chap 4 provisoire

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Après un temps, elle se lassa de jouer du galoubet. Dès l'instant où elle stoppa les éclats de voix et les chamailleries reprirent. Les trop pleins se faisaient vider sans vergogne de l'établissement, et les serveuses se faisaient harcelées d'intentions grivoises. Loïs se saisit de son vièle sans prêter attention au chaos que générait le mutisme de son instrument et lui porta le même intérêt qu'à son galoubet. Le vièle avait été épargné des bêtises de Brochette qui avait la charge de le porter, la troubadour l'accorda et bientôt elle commença à en jouer. Comme la fin d'après-midi était bien avancée, elle choisis des airs plus joyeux que précédemment. Tout naturellement, les éclats de voix se tarirent une nouvelle fois, il n'y avait pas besoin d'être un connaisseur pour apprécier la musique de la troubadour, il suffisait qu'elle joue. Elle avait ce pouvoir de fasciner quand elle jouait qu'elle minimisait, pour elle, cela venait d'être une artiste accomplis. Et c'était en partie vrai, mais il y avait aussi quelque chose d'envoûtant quand elle performait, quelque chose qui poussait au respect et à l'attention de tout les êtres, parfois aussi anciens que les forêts elles-même.

Au soir, après avoir échauffer sa voix, Loïs accéda enfin aux demandes de son public déjà conquit par ses performances musicale de l'après-midi. Deux tables avaient été disposées près d'une des fenêtres, l'une et l'autre de chaque côté de celle-ci, si bien que la troubadour du haut de sa petite taille passait de l'intérieur à l'extérieur sans problème ; permettant ainsi à ceux autant en salle qu'à l'extérieur de profiter de sa performance. On l'écoutait même depuis la rue ou des tavernes adjacentes. Loïs n'avait pas eu aussi bon auditoire depuis longtemps, on l'écoutait, on interagissait avec elle. Elle joua des chants connus, d'autres de sa propre création et en improvisa même pour certains clients. L'argent affluait, la troubadour ne savait même pas comment elle allait le transporter et encore moins le dépenser.

Le chevalier était de loin celui qui appréciait le plus sa performance, il ne s'en cachait pas. Il se montrait aussi mécontent qu'un enfant trop gâté lorsque Loïs lui préférait un autre spectateur. C'est qu'elle ne pouvait répondre qu'à ses demandes seules. Il avait beau être le plus généreux de ses admirateurs, elle avait un public entier à contenter. et si déclamer des chants grivois lui était amusant, Loïs avait tout de même une limite ; un peu, après c'était trop. Elle animait une auberge, pas un lupanar !

La soirée avait été formidable, mais la troubadour commençait à se montrer lasse. Elle promit à son public ; qui commençait aussi à ressentir les effets d'une festivité aussi merveilleuse que longue ; une dernière chanson, et puis au lit. Loïs sortis son psaltérion et commença à en gratter les cordes de ses baguettes à la recherche de quelques inspirations, elle voulait improviser un air qui enchanterait tout son auditoire. C'était une de ses habitudes lorsqu'elle faisait face à une audience aussi superbe que celle de ce soir. Tandis qu'elle composait un début de chanson, elle se sentis observé, jusque là rien d'anormale puisqu'elle était le centre de toute les attentions. Ce regard posé sur elle était bienveillant, elle en remonta le fil et ses yeux rencontrèrent ceux du Pèlerin. Alors que tout le monde était joyeusement agglutiné les uns aux autres et avinés, il se tenait sobre, calmement et à l'écart, comme si personne n'osait l'approcher. Pourtant, elle semblait être la seule à reconnaître sa présence, même les serveuses, pourtant attentives à tout les clients ne semblaient l'avoir remarquées.

— Maître Nain ! une dernière chanson ! clama le marchand aussitôt repris par la foule.

Pour l'encourager encore, le chevalier se mit à claquer des mains de manière régulière, là encore, il fut rapidement repris par la foule.

Le Pèlerin observait toujours calmement Loïs, il attendait. Une serveuse passa devant lui, coupa brièvement le lien visuel qu'ils avaient et lorsqu'il réapparus, le Longue-Jambes se mit lui aussi à applaudir de concert.

— Maître Nain ! Maître Nain ! Scandait maintenant le marchand et le reste du public.

Des hommes avaient escaladés le muret qui séparait la cour de l'auberge et la rue, d'autres étaient montés sur les tables des tavernes toute proche pour avoir une chance de l'apercevoir.

Loïs hésitait, rien ne lui venait vraiment. Et puis aux Léviathans cette foutus chanson ! Elle allait chanter quelque chose qui lui plaisait ! Oui ! Voilà ! Quelque chose qu'il lui faisait plaisir, qu'elle n'avait plus performé en public depuis longtemps et surtout qu'elle aimait.

