Chapitre 6 : Rendez-vous

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Vendredi 20 septembre

Juliana passa une journée joyeuse mais plutôt ordinaire, à la différence que, le soir, après le dîner, elle prépara sa valise pour le samedi matin, en discutant avec Diane, qui ne se privait pas de lui faire l'éloge de Philéas. Une fois la valise terminée, la discussion continua, puis on se coucha.

Samedi 21 septembre

Juliana se leva à 5h30 du matin, elle se prépara rapidement, en prenant soin de ne pas réveiller Diane. Puis, elle roula sa valise jusqu'à l'ascenseur, qu'elle emprunta pour descendre, juste devant le réfectoire. Une fois qu'elle y fut, elle attendit Clara, la surveillante qui devait l'accompagner jusqu'à la gare.

Sa famille avait obtenu ce service mensuel en faisant valoir les difficultés liées à leur situation géographique. L'établissement avait accepté, moyennant des frais supplémentaires.

Clara arriva après quelques minutes, et elles mangèrent ensemble dans un réfectoire vide. Elles bavardèrent joyeusement jusqu'à ce que l'horloge murale affiche 6h40, à ce moment-là, elles prirent le chemin du parking, et Juliana monta dans la voiture de Clara.

Cinq minutes plus tard, elles étaient à la gare, et Juliana se rendit sur le quai B, afin d'attendre son premier train, prévu pour 7h . Ce trajet était une suite de correspondance, qui devrait durer sept heures et vingt-et-une minutes, il lui parut vraiment long, car elle n'avait pas envie de lire, mais de discuter, alors qu'elle était seule. En désespoir de cause, elle ressassa sa semaine, et résolut de la raconter à Capucine, qu'elle brûlait de revoir.

C'est à midi qu'elle arriva à la gare de Rouen, où ses parents l'attendaient. Elle retrouva rapidement sur le parking et monta dans leur voiture.
En voyant sa mine réjouie, ils furent rassurés et se dirent que leur choix était le bon ; Julia était bien plus heureuse à Sainte-Alice. Dès qu'elle fut assise, son père engagea joyeusement :
《- Julia! Tu nous a manqué ! Ça va ?

- Oui, ça va, dit-elle tout sourire

- On avait remarqué !, intervint gaiement sa mère

- C'est parce que je suis vraiment contente de vous revoir, répondit calmement l'adolescente, Mais... il est où Flo'? s'interrogea-t-elle

- Il s'est porté volontaire pour faire un entraînement supplémentaire au club, mais il sera là à 13h, répondit Evelyne

- Ah, d'accord...

- Bon, allons-y ! déclara le père de famille》

Ils arrivèrent à la maison à midi et demie, descendirent le bagage de la jeune fille, et vaquèrent à leurs occupations. Evelyne s'occupa du repas, Claude fit du rangement et Juliana fit ses devoirs. Sur les coups de 13h, Florian arriva à la maison.

Dès qu'elle entendit les pas de son frère dans la chambre jouxtée à la sienne, Juliana décida d'aller lui parler, se disant que, malgré toutes leurs incartades, elle lui manquait peut-être. Elle avait le secret espoir que l'éloignement, en plus d'améliorer sa relation avec ses parents, améliorerait celle qu'elle avait avec son frère.
Elle se risqua donc à frapper à la porte. Une voix lasse demanda :
《- C'est qui ?

- Ta sœur, répondit-elle en entrouvrant la porte

- Tu me veux quoi ?, demanda-t-il, passablement agacé

- Je voulais te parler, dit-elle en se plaçant dans l'entrebâillement de la porte, ça fait longtemps...

- Bah, j'ai rien à te dire..., dit-il dans l'espoir d'arrêter cette conversation

- Ça va, toi ?, répondit sa sœur, décidée à briser la glace

-Ça va...

- Et avec Tara ?

- Elle m'a quitté la semaine dernière

- Ah...je suis désolée pour toi

- Oh, je l'aimais plus, et puis maintenant je suis libre, et toi ? Un copain ? Un mec intéressé ?

- Non, mentit-elle

- Ca m'étonne pas...c'est plutôt logique

- Et pourquoi ?

- T'as besoin que je te le dise ? T'as pas d'amis, t'es chiante, pas hyper bien foutue, et voilà.

- Ta gueule, répondit-elle avec lassitude

- Je rigole, c'est bon, prends pas la mouche. A part ça, tu veux parler d'autre chose ?

- Ce que tu veux...

- J'ai rien à te dire... donc, tu peux partir maintenant ? 》

Il la congédia d'un geste de la main dédaigneux et se coucha. Il ne pensait pas vraiment ses mots, mais voulait surtout se débarrasser de cette petite sœur qui, selon lui, ne comprenait rien à rien et était à l'origine de bien des problèmes dans la famille.

Juliana ne se fit pas prier et quitta la pièce d'un pas pressé. Elle était déçue, mais aussi très vexée ; il faut dire que cette critique l'avait touchée droit au cœur, car elle correspondait à l'image, faussée, qu'elle avait d'elle-même. Elle claqua la porte sans ménagement, retourna dans sa chambre, sur son lit, se lamenta, puis se consola à l'idée de voir Capucine l'après-midi, plus précisément à 15h, au centre-ville. Le repas avait beau être délicieux, elle n'en profita point, jetant des regards noirs à son frère.

