Le dormeur de la fromagerie

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C'était un beau matin de juillet, les rues étaient animées et l'ambiance joyeuse dans cette petite ville du Dakota du Sud.

William, un charmant et dodu petit fromager faisait son labeur à l'intérieur de son échoppe transmise de père en fils. Le sourire aux lèvres, il emballait un morceau de son produit-phare le "little ol' forest", puis le donna à son client en disant:

- Voilà pour toi, Peter ! Avec un léger gout de noisette comme tu l'aimes. Et puisque t'es un ami, je t'en ai proportionné un peu plus que d'habitude, cadeau de la maison ! Mais chut, faut pas le dire, chuchota-t-il avec camaraderie.

- Merci Will' ! T'es vraiment un bon gars ! Je te revaudrai ça !

- Mais non ne t'inquiètes pas pour ça, lui répondit l'artisan en balayant l'air de sa main. Sinon, comment vont Lucy et les enfants ?

- Très bien ! Elle te passe le bonjour, d'ailleurs !

Peter, un petit gringalet au cheveux noir, pris une pause pour regarder sa montre. Puis, il reprit la discussion, un poil paniqué:

- Je suis désolé, mais je dois vraiment y aller ! Je suis presqu'en retard pour le souper et tu connais ma femme. Pour elle, un souper c'est en famille ou rien d'autre !

- Bien sûr, ne t'en fais pas pour ça. Allez, file ! le rassura William, complice.

- Je te revois mercredi, à la même heure ! À plus ! conclut le petit homme en se sauvant par la porte.

Le marchand lui fit un petit au revoir de la main, même s'il savait que son ami ne le voyait déjà plus.

Respirant la bonne humeur, le fromager enfourna la monnaie dans la caisse, paisible. Quand soudain, il entendit un son étrange dans son commerce. Il s'agissait d'un ronflement pour le moins sonore ! Et tout ça dans sa réserve !

Un brin affolé, il se dirigea vers la source du bruit. Seulement, au pas de la porte, un "crack !" se fit entendre, suivi de quelques mots à en faire pâlir le prêtre.

Il ouvrit la porte, paniqué, puis se figea. Là par terre tous ces beaux fromages. Dont un de 80 ans, fait par son, regretté, bon vieux grand-père Bruce ! À côté d'eux, la table qui les soutenait, maintenant brisée en deux, à laquelle se raccrochait un jeune rouquin.

- Mais qu'est-ce que tu fais ici ? C'est toi qui viens de ruiner mes belles meules, espèce de petit chenapan ?! questionna-t-il, dévasté.

 D'un geste vif, William avança et prit le jeune adulte par le bras solidement en veillant toutefois à ne pas lui faire de mal. L'homme n'était pas une brute tout de même !

Il le ramena devant son comptoir, furieux contre le roux. Mettant ses points contre ses hanches, le marchand lui demanda des explications :

- C'est que... vous voyez, mon bon monsieur, hier soir, j'ai un peu abusé de la robine de la Grande Margot ! Et j'étais un peu fatigué et encore le nez rouge. Alors, je me suis couché dans ce que je pensais être ma couche, sauf que ce n'était pas ma couche...finis le dormeur, gêné.

Calmé par ses dires qui lui semblaient honnêtes, le dodu homme proposa :

- Écoute, tu ne m'as pas l'air d'être un mauvais gars. Donc, ce qu'on va faire, c'est que tu vas me rembourser les dégâts que tu as causé. Demain, tu reviendras ici et je te donnerai la facture à payer. Tu auras jusqu'à Noël pour finir de me rendre mon dû. Après ça, on n'en parle plus. Ça t'as l'air convenable ?

- Oui, merci ! Vraiment désolé pour les dégâts ! Je vous promets, je vous rembourserai et vous oublierez jusqu'à mon existence ! Encore merci et désolé ! fuit le coupable, laissant sa victime pantoise.

Chose dite, chose faite, le fromager donna la facture au vieil adolescent et n'en entendis plus parler depuis.

Quelques mois sont passés depuis et une fine neige couvrait le toit de la bâtisse. L'échéance approchait à grand pas et le dodu homme exerçait paisiblement en attendant son argent.

Heureux de l'approche des fêtes, qu'il prévoyait passer avec son ami et sa famille, William chantonnait des morceaux de Noël

Puisque ce dernier allait justement arriver sous peu, l'artisan décida de prendre de l'avance sur sa commande. Ainsi, il pourrait discuter un petit bout avec lui.