Le Pèlerin se redressa comme s'il sentait qu'elle avait pris une décision. Elle n'y avait pas vraiment fait attention mais il était vraiment grand ! Il dépassait presque d'une tête même les plus grands hommes de l'auditoire de ce soir.

— Est-ce que vous tous vous souvenez vous de la Chute de Verildyrn ? Non ? Peu importe, voilà comment cela se déroula.

En vérité, Loïs non plus ne s'en souvenait pas. Sans cette chanson, elle n'en connaîtrait sans doute même pas l'existence. Elle ne savait pas non plus où cette ville s'était située sur la carte d'Ayam. Mais elle avait toujours aimé cette balade.

Elle entama les premières notes, a capela, puisqu'elle n'avait aucun orchestre pour l'accompagner, et le silence se fit.

Bouche-bée, les yeux comme des soucoupes, on l'écoutait, subjugué.

Son envoûtement était totale. Sa prestation inattendue, bien plus puissante même qu'elle se l'était imaginé. Toute ces années, elle avait répété quand elle était seule, loin de toute forme d'un semblant de civilisation, ses trois monstres pour seul public, sans réaliser que sa voix avait gagnée en puissance et sa maîtrise en précision.

À la défenestration de la dame de Verildyrn pour ne pas être prise par l'ennemi, elle laissa sa voix s'emporter. Elle tint la note aussi longtemps que dura la chute de la noble dame puis s'interrompit soudain.

Toujours captivé, son auditoire mit plusieurs secondes à se remettre. Certains secouèrent même la tête pour s'aider à reprendre leur esprit.

— M-M-Maître Nain... balbutia le marchand en venant à sa rencontre. Pour une fois, il ne savait quoi dire.

— Maître Nain, c'était... il était toujours à court de mots, mais pour autant toujours incapable de se taire.

— Formidable ! Formidable ! S'exclamait le chevalier en venant aussitôt à sa rencontre.

Il fendit derechef la masse des spectateurs encore ébahit, se saisit d'elle sans lui demander son accord et la hissa sur son épaule pour l'exhiber en triomphe à la foule. La troubadour avait connus quelques consécrations semblables dans sa vie, mais aucune n'avais était teinté d'adoration comme celle-ci. Des mains se tendaient pour l'atteindre, la toucher, la griffer, agripper ses vêtements, tirer ses cheveux ; tout cela pour un memento, tout cela pour pouvoir prouver qu'ils avaient été présent. Cela la mettait grandement mal à l'aise, elle voulait s'extraire de ce bain de foule et retrouver sa forêt et ses chèvres. Et puis le chevalier qui la portait toujours et qui excitait encore d'avantage l'idôlation, l'insupportait. Elle voulait que cela cesse.

— Posez moi ! Posez moi ! Par Paix ! Posez moi ! cria-t-elle tandis que le noble homme offrait toujours sa vue à ses adorateurs et goûtait de son triomphe comme s'il était le sien.

— Par Paix ! Lâchez moi ! Nom d'un Léviathan ! Posez moi !

— Assez ! Gronda une voix puissante.

La marée humaine se figea soudain, puis s'ouvrit aussi brusquement qu'elle s'était stupéfaite pour recracher de sa marée, un homme plus grand que les autres. Le Pèlerin fit face au chevalier qui hésita un instant à protester.

— C'est assez, répéta de sa voix qui dominait toute les autres le Longues-jambes.

Puis, sans demander son reste au noble homme, il ouvrit ses bras à la naine, elle y trouva refuge et s'y blottis sans demander son reste.

— Rentrez chez vous, tonna encore une fois son sauveur.

Dans un grand calme et sans précipitation, la foule commença à se disperser. S'ils n'avaient pas eu encore que son nom à la bouche, Loïs aurait pus croire que c'était juste un rassemblement qui avait mal tourné et qui maintenant s'égrainait lentement vers la sortie. Mais ils avaient encore son nom à la bouche. Elle se pressa un peu plus contre son protecteur, il ne manifesta aucune gène tandis qu'elle se fondait contre lui. Il se tenait toujours là, solide comme un roc, le regard meurtrier envers tout ceux qui tentaient encore une approche. Le chevalier finis par battre en retraite.

— Merci, murmura Loïs.

Le Pèlerin hocha la tête en silence et la posa à terre. La troubadour soupira, l'instant suivant elle était redevenus à elle-même.

— Bon, c'est assez pour aujourd'hui, allons nous coucher le Longues-jambes.

Son interlocuteur hocha la tête et l'escorta jusqu'à sa chambre, là elle le remercia et il s'en fut à son tour.

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