Tablette Embered

6 minutes de lecture

Calmée par le départ de l’ancien Exetra Prime, les harzerezhiés commencèrent à se disperser jusqu’à voir Sirux trainant un chariot derrière lui. Dessus, le visage presque apaisé, les deux défunts enveloppés d’un drap maculé s’y reposaient. Guidomex émergea de l’amas d’eraiés pour les rejoindre.

Puis il leur raconta.

« Pourquoi est-il partit ? Pourquoi maintenant ?demanda Sirux.

— Depuis qu’il est parmi nous, nous ne lui avons accordé que dédain. Il n’y a rien d’étonnant à son départ, répondit Vallia en fixant le chemin précédemment emprunté par Ashron.

— Hors de question ! s’agaça Haria. Je n’ai pas supporté sa présence qu’il nous laisse tomber maintenant ! »

Guidomex fixa sa compagne, perplexe, pour la voir dessiner un timide sourire, qu’elle effaça aussitôt les yeux de l’eraié sur elle.

« Alors nous savons ce qu’il nous reste à faire, conclut Mayelle en tournant les talons. »

Accompagnée de Vallia et Guidomex, l’eraiéé partit à la poursuite de l’ancien Exetra Prime en espérant l’intercepter avant qu’il ne quitte Alaris. Et après une marche à pas pressé, Guidomex aperçût la silhouette de leur cible en train de récupérer des vivres.

« Alors tu comptes nous dépouiller avant de nous abandonner ? lui demanda-t-il en arrivant à sa hauteur.

— Je ne prends pas grand-chose »

Soudain, Mayelle se précipita sur lui, l’obligeant à tout lâcher pour l’accueillir. Sans broncher, il l’enserra pour lui dire au revoir. Puis après quelque instant, elle relâcha son étreinte et lui permit de voir le visage de Vallia. Ses yeux ne le fixaient pas comme le monstre qu’il pensait être. Ces iris contrariés dégageaient une douceur qu’il ne pouvait pas lâcher du regard.

Mais son prochain combat devait être solitaire.

« Pourquoi pars-tu sans nous ? lui demanda Vallia.

— Je ne veux pas recommencer, répondit Ashron en laissant son regard les parcourir, tour à tour. Qui sait si je ne suis pas un fou en liberté ?

— Si tu recommences, je t’arrêterai !

— Je te dois des excuses, ajouta Guidomex en se postant devant Ashron, les yeux rivés sur les siens. Nous n’avons pas été justes avec toi. Ce sont les Axems les monstres, pas toi. »

L’ancien Exetra Prime resta un instant à décortiquer les mots de son ami dans son esprit. Malgré le sentiment qu’ils lui provoquaient, et l’envie que son prochain périple se fasse avec eux, il ne pouvait se résoudre à les laisser l’accompagner.

Il avait peur pour eux.

« Je ne peux pas vous demander de m’accompagner. Mes prochaines cibles sont les Exetras Primes. Je ne compte plus les attendre et aller à leur rencontre.

— Ta sollicitude prouve mes dires.

— L’affaire est entendue ! conclut Mayelle en prenant la main d’Ashron. »

Avait-il réussit à changer quelques regards sur lui ? se demanda-il en se laissant entrainer par l’eraiéé vers le chemin du retour. Mais tout en marchant, Ashron laissa son esprit se remémorer l’anormal sentiment qu’il avait ressenti pendant sa folie meurtrière. Malgré son amnésie, un savoir universel l’avait envahi avant d’attaquer Maragor. Pendant un instant, l’ultime connaissance d’Era avait été à sa portée.

Son cycle de la Via lui était apparu.

Arrivés devant un des nijves de la Komunozhra, Guidomex chercha du regard Sirux et Haria. Il les trouva devant une passerelle déployée à l’avant de l’engin.

« Tu es revenu sur ta décision d’edroch, lança Haria en fusillant Ashron du regard,

— Content que tu sois des nôtres, approuva Sirux en lui posant une main amicale sur l’épaule. Et merci de nous avoir sauvés. »

Peu habitué par de telles familiarité, Ashron répondit par un timide sourire, puis tous empruntèrent la passerelle pour traverser un sas donnant sur une grande pièce circulaire. A gauche était disposée une table en bois udranié, accompagnée de ses chaises forgées dans les mines lamisiéés. Au centre, un hologramme représentant la géographie du secteur trônait en lévitation, entouré par des écrans de contrôle garnis d’informations relatives au nijve.

Dans un engouement perceptible, Sirux les emmena à l’avant de l’appareil vers la cabine de pilotage. Parmi la multitude d’instruments de bords permettant l’utilisation de l’engin, six chaises, dont une en son centre, étaient disposées en ses quatre coins.