L'un des produits n'étant pas encore en vitrine, l'homme se dirigea vers sa réserve.

Seulement, en y entrant, il découvrit que le drame s'était répété ! Mais cette fois là, c'était peut-être pire car, les produits ruinés étaient des "little ol' forest".

Ni une ni deux, furieux et trahi, il réveilla en sursaut le criminel, le traina devant la sortit, et lui gronda:

- Espèce de sal petit ! Je t'ai donné une chance et fait confiance, et toi, tu récidives !

- Monsieur je peux tout vous expliquer ! tenta de se dépêtrer le dormeur.

- Oh ! mais ça, j'y compte bien. La prochaine fois qu'on se voit petit, c'est au tribunal de la ville. Surveille bien tes courriers, ils vont sûrement te faire part de la date par la poste., conclua-t-il, grincheux.

Trois semaines s'écoulèrent et les fêtes passèrent après cette confrontation. De doux petits flocons tombaient paresseusement sur le toit de l'hôtel de ville.

C'était à l'intérieur que se trouvaient le fromager et Peter. En attendant le jugement qui allait être rendu, l'ami et client tenta de rassurer le bougre, qui se sentait quand même un peu coupable d'en être arrivé à un telle extrémité.

- T'en fait pas Will', tu as fait le bon choix. Ton commerce est ta seule source de revenu, c'est normal que tu veuilles le protéger ! Et à cause de ce sal garnement, tu aurais pu le perdre. Mais ne t'inquiète pas, je suis certain que le jugement de la cour va t'être favorable.

William ne put qu'hocher la tête aux dires du noiraud. Sa fromagerie était ce qui lui permettait de vivre, le dormeur devait payer !

Quelques minutes plus tard, le juré repris place et annonça le verdict :

- En vertu des pouvoirs qui me sont accordés par la Constitution Américaine et les lois du Dakota du Sud, je déclare l'accusé, Tom Taylor, coupable ! clama le juge en frappant de son marteau. De par ce fait, en ce jour de 7 février 1916, la cour le condamne à rembourser au plaignant, monsieur William Clarke, 250 $ ainsi qu'à du travail communautaire pendant un an.

Ledit plaignant était soulagé, il recevra enfin son dû et ce Tom apprendra sa leçon.

Enfin, ça, c'était ce qu'il pensait. William croyait vraiment pouvoir continuer sa vie tranquille et agréable. Mais non !

Car, ce petit manège se répéta une troisième fois le mois suivant. Et c'était le tour qui faisait sauter le tire-bouchon !

Il avait cru ce problème résolu ! Vraiment ! Mais encore une fois sa réserve fut saccagée par le dormeur.

Quand William la découverte à nouveau, c'était rouge qu'il avait vu !

Cette fois-là, c'était au tribunal fédéral de son état que le commerçant alla se plaindre. Ce n'était pas comme s'il voulait ruiner la vie du garçon, mais sa patience avait des limites qu'il avait dépassé. Et puis, on dirait bien qu'il n'apprendrait jamais si on n'employait pas les grands moyens.

C'était pour cela, qu'en attente du procès, la victime avait harcelé les députés, les juges et tous les hommes de loi avec une idée qu'il avait eu: Un tout nouveau projet de loi !

Avec celui-ci, il garantirait sa paix et celle de tous ses confrères.

Les mois s'étaient écoulés, près d'une année, et une nouvelle, qu'il trouva fabuleuse, fut annoncée au journal local.

Ce fut Peter qui la lui annonça :

- William ! Will', il faut que je te parle ! T'as lu le journal ce matin ? demanda essoufflé le père de famille.

- Non, qu'y a-til ?

- Une nouvelle loi a été votée ! Maintenant on ne peut plus dormir dans une fromagerie au Dakota du Sud ! C'est plutôt bon pour tes affaires, non ?

- Vraiment ? Mais c'est merveilleux ! se réjouit le commerçant.

Le mois plus tard, l'ultime procès eut lieu. Tom n'a pas été mis aux fers puisqu'il a commis ses crimes avant la nouvelle règle gouvernemental, mais a pris un amande salée et un très sérieux avertissement. Prochaine infraction, direction prison !

Ça fit un bien fou à William qui, quelques années plus tard, repensa à cette histoire avec un sourire aux lèvres. Car, maintenant, son échoppe n'avait plus rien à craindre. Tout comme celle de ses confrères et rivaux commerciaux à travers tout le Dakota du Sud.

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