Chapitre 10

8 minutes de lecture

13 août 2020

Nous sommes restés un moment chez tata Christy. Nous l’avons aidé à redécorer son bureau. Elle œuvre dans le domaine du graphisme, dans son appartement. Elle voulait changer son environnement de travail. J’aime beaucoup aller chez ma tante. Elle a une manière de penser et un univers bien à elle. Ma tante nous a fait faire de la peinture. C’était pas mal. Surtout quand on lui a versé le pot à moitié plein dessus. Heureusement qu’elle portait une combinaison ! En fin d’après-midi, la pièce avait retrouvé un nouveau souffle. Fini le vieux papier peint à rayure décrépis, et bienvenue la nouvelle peinture mauve.

Tata Christy nous a ramené à dix-sept heure. Ma mère était déjà à la maison. Quand elle avait vu les traces de peinture sur le visage de sa sœur, elle a beaucoup rigolé. Elle nous avait jeté un regard plein de sous-entendu. Ma tante partis, Julie et maman était allées faire un gâteau. Enfin, finir le gâteau que ma mère avait commencé. Moi, j’étais allé dans ma chambre pour lire. Je veux savoir le fin mot de cette histoire. J’ai repris ma lecture où je l’avais laissée.

Journal,

Je n’ai pas pu voir Adélie depuis longtemps. Papa est toujours à la cave. Mais aujourd’hui il est allé acheter du matériel. J’ai saisi l’occasion de descendre. J’ai dit à maman que j’allais me promener dans le jardin et je suis passée par les souterrains. J’avais apporté avec moi des cookies. Adélie adore les cookies. Avant, elle en mangeait dès qu’ils sortaient du four. Maman disait que c’était une petite gourmande et qu’un jour elle finirait par se brûler les doigts. Ce temps-là me manque…


J’avais aussi pris ma poupée et une petite clochette. C’était Adélie qui m’avait demandé la clochette. Même si je ne sais pas ce qu’elle compte en faire, je lui fais confiance. Elle ne me dit jamais rien qui ne soit pas utile. Ma sœur est très intelligente. C’est papa qui le disait souvent. C’est peut-être pour ça qu’il l’a enfermé à la cave. J’espère que ce n’est pas le cas. Papa me dit souvent que je suis intelligente.


Il n’y avait pas de bougie pour m’éclairer. J’avais peur du noir. Heureusement qu’il y a une lumière dans la pièce où est Adélie. Papa ne ferme plus que la porte coulissante. Comme ça, je peux mieux entendre ma sœur. Je n’ai jamais pu lui faire de câlin, Adélie ne veut pas. Elle se cache dès que j’allume la lumière. Je me suis précipitée vers ma sœur. Lorsque j’allais allumer, elle m’a dit de ne pas le faire.


« Je ne veux pas que tu me vois comme ça. Les expériences de papa m’ont transformé. Mais j’ai eu une idée.


- Quoi comme idée ?


- Pose la sonnette que je t’ai demandé d’amener. »


J’avais fait ce qu’elle voulait. J’avais déposé l’objet sur le sol, dans l’ombre dense où elle était tapie. J’avais ensuite entendu ses chaînes tinter et le son que produit le scotch quand on le déroule.


« J’ai fixé la clochette vers la porte. Avant d’allumer, sonne. Comme ça j’aurais le temps de me cacher et tu pourras avoir voir quelque chose. Je sais que tu as peur d’être dans le noir.


- D’accord, je sonnerai avant d’allumer.


- Merci.


- D’ailleurs, avais-je repris d’un ton plus joyeux, je t’ai apporté des cookies. Ils datent d’hier mais ils sont quand même bon.


- C’est vrai ? »


Elle avait commencé à pleurer quand je les lui avais donnés. J’avais senti des mains se refermer sur le petit paquet. Pourquoi est-ce qu’elle pleurait ? J’avais fait quelque chose de mal ? Je ne veux pas lui faire de la peine… Elle souffre déjà assez à cause de papa…


« Adélie, pourquoi est-ce que tu pleures ?


- C’est la première fois depuis longtemps que je mange autre chose d’aussi bon. Papa ne me donne que de la viande et des pommes de terre. J’avais oublié le goût des bonnes choses. »


On a passé un long moment ensemble. Adélie m’a fait jouer aux devinettes, elle est très forte à ce jeu. Je suis remonté quand j’ai entendu le moteur de la voiture. Papa allait renter d’une seconde à l’autre. J’ai dit au revoir à ma sœur et je suis repassé dans les souterrains. J’ai bien écouté Adélie, avant d’allumer la lumière, il faut que je sonne. Comme ça elle peut se cacher et je ne suis plus apeuré par le noir. J’essayerai de venir la voir bientôt.

C’est donc de là que vient la règle ! C’est de là que vient l’explication ! Petit à petit, je comprends tout ce qu’il se passe dans cette maison. Je ne pense pas que je vais le dire à mes parents. Ils ne comprendraient pas. Si je le faisais, je ne pourrais sans doute plus descendre et ils seraient en colère. Il est trop tard pour que je leur dise tout.

Maintenant la cave ne me fait plus autant peur. Avant, lorsque je passais devant les escaliers, des frissons se mettaient à me parcourir le corps. Ce n’est plus le cas depuis que j’en sais plus. C’était juste l’ignorance qui me tenait dans l’angoisse.

