La catastrophe de Linéa

4 minutes de lecture

ÉPISODE 1 : Une nouvelle Terre.

La catastrophe de Linéa

   Taak se précipite dans les toilettes du bar. L'abus de bière lui impose de devoir vider sa vessie assez rapidement. Il pousse une porte battante et pénètre dans cette pièce où tout ce que l'on y fait est tabou. Elle lui paraît étonnamment propre, mais pas le temps de s’attarder sur l'état des lieux. Il ne peut plus se retenir. Il se dirige vers ces trois urinoirs et se place devant celui du milieu, ouvre la fermeture éclair de son short en jean, attrape son sexe de sa main droite quand enfin, il est parcouru par cette sensation de soulagement.

   Derrière lui, la porte s'ouvre à nouveau et un autre jeune homme vient se placer à ses côtés pour faire la même chose. Taak ne peut s'empêcher de jeter un coup d’œil discret sur les attributs de son voisin, mais il ne s'attarde pas. Une fois, alors qu'il était un peu plus saoul qu'il ne l'est actuellement, il ne put détourner son regard du pénis mou d'un de ses gars un peu trop machos ; ce dernier ne tarda pas à lui lancer un crochet musclé dans la figure, ce qui lui vaut à ce jour cette petite cicatrise qui parcourt obliquement son sourcil gauche. Cette fois-ci, il sait se maîtriser et quitte du regard le sexe de l'inconnu. Il laisse s'échapper les dernières gouttes d'urines de son méat avant de ranger son outillage dans son boxer et de refermer le zip. Il glisse sa main dans son sous-vêtement pour remettre ses bourses bien en place et tenter de calmer son organe qui commençait à durcir. Il tire la chasse, se dirige aux lavabo, se mouille rapidement les mains histoire de dire qu'il se les ait lavées avant de les sécher sur son maillot, puis il regagne le bar, l'esprit embué par un mélange d'odeur de liqueur et de tabac, ses pensées inavouables mises de côté.

   Au comptoir, seul, dévisagé par tous ces individus qui physiquement lui ressemblent, il tente de comprendre. Comprendre qui il est. Il a quelques bribes furtives d'un accident, à priori quelque chose d'une grande ampleur, mais c'est tout ce dont il se souvient. Il n'a pas beaucoup de souvenirs et l'alcool dissipe le peu de cohérence qu'il puisse leur accorder.

   Et puis les bouteilles se mettent à trembler. Les verres tintent les uns contre les autres et les liquides vacillent. L'alcool ? Puis les ronds d'eau qui se forment à la surface du verre de Taak s’amplifient et un grondement sourd résonne et vient faire trembler les murs. Les gens s'affolent. Les ondes sourdes et écrasantes deviennent de plus en plus angoissantes. Taak se rue dehors, se retourne et constate que le pire est sur le point d'arriver.

   C'est un vaisseau immense, un disque percé en son centre par une passerelle horizontale qui dépasse d'un bout à l'autre de l’auréole, moderne, massif et abîmé, qui s’apprête à s'écraser sur cette petite ville tranquille. La gravité lui fait prendre de la vitesse et les frictions des parois avec l'atmosphère le consument lentement. Puis il s'embrase et éclate dans une déflagration indescriptible et assourdissante. Taak se précipite dans le bar et saisit sa sacoche qui contient ses carnets de dessins avant de prendre la fuite.

   Linéa, comme son nom l'indique, est une succession d'habitations futuristes alignées les unes aux autres sur une bande de composite. Cette ligne droite est pincée entre une faille vertigineuse et un désert aride. Pas le choix, il doit courir droit devant, s'enfoncer vers l'inconnu dans ce désert inhospitalier.

   Il court sur ce sable chaud qui avale ses pieds, l'obligeant à redoubler d'efforts pour pouvoir avancer. La cadence est rude, mais derrière lui, les premiers débris de cet imposant vaisseau commencent à s'écraser, pulvérisant le paysage. Il s'essouffle, mais ne ralentit pas. L'instinct de survie est trop fort. Il faut qu'il s'en sorte. Soudain, il s'immobilise. Sous ses pieds le sol semble se soulever.

   Une épaisse pointe de fer s'extirpe du sable, manquant de l'empaler. Il recule et laisse cette dague poursuivre son ascension, spectateur de ce retournement de situation. En réalité, des pointes comme celle-ci il y en a des dizaines, tout autour, et à mesure qu'elles poussent vers le ciel, elles s'élargissent, laissant deviner qu'il s'agit de vaisseaux. Taak ne perd pas une minute et s'agrippe à l'une de ses fusées alors que certaines ont déjà quitté ce sol sableux. Elles sont toutes d'une taille impressionnante et leur force permet de les propulser assez rapidement vers les couches supérieures de l'atmosphère. Taak panique, car le vaisseau sur lequel il est accroché gagne en vitesse et, de ce fait, il devient de plus en plus difficile de résister aux forces exercées. Il jette un œil sur Linéa qu'il voit rétrécir à mesure qu'il s'en éloigne ; une ville arrosée de feu, rasée par les dégâts d'un vaisseau en perdition.

   Taak lutte pour survivre. Il ne lâche pas prise. Il se crispe, hurle pour se donner du courage, mais également parce que ses bras ne vont plus tenir très longtemps. Quelques centimètres plus haut, une trappe semble se dessiner. Alors que l'air commence à manquer, une seule priorité l'occupe, entrer dans cette fusée, sauver sa peau, survivre.

Annotations

Vous aimez lire Elji et l'Univers ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0