« Ici, on peut contrôler le nijve, le piloter, l’armer et gérer la navigation, expliqua Sirux avant de tourner les talons prestement. »

Avec un peu de mal à suivre, tous ressortirent pour traverser la salle et se diriger vers l’arrière, atteignant ainsi un escalier qui les mènerait au niveau supérieur.

« Et là on a les cabines de repos. Il y en a dix, avec chacune plusieurs lits superposés donc nous avons de quoi faire, continua à expliquer Sirux en avançant rapidement. »

Après avoir cheminés le long d’un couloir artificiellement éclairé, un escalier descendant apparut à sa fin. Au bout de ce dernier, ils découvrirent une grande salle de stockage remplie de vivres et d’équipements. A sa gauche et à sa droite, deux portes la bordaient. L’une d’entre elles menait à la pièce servant au transport de troupes, vide, tandis que l’autre menait au hangar à l’intérieur duquel trônait un aerliestr flambant neuf.

Puis ils retournèrent dans la salle centrale.

« Où va-t-on maintenant ? demanda Guidomex en s’asseyant le premier.

— Nous devons trouver un endroit pour enterrer Adony et Killei, répondit Sirux.

— Yvalis, proposa Vallia. C’est un petit village paisible, l’endroit idéal.»

Unanimement approuvée, la destination fut affichée par Sirux qui s’était précipité dans la cabine de pilotage. Depuis son entrée dans le nijve, prendre les commandes de l’engin le taraudait au point de légèrement apaiser sa peine.

L’ayant précédé, Haria s’installa dans le siège de copilote à ses côtés. A l’avant de la cabine, ils surplombaient l’immense verrière donnant sur l’extérieur. Toutes données de navigation utiles y étaient également projetées par un afficheur tête haute. Puis les autres places disséminés çà et là trouvèrent ensuite preneurs auprès de Mayelle, de Vallia et d’Ashron.

Guidomex fixa le fauteuil central affublé d’un imposant écran de contrôle et s’en approcha. Confortement installé, il activa la console, fixa ses yeux dessus et désigna la destination programmé par Sirux, enclenchant ainsi la projection du chemin sur la verrière du cockpit.

D’un geste assuré, Sirux activa les réacteurs d’amatia et tira sur les gouvernes en face de lui. L’instant d’après, d’importantes vibrations étreignirent le nijve au point de faire trembler les sièges de chacun. Puis tous ressentirent une sensation de lévitation et à travers l’immense verrière de la cabine, chacun put voir le sol qui s’éloignait lentement.

Au bout de quelques instants, Sirux aligna l’imposante machine sur le cap à suivre et, de sa main droite, enclencha la manette d’amatia. Les vibrations se calmèrent, permettant ainsi à l’eraié d’empoigner fermement les gouvernes à deux mains, avant que l’engin ne commençât à prendre de la vitesse pour rapidement ne laisser qu’un horizon défilant comme seul paysage à admirer.

La vitesse de croisière atteinte, Ashron se leva pour rejoindre la salle centrale qu’il nomma unilatéralement « le Hub ». Installé à la grande tablé, seul, le débat précédant son départ d’Alaris avec les eraiés lui revient en mémoire. Pourquoi les espions ne les avaient pas prévenus que quatre nijves étaient partis d’Adrais ? se demanda-t-il, le coude gauche soutenant sa tête posé sur l’accoudoir.

« Yvalis en vue ! cria Sirux derrière Ashron»

Puis avec une précision de pilote expérimenté, Sirux dirigea le nijve vers un espace dégagé pour habillement l’y poser. Prestement, le groupe sorti et s’éloigna de l’engin, les corps d’Adony et de Killei tirés par le chariot récupéré à Alaris, pour rejoindre leur destination.

Arrivés à l’embered d’Yvalis, Ashron et Sirux posèrent les dépouilles et creusèrent les deux trous qui accueilleraient leurs compagnons. Les sépultures prêtes, ils déposèrent leurs défunts amis pour ensuite les recouvrir avec la terre précédemment enlevée, aidés cette fois ci par tous.

Un long silence de recueillement s’écoula durant lequel tous fixèrent les deux tombes. Quelques mots pour son compagnon furent prononcer par Sirux, et c’est Guidomex qui se chargea d’en faire de même pour Adony. Ashron murmura dans son esprit ce qu’il aurait aimé dire à celui qu’il avait toujours considéré comme son meilleur ami. Puis le silence reprit son œuvre et pendant encore un long moment, à la fois calme et oppressant, aucun bruit ne vint perturber le groupe.

« Nous reviendrons ici lorsque la Komunozhra ne sera plus! se décida à dire Ashron en tournant les talons, suivi par les autres. »

Seul Sirux ne put s’empêcher de se retourner et de regarder, au loin, la tombe de Killei, les yeux rougis par les larmes.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire lockeff ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0