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Charlie aime bien Gaspard, car ce dernier lui raconte son pays. Dubois-Jacob et Maxwell ramènent toujours la conversation sur ce pays fabuleux et leurs difficultés pour trouver ces échantillons, avec un petit air de mépris pour les deux jeunes chercheurs qui ne le connaissent pas. Gaspard lui a parlé de la légende, mais encore plus : il a fait parler sa tante à son retour du lieu sacré. Elle lui avait dit connaitre tous les hommes qui ont tenté l’expérience, du moins ceux qui l’ont réussi. Sur ceux qui n’en sont pas revenus ou qui l’ont ratée, elle n’a rien voulu révéler, mais ses yeux trahissaient des horreurs. Il l’avait poussée gentiment, mais facilement, car elle avait envie de parler à ce garçon pour lequel elle avait de la tendresse depuis toujours, reportant sur lui son absence d’enfant. Il ne se souvenait plus de toute l’histoire, mais il avait compris que sa tante avait une force morale peu commune, vivant seule et s’occupant des autres. Elle lui avait raconté l’effet du venin, la puissance qu’il donnait et l’immense épuisement qui venait ensuite. Cet effet ne se dissipait pas complètement. Sa clairvoyance, notamment, venait de ce moment.

Charlie l’écoute, passionné, car Jacob et Maxwell n’avaient jamais pu obtenir de témoignage de « victimes ». Grâce à Gaspard, il peut donc avoir une avance sur eux ! Mais il veut des informations plus précises. Sa tante ne sait ni lire ni écrire, et le courrier mettrait des semaines. Le mieux est de lui téléphoner. Gaspard réussit à obtenir son accord et, pendant des heures, le plus long étant d’obtenir la communication qui tombe régulièrement, il écoute Charlie l’interroger sur les effets sur elle et ce qu’elle a constaté en bien et en mal chez les hommes qui ont subi l’épreuve, en traduisant souvent ses réponses empreintes de patois local, Charlie noircit des feuilles, avec le combiné coincé sur l’épaule. Quand ils raccrochent, Charlie saute au cou de Gaspard, le couvrant de baisers et de remerciements. Depuis, Gaspard peut tout lui demander : c’est comme ça qu’il sait dans quels vivariums prélever les bêtes. Pour la partie technique, il a trop aidé René et Roger lors de la double ouverture des boites : il sait faire ! Même pour attraper une bête, il saura faire.

Gaspard se demande s’il doit avertir Charlie de son « emprunt » à venir, car il lui voue une vraie affection amicale et il sait que les retombées dans le laboratoire vont être terribles. Cependant, il doit avant tout fidélité à sa mission et à son pays.

Le second problème a donc été résolu très facilement, selon une méthode classique. Gaspard avait bien enregistré que le laboratoire était verrouillé la nuit et que seul le garde de jour en a la clé. Cet homme, qui est toujours le même, le connait bien, car il vient déguster les gâteaux. Gaspard ne manque jamais de le saluer et de discuter avec lui, comme on le fait entre petites gens. Il a ainsi appris qu’un double se trouve à l’administration, où lui-même dépose ses clés le soir. Cette salle est constamment fermée et gardée. C’est en papotant que l’évidence lui apparut. Le laboratoire n’est pas gardé pour ses secrets, mais pour le danger qu’il représente. C’est pour ça qu’il doit toujours y avoir un gardien quand il n’est pas fermé à clé. Mais, alors, quand le gardien a un besoin pressant ? Eh bien, il doit trouver un remplaçant, avec toujours la clé sur la table. Étant devenus copains, Gaspard tient la permanence pour dépanner le garde, puisqu’il est, lui aussi, accrédité. Pour une fois, sa formation lui est utile, car dès le premier jour, il repart avec un moulage en cire de la clé. Il se rend immédiatement compte que la difficulté n’est pas celle qu’on vous enseigne ! Le premier serrurier refuse sèchement, promettant d’aller à la police, car il lui semble évident que c’est une tentative de cambriolage. Gaspard doit inventer une histoire, et ce n’est que le quatrième qui accepte. Le deuxième écueil est la distance entre la théorie et la pratique, car il n’y a que dans les cours et les livres que cette technique fonctionne. Pendant une semaine, il doit rapporter un nouveau moulage et la clé pour qu’enfin, elle actionne la serrure. Heureusement que son copain le garde est vieillissant et souffre de la prostate.

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