A 14h30, elle avisa ses parents et quitta la maison. Après une bonne demie heure de trajet, elle rejoint son amie au lieu convenu, c'est-à-dire au devant d'une boutique d'optique. Dès qu'elle vit Capucine, Juliana l'étreint avec joie, puis, tout en discutant, les deux filles s'avancèrent jusqu'à un parc tout proche et là, elles s'assirent sur un banc. Après quelques minutes à parler de tout et de rien, Juliana parla de Philéas à sa copine :
《- Faut que je te raconte ! J'ai rencontré un mec qui me plaît !, dit-elle toute heureuse

- Oh, c'est trop bien ! Parle-moi de lui !, répondit Capucine intriguée

- Alors, il s'appelle Philéas, il est en terminale...

- Terminale ? l'interrompit son amie, choquée, il a quel âge ?

- Il a 18 ans...Mais c'est rien !, répondit-elle pleine de passion et d'enthousiasme

- Euh...5 ans d'écart, c'est pas "rien" ! Disons que c'est...problématique

- En quoi c'est un problème?

- Écoute, t'es une fille bien, t'es géniale, mais je pense pas qu'il s'intéresse à toi pour ça...

- Et tu penses qu'il s'intéresse à moi pour quoi ?

- Pour ton âge, justement... Il a peut-être des penchants...spéciaux pour les filles assez jeunes.

- Tu sous-entends que c'est juste mon âge qui l'attire ?

- Oui, répondit son amie sans hésiter.

- Mais tu le connais même pas, et je t'ai même pas parlé de lui !, opposa-t-elle d'un ton plaintif

- C'est vrai, tempéra Capucine, mais je trouve ça très louche qu'à 18 ans il ait des vues sur une fille de 13 ans...

- Tu penses que je suis pas assez bien pour qu'il soit intéressé par ma personnalité ?

- Mais non ! Justement, s'il se souciait vraiment de ta personnalité, il voudrait être ton pote ! S'il se souciait de ce que tu es, il chercherait l'amitié et surtout, il parlerait pas d'amour. T'es une fille bien, t'as l'air vraiment amoureuse mais je pense pas que cette relation sera bonne pour toi, je pense que le mieux c'est que tu t'éloignes de lui.

- Donc tu penses vraiment que je suis pas assez bien pour que quelqu'un veuille plus que de l'amitié avec moi, j'ai compris, dit-elle piquée au vif. Pour info, je passe chez lui mardi pro', je te tiendrai au courant, dit-elle avec détermination 》

Et elle se leva, puis tourna les talons, fâchée. Ce n'était pas la réaction qu'elle attendait, surtout d'une fille dont elle était si proche. Certes, elle imaginait bien que Capucine serait intriguée, voire même un peu inquiète, mais elle ne pensait pas que son amie serait aussi sceptique, vis-à-vis des intentions de Philéas.

Elle était absolument convaincue qu'il l'aimait tout autant qu'elle l'aimait.

Et ce, pour plusieurs raisons : tout d'abord, l'alchimie qu'elle avait sentie entre eux, s'ajoutait à cela l'oreille attentive qu'il lui avait accordée dès leur première rencontre, ainsi que la spontanéité avec laquelle il avait parlé de son propre passé, enfin venaient les affirmations de Diane. C'était probablement ce qui avait achevé de la convaincre, elle pensait que si Diane, cette fille providentielle, le disait c'était sûrement vrai.

Quant à Capucine, elle était restée assise, tant elle était surprise du comportement de sa copine. Juliana était une fille douce, et c'était, de mémoire, la première fois qu'elle la voyait si contrariée. Cette réaction n'avait fait qu'augmenter sa suspicion à l'égard de Philéas.

De plus, son avis sur la situation était tout tranché : il était anormal qu'un garçon de 18 ans s'intéresse amoureusement à une jeune fille de 13 ans. Cependant, elle était surtout soucieuse de l'état de la collégienne et décida de passer la voir plus tard dans la journée, une fois qu'elle serait calmée.

A 16h, Juliana rentra chez elle, plus agacée qu'elle n'était sortie, et tenta de se calmer en préparant sa valise pour le lendemain. Néanmoins, elle réussit à se contenir et demeura courtoise et serviable avec ses parents.

Elle passa même un agréable moment en leur compagnie lorsque tous trois regardèrent un film d'amour de leur jeunesse. Puis, elle se rendit dans le jardin, afin de s'occuper des chrysanthèmes et des plants de légumes de sa mère, avant de retourner dans sa chambre. Aux environs de 17h, la sonnerie retentit et la mère de famille ouvrit la porte.

Quelques instants plus tard, Capucine était dans la demeure, et, après avoir échangé des politesses avec Evelyne, elle demanda la permission d'aller voir son amie dans sa chambre, et l'obtint. Elle monta donc les escaliers et frappa à la porte. Juliana ouvrit, et, d'un air méfiant, elle demanda :

"- Qu'est-ce que tu veux ?

