma salive en me tenant très droite, elle m’observa avec attention, détournant les yeux de ses fils et de celle que je supposais être sa fille de cœur.

« Elle n’a que très peu parlé de sa vie au royaume des Montagnes et des Neiges. J’ai appris il y a peu qu’elle vous connaissait et qu’elle était amie avec vos fils. Est-ce qu’elle a toujours été si silencieuse ?

- Saorsa ? Elle pouvait l’être oui, mais elle adorait discuter, chanter et… Elle ressemble beaucoup à sa mère. »

Elle inclina la tête avant de poser une main sur mon épaule sans rien dire, mon père venait d’arriver, et je notais quand même une importante foule de Nordien, ainsi que trois femmes debout près des prêtresses, fine, les cheveux relevés en un chignon très strict, des jupes très légères et des chemises moulantes, un ruban entouré leur chignon. Je me penchai vers ma sœur :

« C’est qui ?

- Des Danseuses. »

Elle ne m’expliqua rien de plus, Aalrika réclamant sa présence à leurs côtés. Mon père serra les mâchoires, Sadralbe gronda à nouveau, mais elle s’installa près de Itham sans même le regarder, Aolis s’installa près de moi sans rien dire. En quelques minutes les nordiens reprirent vivement leur conversation et j’essayais de suivre tranquillement, Saorsa rît et je notai une petite fossette creuser ses joues. Elle mangeait lentement mais avec appétit et surtout Itham la couvait d’un regard attentif, j’avais loupé quelque chose entre eux ? Quoi qu’elle ne m’eût jamais parlé de lui. Elle restait secrète, Aolis me faisait aussi la conversation, et sur les autres nordiens présents, ils se mêlaient à tout le monde sans trop de difficulté. C’était étrange, autant la famille royale restait distante et presque enfermée sur elle-même, autant les autres c’était tout l’inverse, ou presque. Certains restaient méfiants… C’était un équilibre particulier si on pouvait dire cela. Les prêtresses n’avaient pas mangé, assise à l’écart, elles discutaient avec les Danseuses, fines et élancées elles étaient fascinantes, chacun de leurs gestes était emprunt de grâce et de précision, leur regard de biche semblait capter la moindre imperfection. Les invités avaient fait une prière à leur déesse et au phénix, et contrairement à ce que j’avais pu croire, aucune dague n’avait été tiré. Donc ce n’était pas maintenant ?

Au moment où les tables s’écartèrent la reine, qui discutait avec ma mère fit signe à certains de ses sujets qui s’éclipsèrent pour revenir avec leurs instruments de musiques. Vièle, tambourin, luth et cithare, des flûtes aussi, bois ou os de ce que je pouvais voir, un instrument à vent aussi, un bloc de bois avec des trous à la verticale, le lur, un hautbois. Je vis aussi une lyre, un drôle d’instruments à trois corde sur un cadre taré, un autre qui ressemblait à un violon plus rond… Je ne les pensais pas si musicien ! Mais visiblement si. Ma mère et Aalrika discutaient vivement, elles s’entendaient bien ! Bien plus qu’avec mon propre père, ce n’était pas étonnant, je crois qu’il n’aimait pas sa proximité avec ma sœur et encore moins celle avec ses fils. Aalrika se redressa lentement et sourit, sa voix grave résonna dans la salle.

« Permettez-nous d’appeler à la bénédiction de nos dieux sur les fiancés. Les Danseuses vont appeler Tungl et le Phénix pour les inviter à se pencher sur le couple. »

Mon père hocha la tête et les danseuses s’approchèrent, elles avaient de drôles de chaussures. Je vis Itham soulever ma sœur pour l’installer sur son épaule. Elles attendirent que la musique commence pour se mettre à danser. Je n’avais jamais vu des danses ainsi. Elles évoluaient en parfaite harmonie, se hissant sur l’extrême pointe des pieds, elles tournaient, sautaient en accord parfait. J’avais l’impression que ce n’était pas réel, les prêtresses restaient à nouveau en retrait en fixant leur élèves ? Je ne savais pas ce que c’était, mais elles semblaient féeriques ! Elles semblaient presque voler ! Sauts, pirouettes, attitudes, arabesque… Ça semblait si facile ! J’applaudis bruyamment quand cela se finit, notant au passage une fine pellicule de sueur sur leur corps. Brusquement Saorsa se retrouva près de moi et les hommes et les femmes se séparèrent. C’était le moment de danser nous-même ? Je me sentais brusquement, gauche et malhabile. Saorsa posa une main sur mon épaule et me souffla :

« Aolis va venir chercher une danseuse pour Itham puis il viendra te chercher, le nombre de doigts qu’il te montre va indiquer le nombre de danse qu’il fera avec toi. »

Hein ? Bon d’accord. Aolis semblait brusquement plus sérieux, mon père s’approcha également, Aalrika était derrière ses fils et soutenait son regard sans peur. Les jumeaux discutaient un peu, Itham passa son regard sur nous et j’eus presque un frisson, il semblait si grave ! Si sérieux ! Aolis s’élança et il me semblait autant gracieux que les danseuses ! Il sauta dans les airs, tournoya fit quelques pas de danses et une nouvelle pirouette avant de s’arrêter devant ma sœur, lui offrant une main, elle danserait jusqu’au bout de la nuit, elle le savait et un large sourire étira ses lèvres. Elle l’accompagna, sautant en faisant presque des grands-écarts dans les airs, tournoyant sur elle-même et Itham l’attrapa au vol, l’entourant de ses bras, passant ses doigts dans ses cheveux. Aolis revient, dansant à nouveau, prince élégant et il m’offrit trois doigts et m’entraîna tranquillement sans danser autant qu’avec ma sœur, après tout, je n’étais pas aussi douée qu’elle.

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