Chapitre 15

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"Je suis désolé de te faire souffrir. Depuis cette époque, et encore à présent." K.Mckinney

M'habillant d'un geste lent, je me remémore les paroles de Liam dans ma tête. Il a su m'apaiser, rien que par de simples mots. Je m'approche de la glace, et constate ma mine vraiment affreuse dans le miroir. Mes cheveux sont encore dégoulinants, et mes yeux qu'on dit magnifiques ne sont plus que des billes ternes. Leur éclat vert a totalement disparu. Et le fait qu'ils soient rouges et gonflés ne les met vraiment pas en valeur. Soupirant, j'essaye de me coiffer un peu, histoire d'avoir une tête à peu près potable. Puis je prend mes affaires, et je sors du vestiaire, le regard rivé au sol une nouvelle fois.

  • Henley !

Je me tourne vers celui qui a crié mon nom. Duncan. Son meilleur ami. Je l'ai toujours apprécié, quand j'étais encore amie avec Kylian, et que je passais mon temps avec lui. Bon, il était un peu bête parfois, mais il pouvait aussi se montrer mature. Celui-ci s'approche de moi, l'air gêné.

  • Euh, ça va ?

  • Oui, merci.

  • Bon, bah tant mieux alors. Tu vas quelque part ?

  • Voir Freeman . Et le prof aussi.

  • Brown est revenu dans le gymnase. En fait, c'est lui qui m'envoie te chercher.

  • Ah.

On dirait que ça a l'air de le faire chier plus qu'autre chose. Quand je pense qu'on a été ami. Il me fait signe de le suivre, et je marche derrière lui, me demandant ce qui m'attend. Récapitulons : je me suis fait virer du cours de maths, j'ai frappé deux élèves, et je me suis cassée du lycée. C'est clair, l'exclusion m'attend. Ce qui me chagrine le plus, c'est que j'aurais aimé faire plus connaissance avec Liam. J'aurais aimé devenir son amie, oui. Nous rentrons dans le gymnase, et brusquement, toutes les conversations s'arrêtent. Ignorant les regards, je m'approche du prof qui me regarde l'air plutôt soucieux, je trouve.

  • Allons dans mon bureau, me dit-il.

Je le suis, qui traverse le terrain, sentant au passage des regards meurtriers et réprobateurs. Kylian ne me regarde pas, une nouvelle fois. Puis j'aperçois Liam qui me fait un sourire, ce qui me donne un peu de courage. Nous pénétrons dans son bureau, et il me dit de m'asseoir, tout en fermant la porte et le store, pour empêcher les curieux de venir. Puis il s'approche de moi.

  • Henley…

  • Monsieur, je…

  • En tout premier lieu, est-ce que tu vas bien ? Il ne t'est rien arrivé ?

  • Non… ça… va, balbutiai-je.

  • Hum, j'espère. Ensuite, sache que Lauren et Phoebe n'ont rien de grave.
  • Elles sont quand même à l'infirmerie.
  • Phoebe a juste un bleu sur la joue, rien de bien méchant. Et Lauren n'a rien du tout elle.

Je savais bien qu'elles jouaient la comédie. Tout pour me rendre la plus responsable possible en quelque sorte.

  • Mais tu comprendras, que je ne peux pas laisser passer sur ça. La directrice est déjà au courant, et t'attend dans son bureau.
  • D'accord, dis-je en me levant. Merci.

  • C'est rien. Je sais bien que ce qu'a dit Lauren est faux, tu as mon soutien sur ça.

Surprise, je lui fais un faible sourire avant d'ouvrir la porte, et d'y voir tout un troupeau collé au mur.

  • Allez aller, le cours est terminé de toute manière ! Crie le prof.

Tenant fermement mon sac, je me dirige d'un pas rapide vers la sortie, certaines filles me bousculant au passage. L'une d'elles me fout même un violent coup d'épaule qui me fait tomber à terre.


  • Oh pardon, je t'avais pas vu… traînée.

Puis elle repart en rigolant comme une débile avec ses copines. Je retiens bien son visage. C'est Tess, l'autre sbire de Lauren. Je souris, et me lève. Cette fois-ci, je garde la tête haute et me remets à marcher. Je croise Kylian et sa bande, et distingue un micro-sourire sur les lèvres de Savannah, Bryan et Duncan. Et je pose mon regard dans le sien, et un instant, je m'y perds. Il est insondable, comme à l'ordinaire. Je me demande s'il m'en veut d'avoir frappé sa copine. J'en ai rien à faire de toute manière, et détourne mon regard, sachant pertinemment qu'il s'en fout de ma personne. Je me dirige d'un pas rapide vers le bureau de la directrice, souhaitant en finir au plus vite. Je frappe à la porte, et entre après-avoir entendu un « entrez ». Madame Freeman lève les yeux vers moi, et me fait signe de m'asseoir. Elle doit avoir la trentaine, et pourtant elle semble plus âgée, sans doute du fait de sa maturité.


  • Henley. J'attendais ta visite. Ton excursion a été bonne ?
  • On va dire ça, répondis-je en regardant à côté.

  • J'espère bien. Je peux savoir ce qu'il s'est passé ? Avec tes camarades de classe.
  • Rien.

  • Rien ? Donc tu les as frappées comme ça, sans raison particulière ?
  • C'est ça madame.

Je la vois frapper le bureau de son poing et me jeter un profond regard noir.

  • Henley ! Ma patience a des limites ! Dis-moi la vérité !

