5 - Mauvaise surprise

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La traversée du couloir se passa rapidement. Les seuls bruits que l’on pouvait entendre étaient les pas de l’agent et de sa comparse, qui résonnaient faiblement. Ils se trouvaient à présent devant la porte fermée. Ronan posa sa main sur la poignée qu’il essaya de tourner. En vain. Fermée à double tour. Il pesta entre ses dents, légèrement ennuyé.

  • Eh bien, on dirait qu’on va devoir oublier la discrétion finalement.
  • Qu’est-ce que tu racontes ?

La jeune femme pencha doucement la tête sur le côté, comme à chaque fois qu’elle ne comprenait pas quelque chose, ou que quelque chose lui échappait. L’agent recula d’un pas, intimant à sa compagne de faire de même, puis expliqua simplement :

  • Il va falloir que je fasse sauter la serrure si on veut passer. Et ça va être plutôt bruyant.
  • Euh… Me dis pas que tu vas… avec ton…

Ronan sortit son arme, chargea et visa la serrure.

  • Très bien. Alors je ne te dis pas que je vais faire sauter cette fichue serrure en tirant dedans avec mon flingue.

A peine termina-t-il sa phrase qu’il tira une première fois, suivit d’une seconde et d’une troisième, pour être sûr et certain que cette porte cède. Le tout dans un boucan assourdissant. Lorelai avait posé ses mains sur les nageoires qui lui servaient d’oreille le temps de la manœuvre, avant de pousser un petit soupir de soulagement une fois que son comparse eut terminé. La porte était désormais bien abimée, mais, plus important, elle était ouverte. Gardant son arme en main, Ronan la poussa légèrement pour l’ouvrir dans un grincement peu accueillant. Devant le duo se trouvait un autre couloir, bien plus sombre. Seuls les néons de secours étaient allumés, donnant à l’endroit un air effrayant de fin du monde. La jeune femme pensa immédiatement à ces films catastrophe qu’elle avait vu à la télévision et sentit un frisson remonter le long de sa colonne vertébrale. Elle se rapprocha à nouveau de Ronan, qui avait commencé à s’aventurer avec précaution dans le couloir. Lorelai serrait son arme contre elle, bien décidée à tirer sur la première chose qui leur tomberait dessus, qu’elle soit dangereuse ou non. Car prudence est mère de sûreté, comme on le lui avait si bien appris.

Ronan ouvrit avec précaution la première porte à sa droite. Elle donnait sur une petite pièce qui ressemblait à un bureau. Enfin, qui devait ressembler à un bureau en temps normal, car pour le moment, tout était dans un désordre monstrueux. Des dossiers et des feuilles jonchaient le sol, le tout accompagné de fournitures de bureau en plus ou moins bon état. L’agent soupira, puis poussa l’interrupteur qui aurait dû apporter de la lumière dans la pièce. En vain. Il chuchota simplement :

  • On repassera plus tard… Pour le moment, on va sécuriser la zone.

Lorelai acquiesça silencieusement d’un simple signe de tête. Sur le talons de son comparse, elle surveillait tout ce qui pouvait être inhabituel : un bruit, un geste, ou n’importe quoi d’autre. Sur le qui-vive, elle pouvait entendre son coeur battre à cent à l’heure dans sa poitrine. La deuxième pièce que Ronan ouvrit était du même acabit que la première, et sans source de lumière, cela ne valait pas le coup de farfouiller dans le bazar ambiant. Lorsque que le jeune homme posa sa main sur la poignée de la troisième porte, il sentit un frisson remonter le long de sa colonne vertébrale. Quelque chose lui disait intérieurement de ne pas ouvrir et de prendre les jambes à son coup. Il prit une grande inspiration pour se donner du courage, ce que ne manqua pas de noter sa partenaire. Elle demanda de sa voix douce, légèrement inquiète :

  • Est-ce que ça va Ronan ? Tu ne te sens pas bien ?

Il lui fit un sourire rassurant, et sa réponse suivit rapidement :

  • Non, non… Tout va bien. Ne t’inquiète pas pour moi. Reste concentrée.

La Nu-man hocha la tête, ses doigts se resserrant sur son arme. Ronan appuya sur la poignée, et la porte s’ouvrit dans un grincement terrifiant. Le spectacle qui les attendait derrière ne l’était pas moins. La salle était bien plus grande que les précédentes. Mal éclairée par les néons écarlates de secours, elle était remplie de grandes cuves, vides pour la plupart, car elles étaient purement et simplement brisées. Le sol était jonchés de morceaux de verre, et glissant comme pas permis à cause des flaques de liquides. Et au milieu de tout ça, des cadavres. Lorelai tremblait derrière son compagnon, et ce dernier avança dans la pièce, surpris, ne comprenant pas du tout ce qui avait pu se passer dans cet endroit. Il s’approcha de l’un des corps qui se trouvait non loin de lui et se pencha pour le détailler. Un Nu-man, et à en juger par son aspect singulier, un croisement avec un bœuf ou un taureau. Ronan continuait de regarder ce corps sans vie, fasciné. Quelque chose n’allait pas. La croissance de la pauvre créature n’était pas terminée. Ses membres étaient atrophiés, son corps trop maigre, sa tête trop petite. Quelqu’un avait brisé sa cuve avant la fin de son développement. L’humain se gratta la barbe, puis se releva, lançant un regard circulaire autour de lui.

