« La boucle est bouclée. »

Ayant parcouru lentement la dernière phrase du texte, le Lecteur posa délicatement le livre sur la table basse. Il n'était pas sûr d'apprécier le choix de l'Auteur de terminer ainsi. Il avait une étrange sensation de manque. En fait, cette fin le laissait sur sa faim…

Le Téléspectateur appuya nerveusement sur le bouton de veille de la télécommande. Décidément, cette série sur un type qui lit un livre devenait de plus en plus stupide. Il s'attendait à voir un mélange astucieux de scènes entre la réalité et l'imaginaire suscité par le roman sur fond de métaphores entre actions oniriques et émotions authentiques. Au lieu de ça, on avait droit à cette voix off détaillant les états d'âme du Lecteur. C'était décidé, il ne la regarderait plus. Il avait mieux à faire de toutes façons…

Le Professeur s’arrêta de lire pour s’adresser à sa classe. « Vous voyez ici », expliqua-t-il, « apparaître le thème central de l’étude : le dégoût grandissant du Téléspectateur à mesure qu'il découvre l'intrigue de la série. Et ainsi s'achève ce cours d'analyse littéraire. Avant que je vous libère, l'un d'entre vous saurait-il me résumer ce qu'il a appris ici en une phrase ?  ». Une main se leva. D'un geste, le Professeur invita l'Étudiant à parler…

Le cliquetis de la machine à écrire s’arrêta. L’Auteur réfléchissait à la manière dont il allait décrire le fil des pensées de l'Étudiant. Il savait, depuis qu'il avait tapé le premier mot de ce roman, qu'il lui faudrait trouver une fin efficace et originale. Il avait espéré qu'une idée lui viendrait en écrivant, mais le roman était presque terminé et il n'avait toujours rien. Soudain, un sourire éclaira son visage. Il la tenait, cette conclusion qu’il cherchait depuis si longtemps. Rapidement, il pianota : 

« La boucle est bouclée. »