- Te parler. Je peux rentrer ?

- Tu peux, dit-elle en ouvrant la porte

Capucine s'assit sur le lit de son amie, inspira et lui dit d'un ton sincère :

- T'es mon amie, et je ne que veux ton bonheur. Mais, je m'inquiète pour toi. Je pense pas que tu devrais fréquenter ce gars, et encore moins aller, seule, chez lui.

- Je te comprends, moi aussi je veux que tu sois heureuse. Je prends note, et je ferai comme je le sens, d'accord ?

- D'accord, acquiesça Capucine"

Elle était rassurée, convaincue que son amie prendrait la meilleure décision pour elle-même.

Quant à Juliana, malgré toute la confiance qu'elle accordait à Capucine, sa décision était toute prise : elle irait chez Philéas. Elle comprenait les réticences de son amie, mais était sûre que rien de déplaisant ne pourrait lui arriver. Elle se disait qu'elle n'avait pas menti, qu'elle faisait comme elle le sentait et qu'elle le sentait bien.

Elles discutèrent encore d'autres sujets, se promirent de s'appeler régulièrement et de se voir au même endroit, à la même heure, la prochaine fois que Juliana serait en ville. Puis, Capucine s'en retourna chez elle, et Juliana termina sa valise.

*

Dimanche 22 septembre

Juliana et son père partirent de la maison pour la gare à 8h. Claude était un homme taciturne, c'est pourquoi un silence pesant régnait dans la voiture, tout au long du trajet. Enfin, ils arrivèrent à la gare à 8h30, et la collégienne alla attendre son train au quai habituel. Il arriva après 5 minutes d'attente.

Après plusieurs heures de trajet et une marche, Juliana arriva à l'internat à 13h40. Diane l'attendait dans leur chambre et l'accueillit avec joie. Elle lui apprit qu'elle était passée voir Philéas dans la matinée, qu'il lui avait parlé d'elle et qu'il avait hâte de la revoir. Puis, elle amena la conversation sur le rendez-vous et proposa de composer la tenue de son amie. Celle-ci accepta, et les essayages commencèrent. Finalement, Diane décida que pour le jour J, elle porterait une minijupe jaune moutarde, un haut turquoise satiné, une veste en cuir noir et des bottines rouges. Enfin, elles dînèrent et dormirent.

*

Mardi 24 septembre

Deux jours plus tard, le jour tant attendu était arrivé. A 15h30, dès la fin des cours, Juliana passa en coup de vent à l'internat pour se changer puis, grâce aux indications de Diane, notées sur un post-it, elle se rendit chez Philéas.

Elle frappa deux fois, puis il ouvrit.

Aussitôt qu'elle le vit, son cœur battit la chamade. Il l'émerveillait. Tout chez lui l'éblouissait : son mètre 80, ses beaux yeux bleu métallique, ses cheveux noirs soyeux, sa voix, son odeur.
À côté, elle se trouvait bien banale : elle mesurait un petit mètre 55, ses cheveux châtain bouclés étaient ternes, elle avait des yeux noisettes assez ordinaires. C'est pourquoi, lorsqu'elle vit avec quel désir il la regardait, elle se sentit extrêmement flattée.

Il la salua, l'invita à entrer, ils s'assirent face à face au salon, et discutèrent, puis elle lui rendit la broche, se leva et se dirigea vers la porte. Mais, alors qu'elle était à quelques pas de la porte, il lui dit, d'un ton solennel :
« - Tu sais, la broche, c'était une excuse, pour que tu viennes...

- Ah bon ?, dit-elle en se retournant vers lui, Et pourquoi ?

- Parce que j'ai quelque chose à te dire, répondit-il d'un air mystérieux, en s'approchant d'elle

- Et... c'est quoi ? demanda-t-elle tout étonnée

Il s'approcha d'elle, la prit par la taille et l'attira à lui, puis plongea son regard dans celui de la jeune fille et, d'une voix calme, lui déclara :
- J'ai eu un coup de foudre pour toi, je t'aime

- Moi aussi je t'aime, répondit-elle »

Il l'embrassa avec passion.

Elle tenta maladroitement de lui répondre, c'était son premier baiser. Il comprit, et s'en amusa. Pour la mettre en confiance, il lui caressa les cheveux en la regardant dans les yeux, et la complimenta sur sa tenue. Puis, il l'embrassa de nouveau, avec plus d'ardeur encore. Il en profita pour passer une main sous son haut et une autre sous sa jupe. Elle frissonna. Mais, aveuglée par l'amour, elle décida de laisser passer, persuadée que c'était une maladresse, une erreur. Elle résolut de lui en parler à posteriori, certaine qu'il la comprendrait.

Quant à lui, il vivait un moment délicieux. Cette fille était définitivement une perle rare, celle qu'il lui fallait : elle n'était qu'innocence, candeur, pureté et naïveté.

Ils ne se connaissaient que depuis une semaine, mais semblaient avoir noué une intense connexion. Dans les bras de Philéas, Juliana se sentait aimée, désirée, choyée. Quant à lui, il savait que, dorénavant, elle lui serait fidèle, loyale, dévouée...

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