Révélations

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Après une semaine le genou de Caro est quasiment guéri et la moitié de ses affaires est déjà chez moi.

"On en a mis du temps... me dit-elle à l'oreille.

_ C'est le moins qu'on puisse dire. C'était pourtant devant nos yeux toutes ces années.

_ Qu'est-ce qu'on fait pour John, Sophie, et les autres ?

_ J'en sais rien... Je pense qu'il faut confronter ceux qui savent.

_ Pourquoi pas la procureur ? Elle doit venir au journal pour une interview cette semaine.

_ Tu n'es pas sur le coup ?

_ Moi non... sourit-elle.

_ Mireille oui ?! Une occasion en or!"

Je jubile. Avec les informations que nous avons réussi à récolter, la procureur va bien être obligée de répondre à nos accusations.

"Cette interview, elle est en direct ?

_ Oui bien sûr, retransmise sur tous les réseaux sociaux et les plateformes d'information.

_ C'est PAR-FAIT Caro! On la tient, elle et tous les pourris qui balancent de la poudre aux yeux des gens.

_ Le rêve qu'ils ont vendu va leur coûter très cher si tu veux mon avis."

L'interview est mercredi soir. Cette histoire aura au moins permis à notre trio de se trouver. 

Aujourd'hui je n'espère qu'une chose... Que John et Sophie soient encore en vie quelque part.
Au bureau je ne tiens plus en place, chaque heure me rapproche de la fin de cette histoire. Confronter la procureur à ses responsabilités, révéler la machination qui se trame derrière l'entrain de ce soit disant nouveau système... Maintenant que tout me parait clair je me rends compte que j'arrive au bout de quelque chose. Pendant quelques semaines j'ai réussi à sortir de mon cadre de vie monotone, j'ai eu un but et ça m'a fait vivre deux fois plus fort que ces dix dernières années.

Je ne peux plus rester coincé dans ce poste merdique, j'ai besoin de faire quelque chose qui a du sens.
Par dessus tout, j'ai trouvé Caro. J'ai détecté en moi des sentiments que je ne pensais pas ressentir un jour, j'ai redécouvert cette femme qui a finalement toujours partagé ma vie.

Lorsque je sors du lit, je suis déjà stressé. On est mercredi, c'est le jour où tout ça prend fin. J'ai hâte que la vérité éclate, j'ai peur que quelque chose l'entrave. Caro et Mireille sont sur le qui-vive toute la journée, préparant une à une les questions qui vont être posées. Je tourne en rond dans mon bureau... Il est déjà 17h et j'ai le cœur compressé par l'anxiété. Dans quelques heures, les gens sauront qu'on leur cache des atrocités, qu'on joue avec leurs vies.

"Tout est prêt, Mireille est en place. Je dois rester à l'extérieur du salon d'interview. Je reste au bureau tant que ce n'est pas fini. T'es où ?"

Je réponds immédiatement, recroquevillé en tailleur sur le canapé. 

"Je suis à la maison. J'ai les yeux rivés sur l'écran. J'attends!!!"

Pendant plusieurs minutes, la maison est plongée dans un silence de mort. J'ai coupé le son de la tablette jusqu'à ce que l'interview commence. Ma tête va exploser, j'ai la poitrine qui se serre à chaque publicité qui me rapproche de l'issue. Soudain, la caméra se braque sur la procureur. Elle est élégante dans son tailleur, assise sur le bord d'un fauteuil Napoléon III. Cette femme me débecte, je la déteste de tout mon corps. Comment peut-on trahir autant les personnes qui nous ont élu et nous font confiance?!

Mireille rentre dans la pièce une tablette à la main. Elle s'assoie en face de la procureur, l'air stressé.

Tout est entre tes mains ma Mireille!

Je m'arrête presque de respirer quand mon amie commence l'interview. J'ai envie de mettre la séquence sur avance rapide pour que ce soit enfin terminé. Les questions s'enchaînent sur les globes, leur fonctionnement, les enjeux de ces prochaines années... Mais soudain Mireille enclenche le compte à rebours final.

