76. Déchaînement de violence

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Malcolm

Oh purée ! On a un boxeur dans nos rangs et on ne le savait pas ! Non mais, quelle droite ! La tête d’Edgar est partie en arrière et j’ai connu un court instant de jubilation devant cet acte de folie que j’aurais rêvé d’avoir le courage de faire, mais les choses s’enchaînent rapidement après cet acte déraisonné de Clément. Il est plaqué au sol et nous faisons désormais face à des gardes en colère qui pointent leur armes sur nous. Ca va être compliqué de rester pacifistes et revendicatifs dans ces conditions.

— Ne tirez pas ! crié-je alors qu’Edgar se relève, aidé par son fils.

Marco a l’air dans une rage folle. Il s’assure que son père va bien avant de se retourner vers Clément qui est toujours maintenu au sol et ne se débat même plus. J’ai peur de ce qu’il va lui arriver et je me dis qu’il faut que j’intervienne.

— Marco ! Non ! Calme-toi ! lancé-je, réussissant au moins à détourner son attention quelques secondes.

— Me calmer ? J’y penserai quand je lui aurai refait le portrait ! vocifère-t-il en me fusillant du regard.

Et c’est exactement ce qu’il se met à faire. Il assène d’abord un puissant coup de pied dans le ventre de Clément qui se plie en deux au sol en émettant un cri qui me fait souffrir pour lui. Il est désormais tout recroquevillé et je constate qu’un garde essaie de calmer Marco en l’attrapant par le bras, mais son chef le décourage de continuer ses tentatives d’un regard froid de tueur. A nouveau, il tourne son attention vers le jeune homme qui se tord de douleur sous ses yeux et, toujours aussi impassiblement, lui porte un nouveau coup puissant avec le canon de son fusil. Clément a le crâne en sang et s’effondre au sol.

— Oh non ! Il l’a tué ! m’exclamé-je, perçant le silence pesant qui venait tout juste de s’installer.

— Mais faites quelque chose ! s’égosille Liz en se précipitant près de Clément. Espèce de cinglé !

Alors que Marco lève la main pour frapper Liz, je bondis à mon tour et interviens pour retenir son bras. C’est le signe de la rébellion pour le reste des manifestants. Un rugissement retentit dans mon dos et j’ai l’impression qu’un véritable déferlement prend naissance et submerge les gardes qui ne savent plus où donner de la tête. C’est comme si ce coup porté à l’un des nôtres était un coup porté à toute la communauté et nous ne pouvons pas laisser passer une telle infamie.

Impossible de savoir ce qu’il se passe réellement. Je suis bousculé par une nuée de bras et de jambes alors que les gardes jettent leurs armes au sol et se retirent en courant. Liz m’attire à elle et me crie de l’aider à protéger le corps de Clément. Je me redresse et m’assure que personne ne lui marche dessus. J’essaie de comprendre qui est en train de remporter cette bataille, même s’il semble que nous sommes en position de force. Et effectivement, autour de nous, nos compagnons de révolte sont euphoriques alors que les troupes fidèles au Conseil sont en pleine débâcle.

Seul Marco essaie de se défendre et tente d’asséner des coups puissants sur ses ennemis. Il est entouré de plusieurs combattants qui cherchent à le désarmer et à lui faire entendre raison mais il se défend bien, le bougre. De grands mouvements de sa part les empêche d’approcher. Je reporte mon attention quelques instants sur Liz.

— Comment il va ? Il est mort ? demandé-je, inquiet.

— Non, mais il est mal en point ! Il lui faut un médecin !

Un médecin ? Ça va être compliqué, la seule qui reste sur l’île est prisonnière et inaccessible. Que faire ? Si on ne trouve personne, Clément risque de mourir, ce serait horrible. L’île n’a pas eu de mort aussi horrible depuis au moins deux décennies.

— Mais on n’a plus de médecin, Liz ! Tu me demandes l’impossible, là !

— C’est le moment d’envoyer notre slogan, Malcolm. Il est plus que jamais véridique ! Il a besoin de voir un médecin, tout de suite, regarde-le !

Effectivement, du sang coule de sa tête, il n’a toujours pas repris connaissance et un peu de bave sort de sa bouche. La situation est dramatique et la seule solution, c’est que Jade vienne voir immédiatement ce qu’elle peut faire. Un peu paniqué, je regarde où en est Marco et je constate que dans l’affrontement qui a eu lieu, les manifestants ont réussi à le désarmer et qu’ils ont l’air prêts à lui faire payer le coup donné à Clément.

— Non ! Arrêtez ! crié-je à nouveau, conscient du manque d’efficacité de mes cris. Il doit me conduire à Jade. Clément a besoin d’un médecin et il faut absolument qu’on aille la retrouver ! Lui seul sait où elle est !

Incroyablement, ils m’écoutent et cessent leur avancée vers Marco. J’écarte deux manifestants sans me préoccuper de qui est parmi nous avant de récupérer une de ses armes et de la pointer sur lui.

— Marco, amène-moi à Jade. On a besoin d’elle et très vite. En cas d’entourloupe, je n’hésiterai pas à faire usage de l’arme. Fais-moi confiance là-dessus.

— Mais t’es dingue ! Lâche cette arme tout de suite, Malcolm ! Tu ne saurais même pas t’en servir, ricane-t-il.

— Tu veux parier ? Où est Jade ? Mène-moi à elle tout de suite où ça va barder pour toi. Je te promets que si tu te moques de moi, je lâche mes compagnons et que tu regretteras de ne pas avoir été recyclé plus tôt !

— Ils sont déjà partis la chercher, pas la peine de jouer au gros bras, Malcolm, soupire-t-il en jetant un œil en direction de l’entrée.

Je me retourne et constate en effet qu’une partie des manifestants est entrée dans le bâtiment.

— Je te promets, Marco, que si Clément ne s’en sort pas, tu regretteras que ce ne soit pas le Conseil qui te recycle car on va te régler ton sort !

— Malcolm, calme-toi, intervient Liz en posant sa main sur mon bras pour me faire baisser mon arme. Je crois qu’il y a eu assez de violence comme ça pour aujourd’hui, non ?

Ce contact a le mérite de me calmer et je m’agenouille près de Clément qui respire encore. J’espère que les coups reçus ne sont pas trop graves, mais je suis inquiet. Son souffle est saccadé et irrégulier et le sang coule, malgré le point de compression exercé par Liz que je relaie afin de la soulager un peu. J’ai la rage. Non seulement ce jeune homme n’aurait jamais dû se retrouver dans un état si grave, mais cette révolte n’aurait jamais dû exister. Et maintenant que tout ce mouvement est lancé, je me demande si quelqu’un est encore en capacité de le stopper. On a franchi le point de non retour et j’espère juste que le coût humain ne sera pas trop élevé.

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