Chapitre 18 - Sadralbe

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Qu’on ne me fasse pas croire que cette petite saloperie de loup-garou se soit faite capturée, ou enlevée ! Oh que non ! Je n’y croyais pas, pas du tout ! Avec la tempête qu’il y avait eu hier soir, je pouvais dire adieu à la moindre marque. C’était presque sa marque de fabrique de s’enfuir pendant les tempêtes… Du moins cela faisait deux fois qu’elle me faisait le coup. J’avais refermé soigneusement la porte de sa chambre avant de plonger la main dans ma poche pour en tirer quelques mèches de cheveux, sa dent et même un fragment de tissu imbibé de son sang avant de fermer les yeux, à genoux au milieu du chaos. Je me mis à murmurer des prières et des formules avant de me plonger en transe, les fluides me lièrent brièvement à la louve. Je ne vis que l’obscurité. J’attendis quelques minutes, mais rien pas de mouvement. Je rouvris les yeux et rangeai ses affaires dans une bourse à ma taille. Elle dormait, donc je ne devais pas perdre de temps ! Elle était faible, elle n’avait pratiquement pas mangé depuis plusieurs mois, réellement mangé et même si j’avais arrêté les drogues, elle s’était elle-même taillée des tendons. Elle devait être épuisée. Cependant, une chose était sûre : elle n’avait rien prévu et sa sœur, dont elle avait empoisonnée l’esprit, ne pouvait pas me le cacher : cette louve avait fui d’elle-même. Et malheureusement elle dormait. Mais cela me permettrait de la retrouver rapidement, même si les chiens seraient inutiles à cause de la pluie, fatiguée comme elle était elle ne pourrait pas être bien loin. Peut-être même dans le parc du château ?

Je sortis de la chambre et partis prendre mes affaires, le roi avait été clair : je ne revenais pas sans sa bâtarde. Et je ne comptais pas rentrer sans elle non plus. Elle venait de toucher à une chose que je ne supportais pas : mon honneur de dompteur chasseur. Elle s’était jouée de moi ! Je sortis de ma chambre, ma pipe entre mes dents, mon sac sur l’épaule, j’avais besoin de toute ma clarté, mais surtout d’énergie, je chargeai mon cheval, voyant au loin la reine Gaïa et sa Liliraele. Maudite gamine à l’esprit embrouillé… Je chargeais mon cheval qui s’ébroua avec colère, sentant ma propre humeur, avant de grimper dessus, j’allumai ma pipe et aspirai une bouffée d’herbe, mes sens s’éclaircir presque brusquement alors que je le talonnais brusquement pour le faire partir. Elle n’était pas dans le parc de son père. Même pas une trace de patte ! Non, mais il fallait l’avouer c’était une jolie manière de se carapater comme une chienne. Je sortis rageusement du palais avant de faire le tour, mais à nouveau aucune trace. Maudite tempête ! Elle ne serait pas dans la forêt, elle allait probablement partir au sud ? Comme toujours. Non, elle ne serait pas si stupide. Dans son état… Un bon chasseur se met à la place de sa cible. Je fermais les yeux en arrêtant avec violence mon cheval. Où irais-je si j’étais elle ? Le Nord. J’aurais tendance à aller au Nord. Elle voulait tant rentrer chez elle après tout cela… J’irais au Nord, vers le Royaume des Montagnes et Des Neiges. Elle aurait l’avantage, mais uniquement du terrain, elle était trop faible pour survivre aux conditions de voyage… Je me mordis les joues avant de sortir la carte et de regarder les routes qu’elles pourraient prendre. Elle coupait toujours à travers champ si bien que…

« Allez ! »

Je fouettais à nouveau la croupe de mon cheval pour prendre la direction que j’avais supposée. Elle était partie d’un coup de tête, brusquement, pas d’affaire. Elle allait devoir voler pour ne pas mourir, et se nourrir aussi. Ça ! Ça serait un problème, elle avait normalement un régime très particulier pour éviter toute rébellion. Même si en ce moment je ne l’avais pas drogué, elle était si faible que je l’aurais tué. Je me mordis les joues, j’avais été stupide ! Elle avait dû se remettre bien vite de tout cela, et son explosion et son état n’avait dû durer que quelques jours, mais elle avait continué à jouer le jeu. La garce ! La Garce ! Je fouillais les environs dans nord du château, rien ! Elle était partie quand ? Je tirais mon cheval au milieu des buissons avant de tirer un mouchoir tâché de son sang et de fermer les yeux pour regarder par les siens. Le ciel était d’un beau bleu, avec quelques nuages, je voyais des vrilles de plantes, mais pas avec attention, elle regardait le ciel simplement.

