800.000 $

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Je m’étais amusé à faire les calculs et je me demandais si les huit cent mille dollars pourraient tenir dans une seule valise ou si Long John arriverait avec deux bagages. Ça faisait quand même quatre cents liasses de vingt billets de cent.

Je m’étais entretenu avec lui au téléphone après avoir concédé une séance de câlins à Emily. J’avais eu du mal à l’envoyer dans sa chambre pour faire le point au calme. Mon financier m’avait annoncé son arrivée pour le milieu de journée, sans me préciser ni d’où, ni comment il arriverait. Il me confirma que le principe de l’échange avait été accepté et que Pablo attendait qu’on lui transmette l’heure et le lieu. Je précisai qu’on le communiquerait le lendemain, après la visite de John et Jack.

J’avais également rassuré Boris en lui confirmant que j’avais réglé les détails avec le casino pour mon engagement le week-end suivant. Si l’échange tournait mal, les parties de poker ne seraient de toute façon plus vraiment un souci pour moi.

Il était plus d’une heure, encore tôt pour moi, quand je m’allongeai sur le canapé du salon. Je ne voulais pas prendre le risque de réveiller Emily et repartir pour une séance de jambes en l’air. J’ai mal dormi, en partie à cause du confort tout relatif du canapé, mais surtout parce que j’ai passé en revue toutes les problèmes possibles.

Pablo pouvait venir avec un nombre d’hommes important, mais je n’y croyais pas trop, ils ne seraient sans doute pas plus de trois ou quatre. Ils pouvaient vouloir me faire la peau, pour l’exemple, et se barrer avec le fric, mais outre que je ne voyais pas quel serait leur bénéfice, je comptais sur mes alliés pour éviter une telle situation.

Bien sûr, Pablo pourrait avoir la rancune tenace et vouloir me faire un coup en traître. Pour éviter cela, Long John avait déjà préparé le deuxième effet Kiss Cool. Il ne m’avait pas donné beaucoup de détails, mais je savais que je pouvais me reposer sur lui. Pablo devrait être hors de mon chemin pour un bon moment. De toute façon, je commençais à en avoir assez de Las Vegas. C’était peut-être le moment d’aller goûter les plaisirs d’autres régions du monde. On m’avait dit le plus grand bien de Monte Carlo.

À six heures et demie, j’étais debout. Je fis une petite séance de gymnastique sur le tapis du salon, pour me dérouiller un peu. J’hésitai à descendre à la salle de fitness de l’hôtel, mais me ravisai, préférant ne pas laisser Emily seule dans la chambre. À huit heures, elle sortit de la chambre complètement nue, les cheveux ébouriffés.

— Tu étais où, mon nounours ?

— J’ai dormi sur le canapé.

— Tu ne veux pas venir te recoucher avec moi ? J’ai envie de toi.

— Je préfèrerais que tu ailles t’habiller, je vais appeler le room service et j’aime autant que le groom ne te voie pas dans cette tenue.

— Pourquoi ? Moi, ça ne me dérange pas.

— Tu veux des œufs pour ton breakfast ?

— Non, fit-elle boudeuse, je n’ai pas faim.

— Comme tu voudras.

Je commandai un solide petit-déjeuner pour deux, sachant qu’elle risquait de se raviser en voyant la table dressée. Elle était encore dans la salle de bain lorsque le repas arriva. Elle vint me rejoindre avec une serviette nouée sur ses cheveux et une autre autour de la poitrine. La connaissant, je ne donnais pas longtemps avant qu’elle ne se retrouve sur le sol.

Je dois le reconnaitre, le spectacle n’étais pas déplaisant. Elle n’avait certes pas inventé l’eau tiède, mais elle était vraiment canon et finalement très accommodante. Il fallait juste garder en tête qu’elle prenait tout au premier degré.

— Tes amis vont revenir aujourd’hui ?

— Oui, ils seront là vers onze heures, ils ont quelques courses à faire avant de venir nous rejoindre.

— Je les aime bien, surtout John. J’ai l’impression que Jack ne m’apprécie pas trop.

— Rassure-toi, c’est comme ça avec toutes les femmes.

— Ah ! Dans ce cas, ça ne me gène pas. Moi j’aime bien les filles aussi, il faut juste savoir se faire plaisir. Je vais te dire un secret, tu ne le raconteras pas à ta maman ?

Je la rassurai.

— L’autre jour, quand tu m’as laissée au bord de la plage, je suis allée me baigner avec Mary. Elle m’a demandé si elle pouvait caresser mes seins et elle m’a embrassée. J’ai beaucoup aimé, malgré son âge.

