Chapitre 2

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Felix se tenait aux côtés de Max, un livre occulte posé par dessus celui de mathématiques.

— T'es flippant avec tes monstres, lui fit remarquer son ami.

— C'est juste un livre, répondit Felix.

— Tu crois vraiment que ça plaira à Maéva ? Je sais pas moi, intéresse-toi aux voitures.

— On en est pas vraiment au stade où on partage nos hobbies.

Il tourna une page et tomba sur le croquis d'un démon avare, tous ses détails travaillés dans les nuances du fusain.

Pitié, Obane, faîtes que ce ne soit pas un avare. Ni un avide d'ailleurs. En fait si vous pouviez garder votre démon ça m'arrangerait, s'avoua Felix.

Mais sa prière était vaine, il le savait. Ses ancêtres avaient prêté allégeance aux démons il y a de cela des siècles et impossible de faire marche arrière désormais. Felix deviendrait un hôte quoi qu'il arrive.

Monsieur Mutté approcha de sa table. Felix ne réagit pas tout de suite malgré les coups de coude discrets envoyés par son voisin.

— Qu'avons-nous là, Felix ?

Le professeur attrapa l'ouvrage et le consulta.

— C'est étonnant comme lecture, pour ne pas dire glauque...

Les élèves de la classe s'agitèrent pour témoigner leur curiosité.

— Pantron, l'avare manipulateur, lut-il. Celui-là n'a pas l'air très sympathique.

À qui le dîtes-vous, pensa Felix.

Ce que redoutait le garçon arriva et Monsieur Mutté dévoila le croquis du démon au reste de la classe. Des murmures confus s'élevèrent. Felix espéra que Maéva n'y avait pas prêté attention et voulut s'en assurer. Ses yeux croisèrent les iris émeraude de la fille. Elle le regardait.

— Oh merde, murmura-t-il en se retournant.

Le professeur rendit l'ouvrage à Felix et le pria de suivre le cours.

— Quoi ?

— Maéva m'a regardé.

— Sérieux ? Avec quel genre de regard ?

— Je sais pas trop, le genre de regard que seule Maéva peut avoir.

— Inhumain ? Sans émotion ?

Felix réfléchit un instant.

— Ouais quelque chose comme ça. Elle doit me prendre pour un taré...

— Évidemment, tu vas bientôt avoir seize ans et tu lis des bouquins avec des dessins de monstres.

Évoquer l'arrivée de son anniversaire effaça Maéva de ses préoccupations. Monsieur Mutté venait de montrer le Démonologue à la classe toute entière et si sa mère l'apprenait, il passerait une semaine dans la cave. Et vu ce qu'elle contenait en ce moment, il n'en avait aucune envie. En temps normal, Felix n'aurait jamais pris le risque d'amener l'ouvrage au lycée, mais il ne lui restait plus que deux jours pour trouver une solution qui lui éviterait de devenir l'hôte d'un démon peu fréquentable. Ses parents avaient toutes sortes de rituels pour protéger la maison des visiteurs indésirables. De l'encens, du mobilier en acajou, des cadavres de rongeurs enterrés dans le jardin et même un œil de taupe accroché au-dessus de la porte d'entrée. Mais rien de tout cela ne pouvait lui venir en aide. Lorsqu'un hôte était choisi par un démon, il était impossible de le repousser.

— Dis, fit Max. Tu fais quelque chose pour ton anniversaire ? Je sais que c'est ce soir, mais on pourrait faire une soirée ou quelque chose dans le genre ce weekend ?

— Une soirée ? Chez moi ?

— Bah oui, pas chez le voisin.

Felix lâcha un pouffement incontrôlé. Une soirée d'anniversaire, chez lui, au milieu de démons vagabonds et d'objets hétéroclites en tout genre ? Bien que les démons ne puissent apparaître aux yeux des ignorants, il leur était possible de se manifester de bien des manières. Deux ou trois événements inexplicables et l'image du timbré qui vit dans une maison hantée lui serait attribuée. Puis s'il demandait l'autorisation à ses parents, ils lui riraient au nez en le remerciant pour sa blague. Non, il était hors de question d'organiser une soirée dans le manoir Malcius.

— Impossible, mes parents ne voudront jamais, répondit Felix.

— C'est dommage, tu aurais pu inviter Maéva, glissa habilement son ami.

— Maé... Tu crois qu'elle viendrait ?

— Évidemment. Tout le monde aime les soirées.

À présent, Felix hésitait. Avec l'aide de Fleur et de Clément, il pourrait chasser les parents pour une nuit et ranger la maison correctement, ce qui incluait de cacher la plupart des bibelots entreposés sur les étagères. Pour les démons vagabonds qui erraient dans les couloirs, une belle tête de sanglier dessinée à la craie sur le parquet du salon pourrait les expulser quelques temps.

Les méninges de Felix tournaient à plein régime et Max le remarqua.

— C'est oui ?

— Je crois que ça peut se faire, confirma-t-il.

— Super. J'ai mis un message sur Facebook.

— Sur Facebook ? s'étrangla Felix.

— Pas le choix, je nous vois mal demander aux filles de terminale de venir à une soirée qu'on organise. On est pas des loosers, mais pas loin quand même.

— Les filles de terminale ? Mais il s'agissait de Maéva, pas de toutes les étudiantes du bahut !

— Les garçons, un peu de calme, leur demanda monsieur Mutté.

— Pardon m'sieur, répondirent en choeur les deux adolescents.

Max laissa le professeur s'éloigner et reprit.

— Si tu veux que Maéva vienne, il faut que ses copines soient là aussi. Elle ne traîne jamais sans ses poufs.

— Bon, ok. Mais je veux pas que les gars de terminale se ramènent. Je peux pas les blairer.

— J'ai déjà prévu le coup. Le message ne peut être vu que par certains étudiants.

— T'es un génie. Préviens la bande.

— Tu vas voir, ça sera le meilleur anniversaire de ta vie, lui assura Max.

Felix soupira, excité et inquiet à la fois.

— Obane, par pitié, faites en sorte que tout se passe bien.

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