"Dites-moi madame la procureur, ça vous fait quoi aujourd'hui de faire disparaître des gens comme ça, arbitrairement ?

 _ Pa...Pardon ?

_ Où jetez-vous les corps après avoir extrait les connaissances que vous estimez utiles ?

_ Enfin mademoiselle, de quoi parlez-vous ?!

_ Voyez-vous... Il n'y a pas que vous qui savez mettre votre nez dans la vie des autres. Certains citoyens ne sont pas dupes. Nous savons que vous avez fait construire ce centre de conservation des données! Nous savons que les disparitions ne sont pas hasardeuses mais planifiées! Nous connaissons également les raisons qui vous poussent à supprimer ces gens... Vous nous en dites plus ce soir ?

_ Mais vous êtes complètement folle ma parole!"

La procureur se lève pour sortir de la pièce mais la porte reste fermée.

"Vous n'êtes pas la seule à avoir des amis dans la police, madame. reprend Mireille impassible.

_ Que voulez-vous ?

_ La vérité ! Tout le monde est devant son écran à vous écouterce soir. Vous êtes en direct alors... Répondez! Vous ne sortirez pas libre de cette pièce de toutes manières. Nous avons de quoi vous mettre derrière les barreaux pendant un bon bout de temps!"

La procureur se rassoie et le silence s'installe dans la pièce comme à l'antenne. Elle a l'air comme prise au piège, elle va capituler.

"Oui nous avons fait construire ce centre de stockage pour les datas, c'est vrai. Vous devez savoir que la maladie d'Alzheimer, qui est aujourd'hui notre pire ennemi, ne cesse de progresser.

_ Nous savons tout ça! la coupe Mireille agacée.

_ Nous pensions que les globes serviraient à rendre la vie sur Terre possible encore plusieurs millions d'années. Mais les gouvernements n'ont plus l'argent pour entretenir tout le monde! Ces personnes coûtent tellement à notre société ! Il fallait que les gens croient à cette immortalité pour ne pas se poser de question! La médecine actuelle nous permet de rester en vie, mais ce n'est pas dans l'ordre des choses! Nous ne cessons de bousculer l'ordre naturel préétabli et ça ne pouvait pas continuer comme cela."

C'est une blague, elle pleure maintenant...

"En effet oui, ça ne peut plus continuer comme cela. Vous ne pensiez tout de même pas vous en tirez comme ça ?!

_ Vous ne comprenez pas... Tout cela est nécessaire si nous voulons continuer à mener ce train de vie. La planète ne peut plus supporter ses onze milliards d'habitants, elle suffoque! Le système financier des nations s'effondre, à trop vouloir combattre la nature."

L'interview se coupa nette. Je suis coincé sur la canapé sans pouvoir bouger le moindre orteil.

"Alors c'est tout? C'est fini ? je demande à Caro à l'autre bout du fil.

_ Je viens de voir Mireille, la procureur a été arrêtée. D'autres membres du gouvernement sont recherchés. C'est fini cette fois-ci.

_ Et John, Sophie... Et les autres ?

_ Je suis en route... On se retrouve à la maison." dit-elle doucement.

Elle s'assoie sur le canapé près de moi alors qu'elle n'a même pas retiré ses chaussures. Sa mine est triste, je ne comprends pas... On a réussi à lever le voile sur toute cette histoire. On a sûrement sauver des tas de gens mais Caro a l'air encore plus dépitée que quelques jours auparavant.

"Qu'est-ce qu'il y a ? Tu ne me dis pas tout je le sais. Y a qu'à voir ta tête!

_ Cette femme a donné une adresse aux autorités, c'était celle du centre de conservation. Il y avait des gens là-bas, la plupart figuraient sur la liste que l'on a trouvée.

_ C'est super!

_ Ils sont morts Marc."

***

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