Le sommeil

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2 mois, 6 jours, 13 heures qu’elle ne dormait plus. Son sommeil était fragmenté.

Elle avait toujours eu de la difficulté à comprendre le monde autour d’elle. Elle n’avait jamais réellement saisi l’essence de son existence. Parfois, elle en venait à se demander ce qu’elle faisait là. La grande question du pourquoi qui la gardait éveillée, qui alimentait ses insomnies et, qui lui coupait le souffle, parfois, l’écrasante puissance de cette question.

Le poids des attentes, des questions sans réponse, et du sentiment profond de ne pas appartenir au monde qui l’entourait, la mettait dans un état d’alerte constante. Elle se sentait oppressée par tout, par les voitures, les embouteillages, les arbres, les vagues qui, elles, avaient la chance de finir leur course. Elle leur enviait leur simplicité et leur destin: trouver leur plage et s’y jeter corps et âme.

Elle aussi avait envie de trouver sa plage.

Il y a pire que d’avoir mille choses à faire, il y a de n’en avoir aucune pour alimenter les jours et les heures.

L’ennui, le vide, le regard au plus profond du brouillard et le cœur qui bat au rythme des heures, elle s’ennuyait de son quotidien. Un quotidien fade et insipide qui lui donnait envie de se jeter d’une falaise, juste pour la sensation.

Elle avait eu des envies, elle avait eu des rêves, mais elle avait tout sacrifié pour le confort et la sécurité d’un travail ennuyeux, mais sûr. Lorsque la nuit tombait et que le poids de sa respiration l’écrasait, elle essayait de se souvenir de ces moments heureux, des instants où elle s’était sentie vivante, des moments où chaque bouffée d’air ne lui faisait pas se sentir comme une condamnée à perpétuité.

Puis il y avait eu un bar, un portefeuille, une boisson et une Mélissa.

Puis il y avait eu des rires, des disputes, des discussions sans fin, des couchés de soleil, il y avait eu leurs routines et la manière dont Mélissa défendait toujours tout le monde. Il y avait eu la douce quiétude des samedis après-midi lorsqu’elle regardait Mélissa dessiner et que Mélissa la regardait écrire. Il y avait eu le partage et l’acceptation totale de ce qu’elle était. Il y avait eu des regards, des moments, des confidences partagées et des instants volés au reste du monde.

Elle avait trouvé la réponse à son pourquoi, elle avait trouvé sa plage, elle avait trouvé le sommeil.

Et puis, il n’y avait plus eu Mélissa.

Elle ne dormait plus.

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