  • C’est quand même bizarre tout ça…

Avec Lorelai qui le suivait comme son ombre, il s’approcha d’autres cadavres pour faire quelques vérifications. Et il comprit rapidement que les victimes n’étaient que des Nu-man qui n’avaient pas terminé leur croissance et dont la vie avait été arrachée avant leur naissance. C’était horrible, et l’expression de son visage ne le cachait pas. Il se retourna vers sa camarade. La jeune femme avait les yeux humides et se retenait de pleurer devant ce spectacle monstrueux. Ronan posa sa main sur son épaule pour tenter de la réconforter comme il le pouvait. Il voulait lui dire quelque chose, que ceux qui avaient fait ça seraient retrouvés et punis, qu’il n’y en aurait pas d’autres, mais… les mots restèrent coincés au fond de sa gorge. Comme si il n’y croyait pas lui-même. Quand enfin il ouvrit la bouche pour parler, un bruit sourd se fit entendre dans une autre pièce. Sûrement dans l’un de celles que le duo n’avait pas encore visité. L’agent fronça les sourcils, prenant un air sérieux, et serra son arme contre lui.

  • Je passe devant. Tu couvres mes arrières.

C’était un ordre, et Lorelai le savait. Se reprenant, elle lui répondit qu’elle avait compris avant de le suivre à nouveau. Ils sortirent de la salle des cuves avant de s’avancer vers l’une des portes qu’ils n’avaient pas encore ouverte. Le jeune homme sentait son cœur battre dans sa poitrine, comme si il allait exploser d’un moment à un autre. Il posa sa main sur la poignée de la porte, et un autre bruit sourd se fit entendre. Effectivement, cela venait de cette pièce. Ronan tourna rapidement la tête vers sa compagne, et, sûr que tous les deux était prêt, il ouvrit la porte d’un geste brusque, pointant de son canon ce qui s’y trouvait.

La pièce était bien plus petite que la précédente, mais possédait elle aussi des cuves à Nu-man. Toutes vides ou brisées elles aussi. Là aussi, des cadavres jonchaient le sol. Mais à l’inverse de l’autre pièce, il y avait des créatures, et des humains. Plus précisément des employés du BioLab.

Tenant toujours son arme devant lui, prêt à tirer sur tout ce qui bougeait, le regard de Ronan s’arrondit de stupéfaction lorsqu’il vit ce qui avait, probablement, fait du bruit avant leur entrée dans cet endroit. Il poussa un juron entre ses dents.

  • Mais bon sang… Il ne faut pas avoir de race pour faire un truc pareil…

Quelque chose se tenait debout au fond de la pièce, les observant depuis l’instant où le duo était entré. La créature, à première vue, ressemblait à un Nu-Man. Plus précisément, un canidé. Cela se voyait à ses poils, sales et couvert de sang séché, et à sa mâchoire aux dents acérées et pointues. Mais il y avait quelque chose qui n’allait pas, et qui avait sauté aux yeux de Ronan dès l’instant où il avait posé ses yeux sur la pauvre bête. Cette dernière était anormalement développée, ses bras et ses jambes étaient bien plus massives que la normal. Des restes de perfusions étaient encore accrochés à ses bras, et un tuyau bien plus important était fixé au poitrail du canidé. Il traînait sur le sol, laissant derrière lui un liquide visqueux. De la bave coulait le long de son menton, et ses yeux injectés de sang fixait les deux intrus. Et alors que Ronan ne pouvait détacher son regard de celui de la créature, cette dernière poussa un hurlement avant de se jeter dans sa direction, toutes griffes dehors. Heureusement pour l’humain, sa comparse était toujours sur le qui-vive. D’un coup d’épaule bien placé, elle le poussa sur le côté, avant de commencer à tirer sur le monstre. Lorelai n’était pas un as au tir, mais vu la masse qui se trouvait devant elle, elle n’eut aucun mal à le toucher. Le seul souci, c’était que les balles ne semblaient pas vraiment faire de l’effet à son adversaire. Esquivant l’attaque de front en faisant un saut sur le côté, la nu-man laissa échapper quelques termes fleuris de ses lèvres.

  • Merde… Comment on va s’débarrasser de c’truc ?

Puis sans attendre de réponse, elle vida entièrement son chargeur sur son ennemi, le touchant parfois, mais n’occasionnant pas de blessures mortelles. La créature, qui se trouvait non loin d’elle, fonça à grande vitesse dans sa direction, puis, sans qu’elle n’ait le temps de faire quoi que ce soit, attrapa le cou frêle de Lorelai.

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