  • Je viens de vous la dire, je les ai frappées, point, répliquai-je.
  • Je n'en crois pas un mot ! Monsieur Brown m'a raconté la scène. Il faut que j'interroge d'autres élèves pour que tu m'avoues enfin ce qui s'est réellement passé ?
  • Ce serait une pure perte de temps pour vous.
  • Nous sommes au moins d'accord sur ça, dit-elle en se rasseyant. Henley, je sais aussi que tu es renvoyé de ton cours de maths par Monsieur Vaughn. Tu m'expliques ?

  • Ce prof m'a piqué une crise, c'est tout. Soi-disant parce que je lui aurais mal parlé.
  • Hum… Et c'est vrai ?

  • J'en sais rien, dis-je en ricanant. Ce type est un sale pervers. J'ai juste mis les choses au clair avec lui.

Je suis sûre qu'elle ne me croit pas. C'est tellement évident, qui croirait une fille comme moi ?

  • Bon. C'est tout ce que je voulais savoir. Tu peux partir.
  • Q...quoi ? M'exclamai-je, incrédule. Je suis pas renvoyée du lycée ?
  • Pourquoi je te renverrais ? En dépit de ça, tu es une élève sans histoire.
  • Mais… et pour l'incident en sport ?

  • Ces deux filles sont venues se plaindre à moi. J'ai horreur de ça. Donc, pour moi, c'est régler. Et entre-nous, j'aurais réagi pareil à ta place, ajoute-t-elle dans un franc sourire.

Pour le coup, je suis bluffée. Ma sanction… Est vraiment minime comparée à ce à quoi, je m'attendais.

  • Tu peux y aller. De toute façon tu as fini les cours non ?

  • Euh… oui. Bien, au revoir, et… merci.

Je me lève, et sors du bureau. Je suis encore sous le choc. La directrice est de mon côté ! C'est à peine croyable, ça me semble irréel. Je sors du bâtiment, et inspire un grand coup. Tout va bien. Sachant que Liam est sans doute en cours, je quitte donc le lycée. Je me sens un peu mieux, mon entrevue avec Madame Freeman m'a remis d'aplomb. Sans oublier Liam. Je crois que je ne serais jamais en mesure de le remercier comme il le mérite vraiment. Je rentre chez moi, et entends du bruit dans le salon.


  • Maman ?

  • Ah June, tu es rentrée ! Viens donc par ici !

Je retire mes chaussures, et jette mon sac par terre. Je me dirige d'un pas lent vers le salon, et y trouve ma mère en train de lire un magazine. Je lui fais un bisou sur la joue en guise de bonjour, et m'assieds à côté d'elle.


  • Comment s'est passé ta journée ? Me demande-t-elle.

Qu'est-ce que je dois lui répondre ? Lui dire que je me suis tirée du lycée ne lui plaira sans doute pas.


  • Journée banale, pour changer. Et toi ?

  • Pas trop mal. J'ai eu pas mal de travail à la boutique.

Ma mère est décoratrice d'intérieur. Je me rappelle la fois où elle a voulu tout refaire dans ma chambre, je lui avais dit d'aller se faire foutre et je lui avais fermé la porte au nez. On avait fini par coopérer, changeant uniquement la couleur de ma moquette. Elle avait pris un ton un peu sablé, et j'avais réussi à coordonner la couleur de mes murs avec le sol. Le violet électrique rendait la chambre un peu sombre, mais j'avais la chance de disposer d'une fenêtre gigantesque, comme me le rappelait souvent ma mère.


  • Regarde ! Tu penses quoi de cette robe ? Elle t'irait à merveille, tu ne trouves pas ?

Je jette un regard meurtrier à ma mère. Une robe, la blague. Elle sait très bien que j'ai horreur des jupes. Je jette un bref coup d'œil au catalogue. Hum, j'avoue qu'elle n'est pas moche. Elle est simple, et le décolleté sur le mannequin n'est pas trop plongeant. Parfait pour ma poitrine !


  • Elle existe en plusieurs couleurs. Elle pourrait être bien pour ton bal non ?

  • Le bal ? Parce que t'as vraiment cru que j'allais y aller ?
  • Bah, pourquoi tu n'irais pas ?

Je manque d'exploser de rire. Moi, aller à ce foutu bal ? Ma mère me connaît bien mal sur ce coup-là. Je n'ai aucune envie de me ridiculiser devant tout le monde. J'avais carrément oublié cette soirée en plus !

  • C'est quand déjà, dans moins d'une semaine non ?

  • Ouais. Dans cinq jours. Mais c'est mort, j'irais pas.
  • Mais enfin June ! Tous tes amis vont y aller !

Mes amis. Lesquels ? Ma mère ne sait pas que lui et moi ne nous parlons plus, c'est vrai. Normal qu'elle croit encore que je passe mes pauses et mes journées entourée de mes amis. Ça me déchire le cœur à vrai dire. Ça me fait vraiment chier, mais la douleur que je croyais apaisée revient subitement à la charge. Je passe le revers de ma main sur mes yeux, et fixe un point sur le mur.


  • June ? Ma chérie, tout va bien ?

  • T'en fais pas, ça va. Mais je ne change pas d'avis, je n'irais pas à cette soirée.
  • Oh, voyons ! Je suis sûre que tu peux t'amuser, si tu y mets un peu du tien !
  • Mettre du mien ? Maman ! Tu me vois danser comme une pouffiasse, à chauffer les mecs ?
  • Mais toutes les filles ne sont pas comme ça ! Regarde, Savannah et Molly par exemple…

Je détourne le regard, et me sens à nouveau seule. Elle ne sait pas, elle ne peut pas comprendre ce que je ressens.

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