Chapitre 6 : La fillette

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La fillette, cachée dans d’épais taillis, ne quittait pas sa mère des yeux. Celle qui l’avait mis au monde sentait sa présence. Elle regardait dans sa direction sans se départir de son joli sourire. La gamine avait les cheveux trempés. Des perles d’eau coulaient sur son visage telles des larmes mortelles, et y laissaient de longues traînées noires. La teinture, appliquée à la va-vite, n’avait pas pu sécher. Les inquisiteurs étaient arrivés bien trop tôt.

Un villageois avait donné l’alerte deux heures auparavant : une sorcière vivait dans les bois. Il se murmurait qu’elle aurait enfanté un démon. Les représentants de Dieu s’étaient vite lancés à la recherche de ces impies. La femme eut juste le temps de cacher sa fille et de dissimuler sa rousseur.

Les hommes arrivèrent à toute allure sur leurs coursiers. Ils la capturèrent sans ménagement et la plaquèrent sur le sol terreux de sa cuisine. Elle entendit de lourds coups de masse à l’extérieur. Après cinq minutes de silence, on la tira hors de la maison et l’attacha avec violence à un haut piquet.

– Où est ton enfant vile sorcière ? l’invectiva, un homme tout de noir vêtu.

– Je n’ai pas d’enfant, hurla la femme.

L’inquisiteur dodelina de la tête. Il la fixa de ses yeux pleins de haine et fit signe au bourreau de s’approcher.

– Si tu veux te repentir, il est encore temps ! Donne-nous ton bâtard et peut-être que le Christ sera indulgent envers toi !

La mère lui sourit avec amusement :

– Je suis vierge, souffla-t-elle.

L’homme indiqua, à l’exécuteur, son approbation. Ce dernier alluma le bûcher. Les flammes montèrent vite. La chevelure rousse de la dame resplendissait à la lumière du flambeau. Elle regarda vers sa fille et se donna de la contenance. Mais, lorsque les langues incandescentes grimpèrent le long de son corps, elle ne put réprimer un cri de douleur.

La gamine hurla à son tour et sortit de sa cachette.

– Fuit ! l’exhorta sa mère dans un ultime effort.

L’assemblée se retourna vers l’enfant. Cette dernière se précipita dans le bois. Elle courait dans un brouillard de larmes. Elle connaissait la forêt par cœur, et distancerait facilement ses poursuivants. Les chevaux ne passeraient pas par là. Elle ne s’arrêta qu’au bout d’une heure. Ici, le silence régnait . Elle se laissa couler le long d’un arbre et acheva son deuil. L’image du visage brûlé de sa mère la hanterait toute sa vie. Alors que la petite se calmait, elle entendit un craquement de branches sur sa droite. Elle se redressa. L’avaient-ils retrouvée ? Impossible. Les fourrés remuèrent sur sa gauche. La fillette, terrorisée, n’esquissa aucun mouvement. La pleine lune, brusquement dévoilée par les nuages, éclaira le bois de sa lumière blanche. Elle vit alors des êtres inhumains situés à une vingtaine de mètres de sa position. Ils lui laissaient une seule échappatoire. Elle s’y précipita en un éclair. Elle entendit des hurlements sauvages se lancer à ses trousses. Elle fila à toute allure entre les arbres. D’ici, elle atteindrait les grottes du bois rapidement et s’y dissimulerait. Cinq minutes plus tard, elle s’engagea dans une des cavernes. Les autres étaient proches. Elle se hâta dans le noir complet. Heureusement, elle connaissait tous les dédales de ces lieux. Elle ferma les yeux et fonça. Elle saillit alors au cœur d’une prairie inondée de soleil.

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