*

Je… Je l’ai vue… Elle était devant moi…

Je me suis levé pour prendre un verre d’eau. Il était environ vingt-deux heure trente. J’étais dans ma chambre mais j’avais soif. Mon père prenait sa douche dans la salle de bain, juste en face de ma chambre. Je devais donc aller dans la cuisine, me servir un verre d’eau. Elle se situe à côté du salon, à l’autre bout du couloir. Je n’ai pas allumé le corridor pour ne pas réveiller ma sœur et ma mère.

Une fois dans la pièce, j’ai bu de tout mon saoul. J’ai posé le verre à côté de l’évier, je le prendrais demain matin pour mon petit déjeuner. Lorsque j’ai franchi la porte, la douleur à mon bras gauche s’est réveillée. C’était là qu’Adélie m’avait touchée. J’avais trouvé ça vraiment surprenant. J’y ai cependant fait abstraction et suis retourné dans le couloir. La vue des escaliers sombres à ma gauche me faisait un peu flipper. Si le jour, je n’y fais plus attention, la nuit, c’est autre chose !

Ça avait eu pour effet de me faire accélérer pour revenir le plus vite possible dans m chambre. Je suis sûr que vous savez de quoi je veux parler. On se met à courir à toute vitesse pour retourner dans un endroit où on se sent en sécurité. En principe c’est un endroit bien éclairé. C’était pour cette raison que j’étais arrivé dans ma chambre à toute allure. Mais je n’ai pas allumé comme on le fait normalement.

La douleur de mon bras s’est accentuée. J’ai aussi perçu un bruit venant de l’intérieur de ma chambre. Je m’étais figé, aux aguets. Une vague forme avait bougé juste en face de là où je me trouvais. Au départ, je n’en étais pas certain. Comme ça ne s’était fait qu’une seule fois, j’ai cru que j’avais rêvé. J’avais mis ça sur le compte de la fatigue.

Seulement voilà, ça s’est reproduit. Cette fois-ci, c’était plus près. Le bruit avait retenti une nouvelle fois. C’était ténu, trop pour que je distingue de quoi il pouvait s’agir. Mais j’étais sûr de l’avoir déjà entendu. La certitude me gagna rapidement : il y avait bien quelque chose dans ma chambre. La chose en question avait de nouveau bougé. Ça n’était pas plus grand que moi, je dirais même que c’était plus petit. J’avais senti un souffle sur ma peau. J’avais commencé à paniquer. Ça ne pouvait être qu’une seule chose. Adélie était juste devant moi.

Mais impossible de bouger. Impossible de parler. Impossible de hurler. Je ne pouvais rien faire.

Le bruit entendu plus tôt était le voix de l’esprit. Je l’avais entendu quand ma sœur était descendue la première fois, puis à d’autres occasions. Elle devait être à un cheveu de moi. Dans l’obscurité, j’étais parvenu à distinguer des choses. La LED de ma console fournissait une minuscule source de lumière. Cela suffisait pour que je parvienne à discerner des formes étranges sur son visage. Des formes, qui, normalement, ne devraient pas être là. J’ai entendu sa bouche s’ouvrir avec un immonde bruit de suffocation. Un odeur nauséabonde à envahi la pièce. C’était un mélange de terre et de pourriture.

Sa main avait à nouveau touché mon bras. Elle me l’agrippa avec une force déconcertante. Cette fois, elle me serrait beaucoup plus que la dernière fois. Elle commença à faire un grognement à donner la chair de poule. Elle s’arrêta d’un coup. D’une voix faible ténue, presque imperceptible, elle m’avait dit :

« … continue de lire… ou meurs… »

Une décharge d’adrénaline m’avait parcourue le corps. J’avais retrouvé l’usage de mon corps au même moment. Sans attendre, j’avais reculé en hurlant. En me détachant de son emprise, je ressentis une vive douleur à mon bras. C’était pire que tout ce que j’avais ressenti jusqu’alors. Ma mère est arrivée à toute vitesse et a allumé la lumière.

Adélie n’était plus là. Le seul signe de sa présence quelques instant plus tôt était le sang qui dégoulinait sur le sol. Il n’y avait rien d’autre. Que le sang. Ma mère me parlait mais je n’entendais rien. Les mots glaçant de l’esprit résonnaient dans ma tête. Cette voix qui n’est pas naturelle. Cette voix qui n’est pas humaine. Cette voix qui ne devrait pas exister. Cette vois qui m’avait menacé.

À l’heure actuelle, je suis dans la chambre de ma sœur. Ma mère m’a mis un bandage sur ma blessure. Elle ne m’a rien demandé mais je sais que ce n’est qu’une question de temps. Demain j’aurais le droit à un interrogatoire de sa part et de celle de mon père. Je les ai vu discuter et me jeter un regard effrayé. Ils savent que cette blessure ne s’est pas faite naturellement.

Je ne veux pas dormir. À chaque fois que j’éteins la lumière, je la vois. Julie s’est endormie à côté de moi. Elle sait elle aussi qui est responsable de tout ce tapage. C’est elle qui a proposé de m’accueillir dans sa chambre. C’est sa manière de me réconforter et de me rassurer.

Adélie veut que je connaisse toute la vérité. Elle n’arrêtera pas tant que je ne saurais pas tout ce qu’il s’est passé. Pour moi, c’est l’ignorance ou la vie.

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