— Ne t’inquiète pas, Mary est lesbienne, ce n’est un secret pour personne et maman s’entend très bien avec elle, ajoutai-je avec un clin d’œil.

— Mais elle a parlé de son mari !

— Oui, c’est vrai, mais en Californie, dans les années soixante dix, il n’était pas très bien vu de ne pas être en couple hétéro, même chez les hippies, alors elle s’est mariée avec un homme gay. Ils ont vécu sous le même toit de façon respectable pendant plus de quarante ans. Il a gagné beaucoup d’argent et quand il est mort, il lui a laissé une très jolie fortune et une magnifique villa sur les hauteurs de Santa Barbara.

— Qu’est-ce qu’on va faire en attendant, tu m’emmènes m’acheter des vêtements ? Il y a plein de boutiques en bas.

— Tu sais que je ne suis pas millionnaire ?

— C’est dommage. J’ai vu les vidéos sur la chaîne de l’hôtel : Prada, Gucci, Vuitton et d’autres que je ne connais même pas.

— Tu veux aller au spa ?

— Oh oui ! mais je n’ai pas de maillot de bain.

— On va acheter des maillots et on ira barboter un peu.

Une demi-heure plus tard, et plus léger de cent cinquante dollars, je bullais dans le jacuzzi. Nous étions les seuls clients à cette heure relativement matinale pour Las Vegas. Il me fallut beaucoup de tact pour repousser les tentatives d’Emily, dont la main s’aventurait sous la surface de l’eau. Un peu avant onze heures, nous étions de retour dans la chambre. Lorsque John et Jack s’annoncèrent, j’envoyai Emily dans la chambre pour discuter librement.

— Nous sommes retournés à Sloan, déclara Jack. John a trouvé un bon coin pour couvrir tout le défilé et la zone devant les mobile homes. Il faudra laisser un véhicule à l’extérieur du canyon, pour ne pas nous trouver pris de court en cas de pépin. Et aussi, si les choses tournent mal, il serait préférable qu’on ne puisse pas faire le lien entre le véhicule abandonné et nous. On peut s’occuper de ça demain dans la journée.

— Vous voulez dire piquer une voiture ? demandais-je.

— Tu as vraiment besoin de connaître les détails ?

— OK, c’est vous les pros.

— Oui, c’est pour ça que tu nous paye.

— En cas de grabuge, ajouta John, on fout le feu aux bagnoles et on rentre avec le pick-up qu’on aura laissé à l’écart.

— Vous pensez que ça pourrait vraiment mal tourner ?

— On ne sait jamais, si on tombe sur des petits caïds complètement camés, tout est possible, mais on aura de quoi faire face. On a prévu deux Uzi *, des M83** et des lacrymo. On a aussi des gilets pare-balles.

— Vous avez un casque lourd pour moi, plaisantai-je ?

— On pourrait te trouver ça, mais ça risquerait de leur mettre la puce à l’oreille, répliqua John.

— Sérieusement, reprit Jack, il faut que tu nous précises tes objectifs. Tu veux négocier, faire des prisonniers ou liquider tout le monde ?

— Je préfèrerais traiter ça entre gentlemen, mais s’ils sortent leurs flingues les premiers, on ne fait pas de quartier.

— Pas de problème pour nous.

Le téléphone réservé aux communications avec Long John sonna brièvement. Je rappelai immédiatement.

— Je suis à Vegas, mais j’aime mieux ne pas me montrer à l’hôtel, il y a des caméras partout. Je t’envoie un point de rendez-vous discret dans quinze minutes. Tu peux m’y rejoindre pour treize heures ?

— Tes bagages sont encombrants ?

— Deux valises, une quinzaine de kilos chacune.

— OK, je viendrai accompagné.

— Parfait, on se retrouve dans une heure.

Après avoir raccroché, je m’adressai à Jack.

— Tu veux m’accompagner chercher le fric ou tu laisses ce plaisir à John ?

— Je viens avec toi, je le laisse faire la causette avec la demoiselle.

Une demi-heure plus tard, nous roulions vers le nord. La radio diffusait « Million Dollar Man »***. Je me demandai quel effet ça faisait de transporter autant d’argent dans un pick-up Ford !

* Uzi : pistolet mitrailleur d’origine israélienne

** M83 : grenade fumigène

*** Million Dollar Man : chanson de Lana Del Rey

https://www.youtube.com/watch?v=60znVchm_nk

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