Herwin - Septième jour

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Les premières lueurs de la journée furent apportées par un soleil pâle et morne. Aucun oiseau n’accompagnait ce nouveau jour, aucun bruit ne semblait vouloir troubler l’atmosphère morte du village. Même le vent et les nuages attendaient un signe pour se manifester, pesant lourdement dans l’air.

Herwin attendit que le soleil dépasse le premier cadran du ciel pour se forcer à se lever. Sa montre indiquait 9h. L’inquiétude dans ses yeux avait embrasé son regard et lorsque sa mâchoire crispée s’ouvrit, il jura pouvoir entendre le grincement de ses dents.

  • Tu es prêt ? On a besoin de quelque chose ?

Tout cela était stupide. Pourquoi jouer aux héros, pourquoi vouloir rester dans un lieu maudit, pourquoi vouloir courir à leurs pertes… ?

Jameson était blanc comme un linge mais son regard pétillait. Déjà sur le qui-vive, il tournait et retournait les pages du bouquin en latin.

  • Prêt. Il faut retourner au centre du village, devant l’hôpital. Il y a tout le rituel décrit dans le livre. Quelques dessins au sol, quelques incantations et toutes les créatures ou autres trucs malfaisants disparaîtront. Ensuite, on part, retourner dans notre ville et rapporter le tout aux autorités. Nous serons des héros Herwin. De véritables sauveurs.

Le plus âgé des deux se retint de lâcher un long râle de désespoir. Dépliant son dos en se levant, il sentit distinctement toutes ses vertèbres se remettre en place de la nuit qu’il venait de passer à demi-couché.

Le pas lourd, laissant de profondes marques dans la terre boueuse du chemin menant à l’hôpital, Herwin fixait Jameson sans ciller. L’impression qu’à la moindre inattention son ami allait disparaitre lui chatouillait les dessous de bras. Ce signe là était toujours prémonitoire. Il força le pas pour rattraper l’écrivain qui parcourait à grandes enjambées la distance restante pour se trouver devant l’hôpital.

La grille de fer forgé qui fut autrefois blanche et rutilante était maintenant rouillée et dégondée. Leur dernier passage était encore visible dans les empreintes de bottes d’Herwin qui partait de ce lieu.

Un courant d’air provenant de l’hôpital leur charria une odeur immonde de putréfaction qui lui serra la gorge. La puanteur lui monta les larmes aux yeux tant elle les lui piquait. L’air sifflait en agonisant, portant à leurs oreilles l’agonie de la créature qui vivait en ce lieu. Herwin en était certain, il y avait bien plus d’horreur dans ces murs qu’ils n’en avaient vu.
Les poils de ses bras et de son torse se hérissèrent et la chaire de poule couvrit son corps.

  • Grouille James…

Le jeune écrivain s’empara d’une branche pour tracer des pentagrammes entremêlés. Deux cercles se rencontraient au centre de ce dessin qu’Herwin trouvait absolument terrifiant.

  • Mets-toi à côté de moi…murmura l’écrivain, concentré.

S’il avait pu courir, Herwin l’aurait fait. Mais laisser James ici tout seul, et surtout, rompre sa promesse, lui était impossible. Avec une lenteur infernale, il déplaça ses pieds en les trainant jusqu’à l’emplacement indiqué. Son regard se porta sur son ami. Comment faisait-il pour ne pas trembler de peur ? Comment faisait-il pour être aussi concentré ?
Serrant les poings, il ferma à demi les yeux en le fixant, respirant profondément pour tenter de calmer la tempête qui montait en lui.

Jameson se mit à lire à haute voix des phrases qu’il ne comprenait visiblement pas, butant parfois sur des formulations. Herwin le quitta des yeux dès la deuxième phrase. De chaque fenêtre du bâtiment auquel ils faisaient face, des ombres putrides et gluantes s’exfiltraient du bâtiment et s’avançaient en rampant vers eux.

  • James…. Grouille toi….

Jameson accéléra sa lecture. Des créatures apparaissaient dans l’encadrement de la porte principale, à quelques mètres d’eux. Herwin détourna le regard tant l’horreur de ces êtres démembrés à la démarche saccadée l’horrifiait. A cet instant, le tonnerre se mit à gronder et l’orage éclata.

Herwin sentait ses jambes faiblir alors que Jameson achevait de lire, levant la tête. D’un seul coup, alors que le soleil était levé, le noir se fit dans le village. Une ombre dense et étouffante s’abattit sur eux. Un éclair blanc déchira le ciel et illumina les quelques mètres devant eux.

Un cri de terreur s’échappa des lèvres de Jameson. Herwin tendit le bras vers lui. L’ombre resserrait son étau terrifiant sur eux. Quelque chose n’allait pas. Au lieu de repousser les créatures, cette ombre semblait maintenir James et lui-même sur place.

  • James… murmura Herwin d’une voix étranglée.

Ce fut le regard terrifié de son ami qui lui fit comprendre qu’il y avait vraiment quelque chose qui clochait. Il était là, il le sentait sous sa paume, mais il ne le voyait plus.

  • JAMES !!!

Il ne le sentait plus. Ses doigts se refermèrent dans le vide. L’ombre s’infiltra par ses narines, ses yeux se noircirent, il étouffait.

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