C'est la salsa du démon ! Salsa du démon !

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J'entends sonner un réveil à côté de moi. Comme c'est étrange, j'étais pourtant persuadé d'avoir désactivé l'alarme. Je profère quelques insultes à son encontre et j'envoie valser mon oreiller contre cette nuisance.

( Nuisance de merde qui ose me réveiller un dimanche matin. )

Depuis quelques minutes, je suis réveillé, mais j'aime avoir les yeux fermés. Maudit réveil, laisse-moi encore profiter, rêvasser encore un peu, essayer de me remémorer ma soirée d'hier soir. Souviens-toi Alexandre, souviens-toi. Que s'est-il passé hier soir ? Tu étais en soirée avec tes amis, vous déambuliez sur le trottoir, la devanture d'un pub écossais t'a fait te marrer et tu l'as pointé du doigt. En gros titre gothique, on voyait apparaître, « Le diable incarné » avec des têtes de démons polychromes et grotesques.

( Et ensuite ? )

Ensuite, tu as proposé à tes amis d'y entrer, tu voulais te bourrer la gueule après ta rupture avec Alice.
Du coup, tu as bu quelques verres de vodka, tu abordais une jolie blonde.

( Ah ça, je m'en souviens. )

Une jolie blonde qui te tapait dans l’œil, avec sa robe moulante, t'invitant à faire un détour entre ses cuisses et ses fesses splendides bonnes à damner des saints. Que s'est-il passé après Alexandre ?

( Ah si, je me souviens. Mes amis étaient présents, ils m'ont rapporté des shots de Jägerbomb. )
( Et après ? )

( Après... J'ai un énorme trou noir. Ah les salauds, j'aurais dû remarquer à leur rire que c'était traître le Jägerbomb. )

( Mais putain, pourquoi mon bras droit me fait aussi mal ? J'ai soif et en plus, j'ai envie de pisser. )
J'ouvre les yeux, je laisse échapper un cri.

( Attends, attends, attends... Qu'est-ce que je fous sur un lit à baldaquin ?! )

Je réfléchis et j'esquisse un sourire.

( Alors c'est qui, c'est qui, qui a réussi à chopper la robe moulante ? )

D'un geste brusque, je tente de me relever, mais je ressens encore plus vivement la douleur dans mon bras droit.

( Tiens, c'est étrange, il y a du sang partout sur le drap. J'ai saigné du nez ? )

Je lève doucement mon bras.

(J'ai dû me faire mal pendant la soirée, peut-être une bagarre ? Elle avait un mec la robe moulante ? )

Mon bras droit est couvert de sang, des lettres verticales s'inscrivent dans ma chair et remonte jusqu'à mon avant-bras.

Je tente de lire :

« C.
( Dites moi que c’est une blague )
R.
( Je suis sûr que c’est du faux sang, hahahaha )
E.

( C’est moi qui me suis fait ça ? )
V.
( Je vous en supplie, non pas ça. )

E. »

D’autres marques plus profondes encore se creusent au niveau des veines. Sur le sol, une lame de rasoir ensanglanté.

( Attends, comment ça, « CRÈVE » ? )

Quelques minutes avant de comprendre ce qui lui arrive, Alexandre se met à hurler. Il hurle jusqu'à s'en déchirer les cordes vocales. Il se frappe le visage avec ses poings, persuadé d'être dans un rêve. Un rêve atroce. Un rêve qui ne va jamais se terminer.

Parce que c'est la réalité ici, pas vrai Alexandre ?

Il regarde une seconde fois son bras et voyant que l'immondice est toujours là, il se met à trembler.
Il a toujours eu peur du sang depuis l'enfance. Depuis qu'il a assisté au suicide de son père.
Il avait six ans. Il est prostré sur le lit et cette voix, cette voix sadique et féminine qui continue de lui parler, elle ne s’arrête pas.

( Pourquoi elle ne s’arrête pas ? )

Souviens-toi Alexandre, tu avais six ans, tout est de ta faute. Si tu n'avais jamais dit à papa que maman le trompait, il ne se serait jamais ouvert les veines sur le rebord de la baignoire. Tu n'aurais jamais retrouvé son corps inerte. Tu n'aurais jamais vu ces lames de rasoir. Tout est de ta faute.

Au loin, il entend le bruit d'une clé qui se tourne. Des chiens qui aboient gaiement dans le jardin.
Une voix masculine qui retentit, un écho à travers cette chambre :

« Papa est rentré ma chérie ! J'espère que tu as faim, je t'ai ramené tes macarons préférés. Tu sais ceux au Jasmin là, de cette marque que tu aimes bien là, Ladurée ? »

Mais Alexandre ne répondra pas. ( Pas vrai Alexandre ? )
Il est toujours prostré sur le lit, il a les bras croisés, les coudes appuyés sur ses genoux, se balançant de haut en bas et le regard dans le vide, il se répète inlassablement la phrase suivante :

( Ça va aller ) Bien sûr que non

( Ça va aller ) Tu sais très bien pourquoi

( Ça va aller ) Tout est de ta faute

( Ça va aller ) Il est mort à cause de toi

( Ça va aller ) T’as même pas réussi

( Ça va aller ) A te suicider correctement

( Ça va aller ) T’es tellement un déchet

( Ça va aller ) Tu me fais trop rire

( Ça va aller ) Que va penser la fille de toi

( Ça va aller ) En te voyant comme ça ?

( Ça va aller ) Déchet, Déchet, Déchet

L'écho se rapproche, des pas montent les escaliers. La voix résonne encore :

« Clémentine, ça va ? Pourquoi tu ne réponds pas à Papa ? »

Les pas se précipitent alors puis une main lourde frappe à la porte.
Trois coups, trois coups d'une extrême lenteur. Trois coups d'une violence inouïe.

TOC

TOC

TOC

La porte s'ouvre et Alexandre reprend ses esprits. Il a eu le temps de s'allonger et de remettre la couverture sur lui.

Il se retourne et fait face au sombre inconnu. Il tente un sourire timide. ( Comment lui expliquer qu'il a couché avec sa fille ? ) L'homme l'observe quelques secondes puis dit :

« Bah alors Clémentine ! On répond plus à son Papa ? Si tu m'en veux encore pour hier, je comprends. C'est vrai, je l'avoue. Je n’aurais pas dû conduire la Lamborghini avec autant d'alcool dans le sang. Mais franchement, on peut avoir cette discussion plus tard, ma chérie ? »

Alexandre ne répond pas, il ne comprend pas.
L'inconnu reprend :

« Bon, je vois que tu n’es pas encore bien réveillée, tu as vraiment une sale tête aujourd'hui, tu sais ? Va prendre une douche, arrange-toi, fait quelques choses Clémentine. Je te rappelle qu'on a des invités à quatorze heures. »

Ne laissant pas le temps à Alexandre de répondre, il tourne sur ses talons et claque violemment la porte. Les pas s'éloignent.

Quelques secondes passent.

Alexandre n'avait pas remarqué l'immense miroir à côté de son lit. Un immense miroir qui lui fait face et recouvre une garde-robe. Un immense miroir qui montre Alexandre avec une poitrine, des cheveux blonds et une robe moulante.

Ah... ! Tu la connais cette robe moulante, pas vrai Alexandre ?!

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