LXXXII.

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332.


Lorsque j'étais adolescente, je faisais du théâtre au lycée où j'étais élève.

Un jour, un camarade qui était dans le même groupe de théâtre se mit à genoux devant moi et s'écria sur un ton éloquent:

"Oh, moi, je suis Julien Sorel et toi, tu es Madame de Rênal."

J'étais bien embêtée.

Comment interpréter cette phrase?
D'un côté, j'en pinçais un peu pour ce garçon, et j'étais flattée d'entrevoir dans ces propos une déclaration d'amour.

De l'autre, j'avais lu le livre Le Rouge et le Noir, très attentivement même. Et pour moi, il était évident, mais alors plus qu'évident que Julien Sorel n'était pas, mais alors absolument pas, amoureux de Madame de Rênal, et que l'unique chose qui l'importait finalement était sa promotion sociale.

Du coup, j'étais partagée.

Je ne relevai pas et quelque temps plus tard, pendant un voyage scolaire en Italie, le pot aux roses: un autre camarade m'avoua qu'en fait ce garçon était amoureux de moi et que je n'avais pas su le voir, comme une imbécile et une naïve, lors de sa tirade-citation du Rouge et le Noir.
Alors, folle de joie, je cours, je le cherche, je me dis que s'il m'aime, s'il m'aime vraiment, son sentiment sera toujours valable, forcément.
Je le trouve, sur le pont du bateau qui nous menait à Naples.
Avec une autre.
Avec la jeune première de la troupe de théâtre, de bien meilleure famille que moi.

C'était trop tard.
Je tentai de récupérer le coup, mais c'était trop tard.

Je me suis longtemps culpabilisée de n'avoir pas su voir l'amour à temps.
Mais maintenant, je sais aussi que cet échec m'a épargné des déboires bien plus grands en particulier celui de m'engager dans une histoire d'amour qui n'en n'était pas vraiment.
C'est à partir du moment que j'ai pris conscience de cela que ma culpabilité a commencé à disparaître, peu à peu pour commencer, puis totalement.


333.

Le monde est cyclique. Le jour succède à la nuit, la paix à la guerre.

Mais parfois, la paix n'est pas ce que nous imaginons.



334.

Lorsque je raconte l'histoire de ma vie, les gens souvent me disent: "oh là là, pauvre de toi".

Sauf que parfois ces gens vivent des choses autant sinon pire que les miennes, mais ils ne s'en rendent pas compte, c'est tout.
La seule différence entre eux et moi, c'est que moi je m'en suis rendue compte, mais eux pas encore.

Et parmi les gens qui me plaignent, il y a aussi celles et ceux qui font vivre aux autres des choses autant sinon pires que celles que je vis.
Alors, eux, c'est clair qu'ils ne se rendent compte de rien.
Cela serait pas mal pourtant, qu'ils fassent tomber leur forteresse et se reconnectent à leur cœur.
Sauf que j'ai décidé que ça, ça n'est plus mon problème, c'est leur problème.



335.

J'ai appris que Manuel Valls aurait déclaré qu'il mettrait tout en œuvre pour protéger les Juifs de France.

Quelques jours plus tard, qui plus est, le jour dédié à l'Holocauste, la France reçoit en grande pompe le président de l'Iran.
Enfin, j'y connais pas grand chose en relations internationales, mais personnellement, si la personne censée me protéger recevait mon pire ennemi, qui plus est le jour censé commémorer mes souffrances, personnellement, j'y verrais un affront.

D'ailleurs, il venait faire quoi au juste le président de l'Iran en France? Acheter des Airbus?
Oui, Paris vaut bien une messe, comme dirait l'autre ...
Enfin en attendant, l'Italie a dû couvrir ses nus pour ne pas choquer Monsieur, mais pourquoi? Il aime pas les femmes, Monsieur le Président?

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