Chapitre 1

8 minutes de lecture

15 juillet 2020

Depuis que je suis tout petit, je peux observer des phénomènes étranges. Certaines fois, ça n’était rien d’autre que de petits bruits innocents tard dans la nuit. D’autres fois, j’avais réellement l’impression que nous étions plus que quatre dans cette maison. Je me souviendrai toujours du lendemain de mes sept ans. La veille j’avais reçu une DS, rien de bien étrange pour un enfant. J’avais été si heureux d’en avoir enfin une ! J’y avais joué toute la journée. Avant de dormir, je l’avais posée sur mon bureau. Le lendemain, plus rien. J’étais allé voir mes parents pour leur demander s’ils l’avaient vue. Ils s’étaient regardés quelques secondes dans un silence pesant et mon père était descendu à la cave. Il en était revenu avec ma console. Il n’avait pas dit un mot, il l’avait juste posé devant moi sans rien dire.

C’est après ça que j’ai compris qu’il y avait quelque chose d’étrange avec cette cave. Quelques fois, des jouets disparaissaient et mes parents les rapportaient toujours en remontant les escaliers. Intrigué, je leur avais demandé pourquoi. Mon père m’avait alors dit ces paroles que je n’oublierais jamais :

« Le jour de tes treize ans, je te dirais toute la vérité. Mais en attendant, je t’interdis de descendre. »

Je ne lui ai jamais désobéi. Il y avait une chose dans son regard, sa voix, qui me disait de ne surtout pas le trahir. Vous savez, parfois l’attitude de nos parents nous incite à les écouter. Ici c’était le cas.

Pendant les jours qui ont précédés mon treizième anniversaire, j’ai été très agité. Ma sœur avait elle aussi compris qu’il y avait un mystère dans cette cave. Je me souviens qu’elle était venue me trouver pour me dire :

« Dis, quand tu le sauras, tu me le diras hein ? Sinon je vais devoir attendre encore très longtemps…

- Oui je te le dirais. »

Je pensais sincèrement mes mots. Mais j’ignorais encore que je ne pourrais pas tenir mes paroles. J’avais été trop naïf. La veille de mon anniversaire, juste avant de m’endormir, je m’étais posé mille et une question. Qu’est-ce qu’il pouvait y avoir là, en dessous de ma chambre ? Mon imagination s’emballait. J’imaginais qu’il s’agissait d’un animal magique avec des pouvoirs légendaires. J’étais loin de me douter que c’était tout autre chose. Je m’étais retourné et avait fini par m’endormir.

Le matin du dix septembre deux mille dix-huit, ma mère est venue me réveiller. Elle avait le visage fermé quand elle m’a dit de la suivre. Sans faire de bruit, pour ne pas réveiller ma sœur, je sorti de ma chambre. J’avais une boule dans le ventre. Depuis le temps que je voulais découvrir ce qu’il se cachait dans la cave ! Maintenant que j’allais le découvrir, j’étais très nerveux. Mon père nous attendait devant les escaliers. Ceux-ci sont situés juste après la porte d’entrée. Un vent froid passait en dessous et je frissonnai. Il faisait froid. Mon père avait la tête de quelqu’un qui ne voulait pas descendre. Ses traits étaient tirés, sa jambe tremblait, comme s’il était impatient d’en finir.

Il m’avait pressé l’épaule avant de s’engager sur les marches en bois. Je l’avais suivi, ma mère sur mes talons. Avant que je ne pose mon pied sur la première marche, j’ai pu observer un rail qui devait très certainement servir à faire glisser une porte. C’était surprenant. Depuis mes plus lointains souvenirs, je ne me souvenais que des escaliers sombres qui s’enfonçaient dans les ténèbres. Pas une porte n’avait été posé à cet endroit. J’avais continué en faisant abstraction du rail. Les marches n’étaient pas épaisses. Je me tenais sur la rampe pour ne pas tomber. J’arrivai quelques secondes après mon père.

Je n’étais jamais venu jusque-là. Pile en face de la dernière marche, à environ deux mètres, j’avais pu voir une porte. À gauche il n’y avait que le mur et à droite, le couloir continuait jusqu’à rejoindre notre garage. Même si je n’étais jamais passé par là, je savais que l’on trouvait des pièces le long du couloir. Mes parents mettaient là les objets et meubles que nous n’utilisions plus.

Jusque-là, je vous avoue que je n’avais pas peur. Je pensais même que tout cela était une blague. Mes parents allaient forcément me dire que tout était sans danger. Pour moi, c’était presque une évidence. Nous étions devant la porte, en face des escaliers. Celle-ci étaient blanche avec un motif noir dessus. Il faisait assez sombre car il n’y avait pas de lampe à proximité. J’ai même remarqué qu’une lampe n’éclairait la porte où l’espace autour d’elle. Un froid surnaturel se dégageait de la porte. Il était différent de celui que j’avais ressenti avant de descendre. Celui-là n’augurait rien de bon.

Mon père avait alors pris la parole :

« Grégory, écoute-moi attentivement. Cette porte doit toujours être fermée et aucune lumière ne doit être allumée à côté. C’est important.

- Mais pourquoi ? lui avais-je demandé. Pourquoi m’as-tu interdit de descendre ?

- Pour une raison très simple, il y a un esprit dans la cave.

