Chapitre 5

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Écrit en écoutant notamment : M1dlet – Die In Your Arms Tonight

— Avant de commencer, je tiens à préciser que c’était une belle connerie ; si j’avais été plus conscient des risques, je ne me serais jamais lancé dedans. Tout s’est passé lors de l'année de première, dans mon lycée à Bourg-la-Reine. Disons qu’à l’époque, j’étais plutôt bon élève, ou plutôt que les cours étaient suffisamment faciles pour ne pas que j’aie trop de travail en dehors du lycée. À tel point que – vous voyez les geeks qui parlent de code pendant que les autres mecs sont occupés à mater comme des chacals ? – avec mon pote, que j’appellerai ici… Bastien, nous en étions l’incarnation même.

Tout s’est mis en place un samedi de décembre. Malgré notre « statut », nous étions vraiment frustrés de ne pas avoir été invités à la soirée tenue le soir des vacances de Noël, chez LA fille populaire de la classe. C’est de là que l’idée a fait surface.

En début d’année, une page Facebook avait été créée dans le lycée pour partager rumeurs et ragots entre élèves. Évidemment, ça n’a pas duré et la page a été fermée. Vous commencez peut-être à comprendre, nous avons voulu nous prendre pour les héritiers de Zuckerberg. Certes, l’ambition était moins démesurée : notre plan était de monter un forum qui reprendrait anonymement le flambeau de la défunte page de gossip.

Néanmoins, nous nous sommes vite rendu compte que la technicité de la chose dépassait largement nos compétences. Qu’à cela ne tienne, les vacances de Noël allaient y passer, on voulait une première version pour la rentrée ! Vous auriez dû nous voir éplucher des tutoriels jusqu’à trois heures du matin pendant deux semaines, c’était absolument épique. Même en mastiquant ma dinde de Noël bien juteuse, je continuais à réfléchir à l’architecture de notre code et aux bugs qui nous ralentissaient.

Enfin, deux jours avant la rentrée, une version assez minimaliste mais fonctionnelle était née : Notre-Dame Gossip 1.0, en l’honneur du nom de notre lycée. D’exclus des « dramas » du lycée, nous allions devenir leurs administrateurs ! Cependant, il y avait un os : faire connaître un tel site sans révéler que nous en étions à l’origine était ardu. Nous avions clairement une idée des risques, vous voyez, mais c’était très loin de nous décourager.

La mayonnaise n'a vraiment pris qu'après quelques semaines, mais une fois que c’était parti, ça l’était pour de bon. Finalement, un mal pour un bien, car nous avons eu le temps de grandement améliorer l’interface, en ajoutant des sondages au simple chat de la première version. Le forum faisait aussi moins années 90 dans son design. Je me souviens encore du jour où nous avons dépassé les cent inscrits, nous étions les rois du pétrole !

Problème : ce nombre a continué à croître rapidement, deux cents, cinq cents, mille, jusqu’à toucher d’autres lycées des alentours. Évidemment, les premiers problèmes de harcèlement sont arrivés, mais nous jubilions tellement de notre réussite que nous n’aurions jamais fermé le site. Nous passions nos journées à entendre dans les couloirs du bahut à quel point « ceux qui avaient codé le site étaient des génies ».

Un jour de mars, nous nous sommes retrouvés devant un message rouge en taille quarante dans le chat :

« Je sais qui vous êtes. Donnez-moi tous les droits d’admin, sinon je vous dénonce ».

Et là, je peux vous assurer que nous n’avons pas fait les malins. Parallèlement, l’ambiance devenait pesante au lycée, et même si l’activité du forum ne diminuait pas, l’excitation avait laissé place à la méfiance. Le lendemain, alors que nous en étions à réfléchir à notre réaction, tout le lycée fut convoqué pour un discours, plutôt un sermon, du chef d’établissement. Quand il a assuré que les coupables seraient immédiatement renvoyés et que des moyens importants seraient mis en œuvre pour les retrouver, Bastien et moi nous sommes regardés et avons compris. C’était terminé.

  • Whaa la dinguerie ! s’écrie une des filles une fois mon récit terminé. Le pire est que j’avais entendu parler de cette histoire à l’époque.
  • Maintenant tu connais tous les détails, enfin presque !
  • Mais qui est au courant, maintenant ?
  • Ah… très bonne question... on a décidé de tout révéler à notre lycée trois ans après, une histoire de conscience… On a fait les choses proprement, sur les conseils d’un avocat. Finalement, tout s’est bien terminé pour nous. Allez, c’est pas ça, mais on a un jeu à continuer !

Je tire un trois de cœur, qui me permet de distribuer trois gorgées à mes amis. Ensuite, je pose avec la précision d’un orfèvre la carte en équilibre sur le goulot de la bouteille. Le fait d’avoir raconté cette histoire m’a bien détendu ; autrement je suis souvent mal à l’aise avec de nouvelles personnes.

C’est ensuite au tour de Sarah de choisir une carte, un 8 de pique.

  • Euh, Antoine, c’est quoi la règle avec le 8 ?
  • C’est le j’ai/je n’ai jamais !
  • Ah oui ! Eh ben… Je n’ai jamais embrassé de garçon !

Sarah me lance un regard complice, sachant très bien que je serai sûrement le seul garçon à boire en plus des filles. Allez, si je n’y vais pas, je vais me faire traiter de mauvais joueur. De toute façon, ça ne risque pas de déranger nos nouvelles connaissances.

Nous poursuivons le jeu pendant une bonne demi-heure ; même si le contact que m’a refilé Sarah est douteux, je suis ravi d’être finalement venu à cette soirée. Dans tous les cas, ma situation n’est pas désespérée…

  • Il serait bientôt l’heure de décaler en boîte, non ? lance Antoine vers minuit et demi. Vous avez des préférences ? Commercial, techno, autre chose ?

***

Dimitri – II

  • Et… voilà ! Le taf est fait, dit Dimitri en mettant en veille son ordinateur après trois quarts d’heure de manipulations.

Il s’avance ensuite à pas légers vers son ami de la fac, dont les yeux sont rivés sur son téléphone.

  • Eh, tu m’entends ?

Le mec lève soudainement la tête avec une exclamation satisfaite et ôte ses écouteurs ; ses yeux en disent déjà long sur ses intentions lubriques… Dimitri s’assoit délicatement sur ses cuisses musclées et dépose un baiser sur son front. Il sent les mains chaudes de son ami faire des allers-retours sur son dos, en descendant à chaque fois un peu plus bas, jusqu’à ce que le bout de ses doigts se fraye un chemin sous son caleçon. Le fait de savoir que ses fesses seront bientôt à nu, offertes au désir de son partenaire, l’excite terriblement.

  • Tu aurais envie de me faire quoi ? chuchote Dimitri.
  • Hmm, laisse-toi faire, tu verras.

Son ami l’incite à se mettre à quatre pattes sur le lit et descend le morceau de tissus qui cachait encore ses formes rebondies. Après quelques caresses, Dimitri remarque qu’il se penche en arrière pour attraper son téléphone.

  • J’imagine que ça te dérange pas si je prends quelques photos, strictement pour notre usage personnel bien sûr ?
  • Oh… lâche ça pour une fois, qu’on profite pleinement.
  • Comme tu veux ! dit-il avant de refaire glisser la pointe de sa langue le long du sillon de Dimitri.

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