Je coupais court. Elle le faisait exprès ?! Non, calme-toi Sadralbe, elle ne connaissait pas tes pouvoirs, elle ne savait pas de quoi tu étais capable et surtout elle ne pouvait pas sentir que je venais voir par ses yeux. Je continuai toute la journée dans ma direction, m’arrêtant parfois pour regarder dans ses yeux. Des buissons, des champs, le ciel, parfois l’obscurité. Pas de village ou même d’habitation. Il n’y avait pas de village. Elle s’éloignait complètement des zones d’habitations. Je regardai ma carte, l’est ou le nord. Elle n’aurait rien à faire dans l’est ce petit monstre, le sud c’était trop logique elle savait que je maîtrisais trop bien ce genre de terrain, et l’ouest était très peuplé. Donc nord ou est. Et le nord serait le plus logique. Je la vis attraper un poisson dans une minuscule mare, les mares grandes comme une flaque de pisse n’étaient pas sur les cartes, et elle le dévora. Merde, elle commençait déjà. Je vis par contre qu’elle ne portait pas grand-chose : elle était pieds-nus avec une chemise sale et un pantalon de toile. Si la moindre personne la voyait, elle s’en souviendrait, pas encore plus que lorsque c’était une petite fille : mince et gracile, fragile… elle serait forcément remarquée. Pas parce qu’elle était jolie, mais juste parce qu’elle sortirait de l’ordinaire de ces bouseux pas capable de se souvenir de quand datait leur dernier repas. Je m’assis à la table d’une auberge en posant des questions. Savait-on jamais ! Mais rien…

Je ne pouvais pas me permettre de laisser cette garce partir ! J’avais fait toute ma réputation sur la chasse aux lycans, je venais d’une petite famille noble, mon bâtard de père avait épousé ma mère venant d’un coin paumée des îles du sable et du soleil, c’était par elle que j’avais appris bien des connaissances, mon père n’avait jamais accepté ma proximité avec ma mère, et pourtant ses connaissances en magie, en drogues, en plantes, m’avait permis de survivre aux épreuves ingrates de mon père. Que j’avais fini par tuer devant ma mère. Je n’avais jamais compris pourquoi elle l’avait épousé… J’avais tué mon père, avant de partir faire ce pourquoi j’étais là : purger le monde des lycans et de leurs maudites engeances. Ma mère avait lu mon avenir dans les entrailles de mon père et me l’avait dit : j’obtiendrais une reconnaissance dans le monde entier grâce aux loups garou et à leur massacre. C’était con que j’avais dû tuer ma mère après, elle voulait beaucoup trop me contrôler, mais il fallait l’avouer elle avait résisté longtemps à la torture. À quatorze ans j’avais commencé ma vie de chasseur et trois ans après, j’étais rentré au service du roi. Je fermais à nouveau les yeux pour plonger vans ceux de Midelia.

Elle courrait visiblement, assez vivement dans les champs, toujours pieds nus et la même tenue, tâchée d’herbe, de sang et d’autre chose. Elle voyait parfaitement bien dans la nuit, mais ce n’était que broussailles, des arbres. Rien du tout. Rien de bien intéressant. Elle regarda les étoiles, s’arrêtant un bref instant avant de reprendre sa course. Je clignai à nouveau des yeux pour réintégrer mon corps. Merde ! Je n’avais pas accès assez de connaissance pour réussir à prendre le contrôle autre que ses yeux… Il fallait que je fasse avec. Je repris la carte avant de la détailler de mon mieux pour essayer de déterminer où elle allait. Elle avait toujours fait très attention à ses chemins. Des champs, des broussailles et j’avais beau connaître beaucoup de plante, je n’étais pas sûr… Elle était à deux jours de moi, alors la végétation n’avait pas beaucoup changé, avec ça je ne pourrais pas définir avec précision où elle était. Le nord sûrement, pourquoi prendre une autre direction ?

La jambe de mon cheval était plus qu’enflé, ses veines ressortaient avec laideur et il ne pouvait pas poser le membre au sol. Et ici, pas d’autres cheval que le mien, l’aubergiste n’avait pas de monture et partir à pied serait contre-productif. Attendre et espérer que ça soit pas trop grave, ou le traîner au prochain village et trouver un nouvel animal ? Je restais enfermé dans ma chambre, laissant le soigneur s’occuper de ma monture. Je plongeais dans les yeux de la louve à nouveau, elle dormait, mais je ne lâchais pas, cherchant à rentrer dans son corps, mais je ne pus qu’attendre qu’elle ouvre les yeux. Elle s’était trouvé une espèce de terrier… ou alors elle avait creusé ? En tout cas elle vira ses habits pour se nettoyer dans un ruisseau, elle n’avait pas l’air très chaude, l’eau, mais elle y allait franchement se frottant avec de la mousse avant de reprendre ses vêtements pour les remettre et repartir. Rapide… Ça elle l’était vraiment, elle s’éloignait toujours rapidement. Il eut un village au loin, mais elle s’en détourna complètement, elle évitait les villages maintenant ? D’habitude elle essayait de s’y faufiler, voler quelques vêtements, de la nourriture, ou même avec un luth elle essayait de se faire un peu d’argent. Mais pas là… est-ce qu’elle voulait retourner complètement à la vie sauvage ? Possible aussi… Quoi que… est-ce que cette immonde bête avait-été, une fois dans sa vie, civilisée ?

Je clignais des yeux en entendant des coups frappés à ma porte. Je me sentais nauséeux, j’avais trop tiré sur la corde et je devais faire attention, très attention. Je ne pouvais pas non plus être épuisé et ne plus pouvoir me servir de mes dons et de mes pouvoirs et malheureusement, je devais être en forme pour maîtriser la bête. Mais j’allais devoir attendre… Encore et toujours attendre. Il n’y avait pas le choix.

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