- Un esprit ? »

Je me souviens avoir rigolé. Mes parents devenaient fous. Finalement je n’étais pas si loin avec mon animal magique ! Je m’étais reprit en voyant leurs têtes. Ma mère s’était placée devant moi :

« Grégory ce n’est pas drôle. C’est même très sérieux. Tu sais les objets qui disparaissent ? Et bien, ils se retrouvent ici. C’est pour cela que ton père allait à la cave lorsque vous me disiez que vous aviez perdu quelque chose. »

Le sourire sur mon visage s’était effacé. Ils plaisantaient, n’est-ce pas ? Cela n’était pas réel, tout avait était inventé, non ? Mon géniteur paraissait plus que sérieux. Peu à peu, l’angoisse me comprima le cœur. L’air grave de mon père me faisait doucement comprendre que tout cela n’était pas une blague.

Il s’était mis à genou pour être à ma hauteur :

« Je vais te montrer comme faire pour rentrer en toute sécurité. Il faut ouvrir la porte, sonner sur la petite cloche située à gauche, puis seulement après, allumer. Toujours dans cet ordre. N’allume jamais avant de sonner, c’est très important. »

Il s’était levé et avait mis ses mots en pratique. Il ouvrit la porte, donna un coup sur quelque chose puis alluma la lumière. Le glas lugubre d’une sonnette résonna longtemps dans mes oreilles. C’était un son à vous glacer le sang. J’avais eu l’impression que le bruit avait amplifié le froid surnaturel que je ressentais. Mon père se tourna vers moi et me dit de m’approcher. Il éteignit la lumière puis referma la porte.

« À toi mon fils. Je resterais à côté de toi. »

J’ouvris de grands yeux effrayés. Je ne voulais pas le faire, vraiment pas. Tout portait à croire qu’après ce moment il n’y aurait plus de retour en arrière possible. Mais je ne pouvais plus me défiler. Sous le regard de mes parents, je respirai un bon coup avant d’ouvrir la porte. Elle pivota dans ses gonds sans faire de bruit. Devant moi, il n’eut bientôt qu’une pièce noire qui semblait aspirer le peu de courage qui me restait. Je tâtonnai à la recherche de la sonnette. C’était une espèce de cloche de vélo. Je tirai sur le ressort et le glas résonna une nouvelle fois.

Il y a des obscurités plus denses que d’autre. Parfois on peut deviner des formes dans le noir, même s’il y a très peu de lumière. Quand le glas a retenti, je vous jure que j’ai cru discerner quelque chose se mouvoir. Cela n’était pas juste un effet de mon imagination. Il fallait ensuite allumer. Ma main se mit à trembler à l’idée de voir ce qui cachait la cave. Malgré ma peur, je m’exécutai.

L’ampoule suspendue au plafond s’alluma. Il y avait de vieux meubles dispersés. Certains formaient des tas tandis que d’autres étaient écartés. Au fond, il y avait d’anciennes bouteilles de gaz. Je me suis demandé si elles étaient encore utilisables.

« Viens, on va rentrer.

- On va quoi ?! »

Je n’eus pas de réponse. Mon père me prit la main et m’entraîna à l’intérieur. Comme j’aurais aimé être ailleurs ! N’importe où sauf ici. On me fit arrêter au centre de la cave. Je repris mon observation. Il faisait froid, bien plus froid qu’en bas des escaliers. Les murs étaient en béton brut et on pouvait croire au premier coup d’œil que c’était une cave ordinaire. Mon géniteur m’adressa la parole et ce qu’il me dit me glaça d’effroi :

« Je pense que tu dois le voir du coin de l’œil. L’esprit est à côté de nous. »

Et je le remarquai. Notre cave n’est pas une cave ordinaire. À la périphérie de ma vision, je le voyais. Il avait de grands yeux bleus sans expression. Il m’observait. Je tournai immédiatement la tête pour le voir mais, évidemment, il n’était plus là. Il était de l’autre côté. Encore aujourd'hui, après deux ans, je sens encore sa présence. D’ailleurs vous ne la sentez pas vous ? Vous ne voyez pas l’ombre à l’angle de votre œil ?

J’étais sorti en courant. Mon père avait éteint et refermé la porte. Tremblant je m’étais assis sur une marche. Je posai alors la question qui me retournait le cerveau depuis tout à l’heure :

« Papa, qu’est-ce qui arrive si on allume avant ?

- J’avais un frère, commença-t-il d’un air sombre. Tu ne l’as jamais connu puisqu’il est décédé très jeune. Il avait dix ans c’est arrivé. J’étais à l’étage quand j’ai entendu son hurlement. Il avait allumé avant. On n’a jamais retrouvé son corps.

- Pourquoi on ne déménage pas ? Après ce que tu m’as dit, je ne veux plus habiter ici.

- Cette maison est dans la famille depuis très longtemps. Pense à ceux qui ne connaissent pas le secret. Je ne veux pas être responsable de la mort d’innocents. La meilleure chose à faire est de rester.

- Je comprends. »

En vérité, je ne comprenais pas vraiment. J’avais treize ans et étais totalement terrifié par cet esprit qui n’était pas une blague, mais bien réel. Nous étions remontés et j’avais foncé dans ma chambre. Je m’étais assis par terre, contre la porte. J’étais affreusement terrifié par tout ce que je venais d’apprendre.

« Grand frère, grand frère, alors qu’est-ce que c’était ? »

Ma sœur était devant moi. Elle avait dû rentrer pendant mon absence. Je l’avais prise dans mes bras avant de lui dire :

« Julie, je ne peux pas t’en parler, mais je t’en supplie, ne va jamais à la cave…

- Tu m’avais dit que tu me dirais !

- Julie… S’il-te-plaît… »

J’avais fondu en larme. Je ne veux pas perdre ma petite sœur, je ne veux pas qu’elle meurt. Julie m’avait fait un câlin avant de déclarer :

« D’accord, je n’irais pas. Mais arrête de pleurer grand frère... »

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