Retour au calme

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Vingt minutes plus tard, je rangeai la Ford à côté de la voiture de Boris. Un autre voiture, une Camaro de la deuxième génération, années 70, superbement restaurée, noire avec deux bandes blanches sur le capot était garée à quelques mètres.

En approchant de la maison, j’entendis des éclats de voix venant de l’arrière. Emily était dans la piscine accompagnée d’un homme ressemblant à Boris, mais nettement plus jeune. Les deux jeunes gens s’ébattaient joyeusement, nus tous les deux.

Me voyant approcher, Emily fit les présentations :

— Flynt, je te présente Igor, c’est le fils de Boris. Il pilote des avions.

— Enchanté Igor, je vois que vous vous entendez bien ! répondis-je. Je vous laisse continuer, je vais retrouver Boris à l’intérieur.

Je trouvai Boris dans sa cuisine, en train de préparer le repas.

— Alors ? demanda-t-il, ton rendez-vous s’est bien passé.

— Ce n’est pas vraiment comme ça que j’avais prévu les choses, mais globalement, on a obtenu ce que l’on voulait.

— Bon, vous restez pour diner avec nous ? j’ai préparé une recette de mon pays. Il y a des zakouskis variés et du bœuf Stroganov.

— Je t’assure que ça aurait été avec plaisir, mais je me suis déjà engagé pour ce soir. Je récupère Emily et je file.

— Tu as le temps de boire un verre quand même, j’ai de la vodka glacée, dit-il en exagérant son accent d’Europe de l’Est. On ne refuse jamais vodka à un ami. C’est nekulturny.

— Va pour un verre de vodka, parce que tu es un ami !

Boris alla chercher une bouteille dans son frigo.

— Celle-ci vient directement de Russie. C’est Igor qui l’a rapportée de son dernier voyage.

— Il a l’air d’apprécier Emily, remarquai-je.

— Tu peux le dire, elle lui a littéralement sauté dessus dès qu’il est arrivé. Ils sont allés droit dans sa chambre, enfermés pendant une heure, avant de se jeter nus dans la piscine. Je suppose que ça ne te gène pas.

— Oh non, bien au contraire, d’ailleurs, je me dis que je pourrais aussi bien aller diner sans elle, si ça ne te pose pas de problème.

— Pas du tout. Igor est un gentil garçon, mais il n’a jamais eu de liaison durable. Emily me semble une jeune femme charmante.

— Je ne suis pas sûr que je la recommanderais comme épouse pour ton fils, mais ce n’est pas à moi de juger.

En route vers le Strip et le Bellagio, j’essayai de joindre Long John, sans succès. Je lui laissai un message en lui demandant de m’appeler en fin de soirée. Je sortais juste d’une longue douche quand John et Jack frappèrent à la porte de la chambre. Je leur ouvris en peignoir.

— Installez-vous et servez-vous à boire, dis-je en retournant vers la salle de bain. Je n’en ai que pour quelques minutes.

— Emily n’est pas là, s’étonna John ?

— Non, je l’ai laissée en compagnie du fils de Boris. Lorsque je les ai quittés, ils batifolaient tous les deux, nus dans la piscine.

— Cette fille est étonnante, commenta John, elle saute sur tous les males qui passent à sa portée.

— Tiens, je n’avais pas remarqué, ironisa Jack.

— Tu es jaloux ? relança John.

— Non, pas du tout, bougonna son partenaire.

Je revins en caleçon dans la chambre pour interrompre la joute.

— Où est-ce que vous voulez aller diner ? c’est moi qui régale !

— Tu as les moyens de nous offrir quelque chose de bien, plaisanta John en désignant les deux valises posées à côté du lit.

— C’est vrai, alors lâchez-vous.

Après un petit conciliabule, les deux hommes m’annoncèrent leur choix.

— On commencerait bien par un drink au Skyfall Lounge. Ensuite on verra bien.

Je connaissais le Skyfall, réputé pour sa vue impressionnante sur le Strip et les casinos depuis sa terrasse au 64e étage. J’appelai le concierge de l’hôtel pour lui demander d’effectuer une réservation.

— On y va à pied ? demandai-je.

— J’ai assez joué au soldat pour aujourd’hui, répondit John. On prend un taxi !

Les boissons venaient de nous être servies. Un silence inhabituel s’installa entre nous. Enfin, pas si inhabituel que ça. Nous connaissions ce moment particulier, après une mission sur le terrain où chacun revit les moments intenses de l’action qui vient de se terminer. Je brisai le charme en demandant à mes deux acolytes ce qu’ils avaient comme projets. Ce fût John qui se lança le premier.

— Je crois que je vais aller surfer à Hawaï. J’en ai envie depuis un moment et un ancien des Seals a repris un petit hôtel à Waikiki.

— Et toi, demandai-je à Jack.

— Je ne sais pas encore, je vais peut-être faire un tour dans le Nord, chasser le gros gibier dans le Montana, en passant par Yellowstone. Je n’aime pas trop l’été en Californie.

— C’est pas un peu tôt pour la chasse ?

— Dans certains coins, ça commence dès le 15 août. J’ai le temps d’y aller tranquillement…

— Tu vas rester à Vegas ? me demanda John.

— Je ne crois pas non. Pas seulement par sécurité, mais aussi pour voir un peu d’autres régions. J’ai l’intention d’aller en Europe. Je vais assurer mon dernier contrat ici, et ensuite je quitte la ville.

— Oui, ce n’est pas comme si tu avais besoin d’argent, commenta Jack.

— C’est vrai. En tout cas, je tiens encore à vous féliciter pour le travail que vous avez accompli. Mark assurera le règlement de votre prestation. Je lui demanderai d’ajouter un bonus.

— C’est sympa de ta part, mais ça faisait partie du job.

La soirée s’écoula doucement, nous enchainions verre sur verre en évoquant des souvenirs d’un passé pas si lointain. Vers minuit, je donnai le signal du départ. Nous nous séparâmes sur une dernière accolade. Je n’étais revenu pas depuis bien longtemps quand le téléphone dédié à Long John sonna. Ce dernier me demanda comment s’était déroulée l’opération. Je lui racontai comment l’affaire avait dévié de sa trajectoire, quand Pablo avait annoncé être au courant du détournement.

— C’était un risque, il faut le reconnaître, mais finalement ça se termine plutôt bien pour toi. Je vais exploiter les événements à notre avantage et ajouter un volet au scénario que j’avais prévu.

— Qu’est-ce que tu envisages ?

— Je ne peux pas te le dire au téléphone, tu le sauras assez vite. Lis les journaux ce week-end.

— Au fait, tu pourrais peut-être encore me rendre un petit service. J’ai deux valises dans ma chambre d’hôtel qui m’encombrent un peu. J’ai pensé que tu pourrais peut-être leur trouver une meilleure utilisation.

— En effet, que dirais-tu de dimanche après-midi ?

— Un peu court pour moi, j’ai une partie samedi soir, que dirais-tu de dimanche soir, chez ma mère à Carpinteria ? Je t’enverrai l’adresse.

— C’est bon pour moi. À dimanche alors.

Je cherchai une musique d’ambiance sur la radio pour finir la soirée. Je m’arrêtai sur la voix de Diana Krall reprenant « California Dreamin’ »*. J’ouvris une mignonette de whisky du minibar, le temps du morceau avant de me mettre au lit.





* California Dreamin’ : titre original des Mamas and Papas, groupe américain formé dans les années 60. Repris par Diana Krall dans son album « Wallflower ».

https://www.youtube.com/watch?v=tjPn8lE4XlY

https://www.youtube.com/watch?v=qhZULM69DIw

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