Chapitre 6

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Hans courait à perdre haleine, mais ses jambes patinaient sur place... incapable de distancer son poursuivant. Mais qui était à sa poursuite ? Il avait trop peur de se retourner pour le voir... Kurt Guterman peut-être... à de nombreuses reprises, ce matelot lui avait vertement fait comprendre à quel point il ne l'appréciait pas.

Etait-ce le Capitaine ? Mais non voyons, il était plutôt satisfait de son service. Alors il devait s'agir de son père, ou plus exactement de son beau-père car Hans était né « de père inconnu » et l'homme que sa mère avait épousé l'avait toujours détesté, et cette haine était réciproque...

il ne fallait pas qu'il le rattrape...

— « Hans! » fit une voix suave et féminine.

Il était poursuivi par une femme !

Surpris par cette découverte il perdit l'équilibre et atterit sur un tapis de soie rouge vif, "écarlate"... C'est ainsi que le sorcier nommait cette couleur. Il voulu fuir à quatre pattes, mais elle lui saisit les mains et le releva de force. Bientôt, le visage de la femme écarlate fut tout proche du sien.

Il pouvait sentir la chaleur de son souffle. Elle lui posa les mains sur sa robe de soie couverte de pierres précieuse et l'enlaça.

— Pourquoi t'enfuir, Hans ? Tu sais que tu peux tout obtenir de moi. Fortune, richesse, puissance. Et tout ce que tu peux désirer d'autre...

Elle avait raison, et il le savait... il cessa de résister. Mais en même temps, une autre voix, une voix masculine, lui donnait des ordres, mais il n'en comprenait pas le sens.

Et soudain, la femme rouge se mit à le regarder fixement. Sa bouche s'entrouvrit et un mince filet de sang commença à couler. Mais elle ne mourut pas... elle saisit des deux mains le visage de Hans et l'embrassa fougueusement. Hans était terrifié, et en même temps, le gout et l'odeur du sang tiède le plongeaient dans une sorte d'extase.

Enfin, elle se décida à tomber. Son corps s'écroula sur la nappe de satin rouge sur laquelle lui même se trouvait. Il serrait encore à la main un couteau ensanglanté. Etait-ce lui qui l'avait tué ? Et qui d'autre sinon ? Quelqu'un l'avait-il vu ? Affolé, il se tourna dans toutes les directions...

À sa gauche, un groupe de soldats l'observaient sans rien dire. Non ! Ce n'était pas des soldats, c'était des guerriers portant des haches de batailles et de grands boucliers ronds. Hans ne les avait jamais vu, mais il savait que ces hommes étaient ses ancêtres. Quelle curieuse ironie, il pouvait voir ses plus lointains ancêtre alors qu'il ignorait le nom de son propre père. À sa droite, une foule de soldats, de vrais soldats cette fois, marchaient au pas cadencé guidés par des bannières rouges et blanches ornées de Swastika. Les hauts dignitaires passaient les troupes en revues, mais ils semblaient inquiets... Le Fürher était inquiet, il ne croyait plus lui-même en la victoire.

Hans se mit à hurler: « Je reviendrai, mon Fürher ! Je retrouverai les portes de l'Agartha et je ramènerai la légion des anciens ! »

— Hans, réveille-toi ! fit Guterman.

Hans s'éveilla en sursaut... il était allongé sur sa couchette. La première chose dont il eut conscience en se réveillant fut la présence de Kurt Guterman penché au dessus de lui. La dernière personne qu'il souhaitait voir en se réveillant, et pourtant il y avait quelque chose de curieux. Guterman ne semblait pas furieux comme les autres fois. Il était presque souriant.

— Du calme mon bonhomme, tu as encore fait un cauchemar on dirait. Toujours le même ?

— Oui, c'était le même... est-ce que j'ai crié ?

— Tu as juste parlé, et puis, tu t'agitais beaucoup. Il vaut mieux se réveiller dans ce genre de cas. Tiens, prend un peu de café, ça va tout de suite te remettre d'aplomb.

Joignant le geste à la parole, il lui mit dans les mains une tasse fumante. Ce changement d'attitude était étonnant, Hans se doutait que le Capitaine y était sans doute pour quelque chose, mais il n'était pas rassuré pour autant... Guterman semblait avoir envie de discuter, et Hans n'en avait pas envie du tout.

Un autre marin, Ludwig Baltz, était aux côtés de Guterman. il semblait suivre leur conversation avec intérêt.

— Toujours cette femme en rouge avec du sang, pas vrai ? poursuivit Guterman.

— Oui, toujours.

— Et toujours avec les pierres précieuses.

— heu... oui je crois,

— des pierres comme celle-ci ?

Guterman lui montra l'émeraude, Hans eut un hoquet de surprise.

— Ou avez vous trouvé ça ?

— C'est sans importance Hans, il n'y a que deux choses qui comptent, c'est que nous avons une petite idée de ce qui s'est passé en Islande — notre passager fait un petit trafic et il a très probablement tué quelqu'un pour se couvrir —, et la seconde est que cette pierre vaut une petite fortune et que si le coffre en est plein, comme je le pense, il y en a assez pour que chaque personne à bord de ce bâtiment puisse vivre comme un pacha jusqu'à ses cent vingt ans. Seulement pour ça, il faut qu'on fasse son affaire au sorcier et que tu sois avec nous, tu comprends ?

— En plus, intervint Ludwig, tu es un patriote n'est ce pas ? Ce qu'on vient d'entendre ne laisse aucun doute sur ce point. Et si le «Sorcier Juif» abuse de la confiance de notre état-major pour ses trafics personnel, c'est notre devoir d'y mettre fin.

— Oui... je veux dire non! balbutia Hans qui commençait à s'affoler. Vous n'avez pas la moindre idée de ce qui s'est passé en Islande et de toute façon, le coffre n'est pas rempli de pierres précieuses... enfin, pas uniquement...

— Chut ! fit soudain Guteman.

Tout trois tendirent l'oreille. Un homme se retourna sur sa couchette en grognant puis le silence revint.

— Prends le temps de réfléchir Hans, chuchota Guterman. Avec nous trois et Karl qui est dans le coup, ça fait quatre part. Avec la moindre pierre qui vaut une véritable fortune, je te laisse deviner ce que tu pourrais faire avec la tienne... Prends le temps d'y réfléchir et on en rediscutera plus tard.

Les deux marins s'éloignèrent, laissant Hans Feuerbach à ses angoisses et ses cauchemars. Mais un homme n'avait rien manqué de leur conversation: le sergent Friedrich Albrecht, aumônier du bord.

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